“Les consommateurs souhaitent retrouver du sens dans ce qu’ils mangent”, constate Bernard Boutboul, au lendemain de la crise sanitaire liée au Covid-19. Si bien que pour le fondateur et président du cabinet Gira, ‘manger mieux’ à l’orée des années 2020, cela passe par des cartes courtes, avec davantage de saisonnalité, de rotation des propositions et un plat du jour “vraiment du jour”. À cela s’ajoute une vigilance accrue sur “ce que l’on montre”, poursuit le consultant. À l’instar des cocktails préparés par les barmen ou des plats concoctés dans une cuisine à la vue des clients. Autrement dit : il faut rassurer et redonner confiance, comme cela a été le cas avec la traçabilité de la viande bovine suite à la crise de la vache folle.
Produits de saison et de ‘pleine saison’
“Un bon aliment doit d’abord être bon pour celui qui l’a produit - et qu’il a vendu à un juste prix pour lui -, puis bon pour la planète, pour la santé de celui qui le mange - c’est-à-dire sans pesticides, pas transformé… - et, enfin, bon pour le palais”, explique Alexandre Marchon. Ce chef de 33 ans, qui s’apprête à ouvrir son premier restaurant - qui porte son nom - d’une cinquantaine de couverts avec terrasse, à Paris (XIe), fait même la nuance entre produits de saison et de “pleine saison”. “C’est à ce moment-là que le fruit ou le légume va exprimer tout son potentiel. Et cette pleine saison n’est pas la même d’une région à une autre”, explique-t-il.
Miser sur le local, la proximité, mais aussi sur les notions de terroirs et territoires, cela fait partie du manger mieux. “Cela devrait être une évidence pour tous les cuisiniers”, souligne encore Alexandre Marchon, qui fustige ceux qui n’en font qu’un argument marketing et “continuent de servir des fruits exotiques ou des anguilles, alors que celles-ci sont en voie de disparition”.
Cuisine faite ‘en direct’
“La façon dont on se nourrit décide du monde dans lequel on vit.” Telle est la devise du chef étoilé Bruno Verjus. Médecin de formation, il a ouvert en 2013 le restaurant Table, à Paris (XIIe), désormais auréolé d’une étoile Michelin. Sa devise : “Dis-moi ce que tu manges et je te dirais quelle sera ta longévité”. Le chef parle de “se nourrir en conscience”, en préférant “aller chercher des carottes sur un marché plutôt qu’un hamburger dans un sac en plastique”.
Celui qui aime travailler “les petites séries” - il peut recevoir des langoustines encore vivantes quelques fois par an…- souhaite “redonner de la culture” sur la nourriture et “le sens de l’effort” pour aller jusqu’à elle. “Et ce n’est pas une question d’argent, insiste-t-il. Car cela coûte moins cher que des produits transformés, vendus en supermarché.” Résultat : chez lui, pas de menu, mais une carte qui change tous les jours et une cuisine faite “en direct”. Durant l’épisode du Covid-19, il a fait de la vente à emporter “pour ne pas céder le terrain à la grande distribution et aux fast food”. Une sorte de résistance qui fait écho chez Alexandre Marchon, dont les recettes mettent le légume “comme élément central de l’assiette” et dont les vins sont nature ou en biodynamie : “La génération de chefs au-dessus de la mienne a découvert la mondialisation. Elle y a vu un progrès en pouvant, tout à coup, travailler des produits nouveaux. Aujourd’hui, on se rend compte des limites de tout ça. Et je pense que les générations à venir en auront encore plus conscience.”
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Publié par Anne EVEILLARD