L'Hôtellerie Restauration : Vous avez travaillé huit ans auprès du chef William Ledeuil, évoluant dans votre carrière. Aujourd’hui, vous avez repris et transformé le restaurant Ze Kitchen Galerie Bis pour créer Oktobre. Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Martin Maumet : J’ai commencé à Ze Kitchen Galerie auprès du chef William Ledeuil en 2013. En un an, j’ai eu l’opportunité de passer par tous les postes en cuisine. Ensuite, le chef m’a proposé le poste de second à Ze Kitchen Galerie Bis, où j’ai pris en charge la création de la carte, la gestion et le management. Le chef m’a toujours fait confiance et je me sentais bien dans cet environnement. En 2019, je me posais des questions sur mon avenir et envisageais une expérience à l’étranger. C’est à ce moment-là que le chef m’a proposé de m’associer avec lui, mais nous n’avons jamais trouvé l’adresse idéale pour notre projet. La même année, un incendie a ravagé notre établissement, entraînant six mois de fermeture. J’ai dû gérer les assurances, les travaux, et le personnel, ce qui m’a beaucoup occupé.
Nous avons alors décidé que j’entrerais au capital du restaurant, avec l’ambition de reprendre l’adresse à mon compte. Nous devions signer le 13 mars 2020, mais la pandémie de Covid-19 a retardé les choses. Nous avons finalement signé entre deux confinements, marquant le début de mon aventure entrepreneuriale. La troisième année, j’ai contacté les banques pour racheter les parts restantes. En 2022, le protocole de rachat a été mis en place. À l’été 2023, je suis devenu le seul propriétaire et j’ai entrepris de rénover entièrement le restaurant, à l’exception de la cuisine qui était neuve. Nous avons rouvert le 1er septembre 2023 sous le nom Oktobre.
Les quatre premiers mois ont été vertigineux. Même si je suis très organisé et que je sais où je veux aller, assumer toutes les responsabilités n’a pas été évident. Au début, j’écoutais beaucoup mon entourage, mais j’ai vite compris que j’étais seul à prendre les décisions. À partir de janvier, j’ai appris à me faire confiance, même si j’ai dépensé beaucoup d’énergie au début.
Qu’avez-vous changé dans le restaurant ?
Le principal changement a été le décor. Avant, même en travaillant pour faire plaisir au chef, j’avais une certaine liberté. Ma cuisine aujourd’hui est dans la continuité de ces huit dernières années. J’ai gardé l’idée d’un menu construit à partir des plats à la carte, en ajoutant une deuxième entrée et une assiette de fromage.
Comment décririez-vous votre cuisine ?
Ma cuisine est plutôt végétale et française, avec des aromatiques - produites en France - qui nous amènent vers l’Asie. Je travaille beaucoup sur les assaisonnements et je cherche toujours à apporter de l’acidité à mes plats.
Votre personnel travaille sur 4 jours. Comment vous organisez-vous ?
J'ai décidé de passer tout le monde à une semaine de travail de 4 jours. Nous sommes fermés le dimanche et le lundi, et chaque membre du personnel bénéficie d'un jour de repos supplémentaire dans la semaine. Le jour de repos supplémentaire change chaque semaine, de sorte qu'à chaque cycle de 5 semaines, chacun a 4 jours de congés consécutifs. Ainsi, lorsque le jour de repos tombe un samedi, cela s'ajoute aux fermetures du dimanche et du lundi, et le repos de la semaine suivante est fixé au mardi. Pour mettre en œuvre cette organisation, j'ai dû embaucher deux personnes supplémentaires, une en cuisine et une en salle. Nous sommes ainsi passés de 12 à 14 employés, ce qui représente évidemment un coût en termes de masse salariale.
Un aliment coup de cœur ?
La pâte de yuzu kosho. C’est pour moi la quintessence du condiment. Elle peut accompagner une viande ou un poisson et se marie parfaitement avec n’importe quelle sauce. Le yuzu kosho est un condiment japonais, une pâte qui mélange l’écorce de yuzu râpé et le piment, pilés avec du sel et mis à fermenter. Il peut être vert, avec un goût parfumé, ou rouge, avec plus de piment.
Ce que vous aimez le plus dans votre travail ?
J’adore résoudre les problèmes. Chaque jour, il y a un défi à relever, que ce soit avec un fournisseur, la qualité d’un produit, la gestion des stocks ou le personnel. Maintenant, je touche même à la maçonnerie et à la plomberie. C’est énergivore mais aussi très stimulant. Et bien sûr, j’adore être en cuisine.
Des ambitions futures ?
Je ne suis pas du tout lassé d’être ici, je m’y plais bien. Mais à terme, j’aimerais quitter Paris et ouvrir une adresse ailleurs en France. Où ? Je ne sais pas encore.
Un conseil à donner à quelqu’un qui se lance ?
S’associer avec quelqu’un qui a de l’expérience, mais pas trop longtemps. Cela offre une certaine sécurité. Et surtout, il faut se lancer. Beaucoup ont réussi, pourquoi pas vous ?
Publié par Romy CARRERE