Chez Nicolas Conraux, le mariage réussi de l’éthique et de l’attractivité

Plouider (29) Le chef étoilé de l’hôtel-restaurant La Butte livre son expérience. Pour lui, être attractif auprès de ses clients passe par l’adoption d’un comportement respectueux envers ses équipes, ses fournisseurs et l’environnement.

Publié le 07 février 2024 à 10:30

L’Hôtellerie Restauration : D’où part-on et où arrivons-nous ?

Nicolas Conraux : L’ancien modèle, dans lequel l’éthique durable et sociétale n’est pas au cœur du projet d’entreprise, débouche sur de la souffrance, de la part des équipes mais aussi du chef d’entreprise, qui se rend compte que quelque chose ne tourne plus. Le changement des mentalités - et le Covid y est pour quelque chose - vers plus de bien-être, pour soi, pour la planète, implique une remise en question de l’organisation de l’entreprise.

 

Quel chemin prendre pour y arriver ?

D’abord, on surmonte ses peurs : la réaction des clients, le temps que ça va prendre, l’argent que ça va coûter. On respecte ses propres imperfections et celles de ses équipes, et on est patient. Tout cela ne va pas se faire du jour au lendemain, on a conscience que le projet se construit petit à petit. Mais la vision est globale : on est éthique sur toute la ligne, c’est-à-dire dans toutes ses décisions et, au final, on arrive à ce que ça devienne une habitude.

 

Et si être attractif auprès de ses clients et de ses équipes se résumait à adopter un comportement éthique ?

En fait ce sont nos codes : la maison vit de cette manière et ceux qui la fréquentent - les clients, les équipes, nous - sont plus apaisés. Il y a trois piliers à respecter pour que la maison soit éthique.

> Que tout le monde s’y sente bien

Nous témoignons des marques de respect au quotidien à nos salariés. C’est quelque chose d’ancré au fond de nous-mêmes. Dans l’organisation du travail, cet état d’esprit se traduit par la responsabilisation des équipes. En cuisine, par exemple, chacun est responsable d’un plat du début à la fin, les tâches ne sont pas morcelées. Chacun est invité à donner son avis pour tendre vers une entreprise participative. Et nous avons développé la flexibilité dans les horaires.

L’uniforme, en salle et à la réception, participe également à se sentir bien. Les équipes discutent avec l’artisan et peuvent choisir une coupe adaptée à leur morphologie et qui leur plaît. Seules, la couleur et la matière sont uniformisées.

Enfin, d’un point de vue financier, les résultats sont partagés, il y a une prime d’ancienneté et le personnel saisonnier est logé.

Dès lors que les équipes au service des clients se sentent bien, par une sorte de mimétisme, ces derniers nous disent aussi se sentir bien chez nous. Et c’est ce que nous recherchons : offrir à nos clients un moment de détente et de bien-être pour qu’ils puissent se ressourcer.

 

> Que la maison s’ancre dans son territoire

Nous mettons en avant les richesses de nos territoires. Nous accordons beaucoup d’importance à la sélection des producteurs locaux et à la relation que nous entretenons avec eux. Nous favorisons les échanges entre les cuisiniers et les producteurs. Ce rapprochement et ce savoir qui est transmis, ça change la relation qu’a le cuisinier avec le produit et au final la qualité des plats que nous sortons. Nos clients sont sensibles à l’approvisionnement local et sont compréhensifs quand certains plats font défaut à la carte suite aux aléas météo.

Créer des liens et un écosystème sur le territoire, c’est aussi s’équiper et se fournir auprès d’artisans locaux qui sont animés par ce même souci éthique. Pour reprendre l’exemple des uniformes, ceux-ci proviennent de fibres de lin recyclées. Autre exemple : les meubles et les tables. Là encore, le coût à l’unité peut être supérieur mais ce sont des équipements qui d’une part, sont indémodables, et d’autre part durent plus longtemps. Cette façon de faire tient la route économiquement.

> Que la maison soit soucieuse de la planète

Dans nos hôtels-restaurants, nos clients aspirent à se faire du bien sans que cela ait un impact sur l’environnement. Ils sont donc sensibles à notre implication pour développer notre potager et mettre en place des circuits courts. Nos clients adoptent aussi un modèle de consommation plus respectueux, avec plus de légumes et moins de viande. Nous évitons également la surexploitation des produits de la mer. Les ormeaux, les algues dont nous avons besoin, proviennent de fermes marines.

Nous remettons au goût du jour des techniques comme la fermentation des fruits et légumes, dont l’un des intérêts est une conservation économe en énergie. Par exemple, plutôt que de congeler les framboises issues de la deuxième récolte en septembre, après fermentation, la préparation est lissée et déshydratée, on en fait des cuirs de framboise qui se garderont pour de futurs coulis ou glaces.

Notre savon solide est fabriqué par un artisan avec des produits locaux et les chutes seront ensuite récupérées par une association caritative. Enfin, nous adoptons le zéro plastique.

Nous hôteliers-restaurateurs, de par nos échanges avec les artisans, les producteurs et les éleveurs locaux, nous sommes acteurs de la mise en avant des richesses de nos territoires.


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Publié par Olivier MILINAIRE



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