"Dans ce contexte politique inédit, sans majorité parlementaire, nous avons identifié un sujet essentiel, touchant tous les Français, susceptible d’être traité efficacement par une approche transpartisane : la souveraineté alimentaire. Ce sujet, nos structures le connaissent bien, en tant que principales organisations représentatives de la filière Restauration Hors Domicile (RHD) qui lie tous les maillons d’une même chaîne de valeur, de la production à la restauration, en passant par la distribution aux professionnels.
De quoi s’agit-il ? De promouvoir nos productions et nos savoir-faire, d’encourager les comportements vertueux des consommateurs, de préserver la capacité d’innovation des entreprises françaises, de valoriser la formation à nos métiers, de défendre une concurrence loyale sur les marchés internationaux, d’améliorer la traçabilité et l’étiquetage des produits, de permettre la bonne rémunération de tous les acteurs.
7 ans après les États généraux de l’alimentation, il y a urgence.
- Urgence territoriale : 10 000 exploitations et 5 000 restaurants ou cafés ferment chaque année.
- Urgence économique car ces fermetures entraînent destructions d’emplois et perte de recettes pour les finances publiques. - Urgence sanitaire face aux conséquences de la malnutrition (obésité, diabète, cancers).
- Urgence sociale car c’est souvent dans le choix des produits alimentaires ou des types de restauration que les consommateurs au pouvoir d’achat contraint font des économies.
- Urgence environnementale car la transition écologique passe par des modes de production, de distribution et de consommation alimentaire plus responsables.
- Urgence culturelle car la diversité de nos produits alimentaires, la richesse de nos traditions culinaires et la renommée de notre art de la table doivent demeurer des fleurons de notre rayonnement. Bien plus, si le repas gastronomique français est inscrit au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité, le repas français est créateur de lien social au quotidien au sein des familles, entre amis ou collègues, et la restauration hors domicile contribue à la vitalité de nos quartiers et de nos territoires.
Nous en appelons à une démarche ambitieuse qui soit l’affaire de tous, autour de deux axes. D’abord, créer les conditions de la souveraineté alimentaire. Toute la filière doit s’engager clairement pour la promotion des produits d’origine française de qualité. Nous n’avons pas à rougir de ce que nous avons déjà accompli, dans un contexte économique difficile, en mobilisant tous les professionnels de la chaîne. L’agriculture française est aujourd’hui reconnue comme l’une des plus durables au monde. Concernant la restauration hors domicile, après avoir créé une Filière Région destinée à favoriser les produits locaux et les circuits courts, METRO France a initié en 2020 la Charte Origine France, signée par 12 acteurs majeurs de la filière dont la FNSEA et l’UMIH, qui a permis de faire progresser la part d’achat de produits français et locaux. D’autres initiatives ont vu le jour pour défendre cette approche du métier, comme les labels maitre restaurateur, artisan cuisinier, fait maison ou Bleu-Blanc-Cœur. Nous devons aller plus loin encore.
Il faut ensuite faire vivre la souveraineté alimentaire au quotidien. Les Français doivent retrouver le plaisir de manger, de cuisiner et d’aller au restaurant. Comment les y encourager ? D’abord par une éducation au bien manger, qui contribue à l'évolution durable des comportements alimentaires. Nous pourrions réfléchir à une approche transdisciplinaire, des ateliers qui mêleraient biologie, histoire et géographie, mathématiques, responsabilité environnementale, langue française… Economie aussi : ce serait l’occasion pour les élèves d’appréhender la notion de valeur des produits audelà du prix, de découvrir des métiers qu’ils ignorent pour beaucoup, de prendre conscience des passerelles entre des mondes qu’ils imaginent très cloisonnés : la ferme, l’usine, le magasin, le restaurant. Quelle perspective formidable que de permettre aux jeunes générations de s’approprier pleinement le concept de « souveraineté alimentaire » en ayant compris ses implications, en l’appréhendant comme une chance de mieux vivre et non comme une contrainte !
Nous sommes à la disposition des parlementaires pour élaborer les solutions. Il ne s’agit pas de créer de nouvelles et contreproductives contraintes normatives et fiscales dans un modèle parmi les plus régulés du monde. Mais de légiférer en responsabilité, pour que notre alimentation soit, pour longtemps encore, un pilier de notre art de vivre à la française, synonyme tout à la fois de plaisir, de santé et de fierté."