Louise Bourrat ne cache rien. Associé à son frère, elle est le chef du restaurant Boubou’s à Lisbonne. Les motivations de sa première candidature à Top Chef répondait au désastre financier créé par la crise du covid : « Le premier confinement a été une catastrophe. On ne savait pas quand on allait rouvrir. Mes parents avaient mis toutes leurs économies dans l’affaire et eux aussi risquaient de tout perdre. Au Portugal, nous n’avons eu aucune aide. J’ai envoyé ma candidature en pensant que cela pourrait peut-être nous aider ». Sa candidature n’est pas retenue. L’année suivante, c’est la production qui demande à Louise Bourrat de participer à la nouvelle saison. Entre temps, le restaurant avait rouvert ses portes et retrouvé ses habitués. Allait-elle quitter la capitale portugaise pour quelques semaines ou quelques mois pour Top Chef ? « Je suis sensible aux signes. A ce moment-là, j’ai eu comme clients un 3 étoiles allemand, un vainqueur de Masterchef et Michel Sarran qui m’a encouragée à vivre cette aventure humaine. Je cherchais aussi de l’apprentissage. Apprendre au contact des autres candidats et des membres du jury. J’avais envie de revenir en France après 10 ans d’expatriation et de recréer des connexions. C’est exactement ce qui s’est passé ». Plus de 2 millions de téléspectateurs ont regardé la finale diffusée le 15 juin dernier. La jeune femme n’en revient toujours pas d’avoir gagné : « Chaque semaine, je m’étonnais d’être encore là. Honnêtement, je n’ai jamais pensé aller aussi loin. Ce qui m’a surpris aussi, c’est l’image que le montage de l’émission a donnée de moi. Détermination, ambition, force, je ne nie pas que cela fasse partie de ma personnalité, mais j’avais aussi exprimé ma vulnérabilité et l’indulgence qui est très importante pour moi ».
Louise Bourrat n’hésite pas à raconter ses hauts et ses bas. Elle se souvient de son dernier stage, lors de sa 1ère année de BTS Hôtellerie-Restauration à Lesdiguières. Elle avait été envoyée dans un restaurant étoilé à l’étranger dont elle est sortie « un peu en dépression » avec l’idée d’abandonner le métier. « Manque de respect, violences physiques et psychologiques... J’ai appris ce qu’il ne fallait pas faire, devenir ou accepter ». C’est son frère, en poste à Londres, qui lui conseille de persévérer et elle arrive au Bar Boulud du Mandarin Oriental. « J'y ai vécu le management à l’anglo-saxonne, avec le respect des salariés, toutes les heures payées, où tu grimpes les échelons et où tu es formée pour chaque poste. J’y suis restée trois ans et c’est là que j’ai le plus appris en cuisine et aussi en management ».
"Est-ce que notre façon de travailler est intelligente ?"
En 2018, elle passe de Londres à Lisbonne pour aider son frère Alexis qui vient d’inaugurer son restaurant le Boubou’s. Jusqu’au premier confinement, ils ne comptent pas leurs heures, ouverts midi et soir, 6 jours sur 7. L’arrêt brutal et la précarité de leur situation est une épreuve. Le temps du confinement est mis à profit pour s’interroger sur le métier, sur leur vie, sur leurs envies. «Nous n'avions pas eu ce temps auparavant. On travaillait. La première question est essentielle : Est-ce que notre façon de travailler est intelligente ? Est-ce que la coupure est obligatoire ? etc. Et nous avons décidé de changer de modèle ». Ils montent en gamme (ticket moyen : 90 euros), embauchent, n’ouvrent plus que 5 soirs par semaine (fermeture dimanche et lundi) mais avec deux services pour 40 places assises. « Cela fait bientôt deux ans que nous avons mis en place ce nouveau modèle. Nous sommes en train d’atteindre nos objectifs. Travailler 5 jours le soir sans coupure. Tout le monde y gagne en équilibre de vie ». Et l'effet Top Chef ? « On vu la clientèle francophone monter en flèche, soit 95% de notre clientèle dès le début de la diffusion sur M6. C’est un souci en moins de ne pas se demander si on va être rempli ou pas. J’aimerais quand même avoir une clientèle plus cosmopolite et plus locale comme avant ».
Les projets ? La gagnante de Top Chef est heureuse au Boubou’s où elle réalise sa cuisine. A 28 ans, elle a aussi envie de créer un restaurant avec quelques chambres selon ses choix "dans les deux années qui viennent". Louise s’imagine dans la campagne portugaise, avec un potager en permaculture, un verger, des abeilles... Un restaurant qu’elle verrait bien avec une Etoile Verte Michelin à l’image de cette gastronomie durable en accord avec la protection de la planète et du bien-être de ses salariés.
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Publié par Nadine LEMOINE