Comment réenchanter votre entreprise, pour vos clients, pour vos salariés, pour vous ?

L'Hôtellerie Restauration a publié récemment le quiz Comment réenchanter votre entreprise, où chacun a pu compter les marches qu'il lui restait à gravir pour avoir une organisation du travail au top dans son entreprise. Dans cette série de questions-réponses, Olivier Milinaire, co-directeur du journal L'Hôtellerie Restauration, avec la participation d'Isaac Getz, auteur de L'entreprise libérée, répondent aux questions qu'une telle transformation soulève.

Publié le 13 décembre 2021 à 18:48

L’Hôtellerie Restauration : Vous proposez une transformation pour permettre la liberté d’action et la responsabilité de salariés. Cela suppose que l’état actuel n’est pas satisfaisant. Pouvez-vous décrire ce que vous voyez dans les entreprises que vous observez et quel intérêt elles trouveraient à se transformer ?

Il n’y a qu’à regarder autour de soi : quel est le pourcentage de salariés engagés, ceux qui vont dans leur entreprise non pas par obligation mais par envie ? Selon Gallup, seulement 6 % des salariés en France. Les employeurs ne se rendent pas suffisamment compte à quel point un salarié apporte plus à son entreprise s’il est engagé. Sinon, ils bâtiraient un environnement de travail satisfaisant les besoins humains de leurs salariés, plutôt que de les ignorer. Et leur entreprise y gagnerait largement. D’abord, en ce qui concerne le ‘mieux vivre’ des salariés et leur envie de donner le meilleur d’eux-mêmes et, par conséquent, en termes de valeur ajoutée. C’est-à-dire, pour les entreprises de l’hôtellerie-restauration, un meilleur service et des initiatives continues de salariés pour améliorer et innover dans une offre.

 

Quels sont les bénéfices que cela apporte à toute organisation humaine ? Parce que changer ses habitudes et se transformer est toujours difficile…

Oui c’est difficile, oui c’est prendre des risques. Mais des centaines d’entreprises démontrent que les résultats sont au rendez-vous. C’est juste du bon sens. On parlait du. C’est déjà une tâche honorable que de parvenir au mieux vivre des salariés. Mais il va de soi que le salarié heureux rend le client heureux, et l’inverse est vrai aussi. C’est un cercle vertueux : grâce aux salariés engagés qui prennent de nombreuses initiatives face aux problèmes, on obtient plus de résilience par les temps durs, moins de pertes, plus d’innovations face aux changements, plus de clients heureux, plus de chiffre d’affaires.

 

Vous dites qu’il faut y croire. Parce que ce n’est pas démontrable ?

Dire que le salarié heureux et engagé rendra l’entreprise et son chef heureux, c’est un pari du bon sens et pas une équation mathématique. Au passage, j’invite les chefs d’entreprise à mettre plus d’émotionnel et moins de cérébral dans leur entreprise. Cela commence par le simple fait qu’on aime ses salariés et les actes - pas les paroles - qui le prouvent, comme dans le fameux adage sur l’amour. Et si ça peut rassurer vos lecteurs chefs d’entreprise, la centaine de sociétés que j’ai étudiée le démontre. Dans différents secteurs, dans différents pays, de différentes tailles, en majorité des PME… Une entreprise qui place le mieux vivre de ses salariés au centre de l’organisation du travail surperforme ses concurrents qui ne pensent qu’au résultat financier.

 

Le chef d’entreprise qui croit aux vertus de travailler avec des salariés heureux et qui est prêt à transformer son entreprise doit donc commencer par identifier leurs besoins humains. Mais cela tombe sous le sens, non ? Plus de salaires, plus de repos ?

Les aspects matériels du contrat et de l’environnement de travail sont importants. Il faut rémunérer équitablement et avoir des conditions de travail correctes pour que ce sujet ne soit pas une barrière permanente entre le salarié et l’entreprise : “Si vous voulez que je fasse ça, il faudra m’augmenter d’abord…” Une fois cette barrière tombée, le dialogue peut commencer à la fois sur le sens que chaque salarié donne à son travail, à savoir quelle est sa vision-rêve de l’entreprise, puis, quel est l’environnement de travail dans lequel il souhaite évoluer. Et pour qu’il soit heureux, l’environnement doit répondre à trois besoins fondamentaux : égalité intrinsèque, réalisation de soi et auto-direction. Les entreprises traditionnelles tournées vers elles-mêmes et la performance financière ne satisfont pas ces trois besoins - et logiquement, la performance financière est difficile à obtenir.

 

Besoin d’égalité ? Mais tout le monde ne peut pas avoir le même salaire...

Attention : l’égalité intrinsèque n’est pas l’égalité matérielle connue en France comme égalitarisme. D’ailleurs, il est faux de prétendre que les salariés réclament tous le même salaire. Ils veulent un salaire équitable : à compétences et contributions différentes, salaires différents. Les salariés sont conscients du marché du travail et de leur contribution. Par contre, ils ont besoin d’être traités sur un pied d’égalité intrinsèque : les hommes ne demandent pas à être traités comme des êtres supérieurs, mais ils ne supportent pas d’être traités comme des êtres inférieurs. Autrement dit, tous demandent à être traités avec respect, considération, confiance, bienveillance. Par exemple, pour répondre au besoin d’égalité intrinsèque, l’organisation du travail doit abolir les privilèges. Une différence de salaire n’en est pas un. Une différence de traitement dans le planning des congés en cuisine ou en salle, le droit de garer sa voiture sur des places de parking de l’hôtel, l’avantage d’utiliser la blanchisserie de l’hôtel... Bref, tous les attributs de la hiérarchie, tous les signes qui sous-tendent l’idée qu’il y a des salariés - des êtres humains - plus importants que d’autres. Cela étant dit, proposez un salaire légèrement supérieur au marché du travail, d’une part, parce que sous-payer par rapport au marché est un manque de considération, en quelque sorte une triche que le salarié finira par découvrir, et d’autre part parce que les meilleurs vont partir, surtout dans un marché du travail à fort rotation du personnel. Il faut régler la question du salaire équitable pour amorcer un dialogue sur les besoins humains des salariés dont le premier est l’égalité intrinsèque. Quelles sont les pratiques managériales qui lui font se sentir intellectuellement inférieur ? Doit-il remonter tout problème à sa hiérarchie, demander la permission pour la moindre initiative ? Ce sont ces pratiques qui instaurent chez lui la conviction qu’il est entouré des sachants et qu’il n’est qu’un simple exécutant.

Management Isaac Getz #ENtrepriseLibérée# quiz


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Publié par Olivier MILINAIRE



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