Si la cuisine hexagonale n’a jamais cessé de plaire outre-Manche, elle connaît actuellement un net regain d’intérêt à Londres, dans ses versions brasserie et bistrot. Pour preuve, 2024 a vu fleurir nombre d’adresses dans cette veine, parmi lesquelles Café François, Henri, Joséphine Bistro, et Camille à Borough Market. Les années précédentes n’étaient pas en reste, avec les ouvertures de Bouchon Racine, Les Deux Garçons, Bistro Freddie, etc. Mais à quoi est dû ce regain frenchie ? Pour Jackson Boxer, le chef britannique qui signe la carte du Henri, ce retour de “l’intérêt pour le bistro français classique” aurait à voir avec une forme de “nostalgie, et une soif de réconfort” qu’apporte la cuisine française traditionnelle, perçue comme “rassurante” et “familiale”.
Si les Londoniens y sont soudain si sensibles, Jackson Boxer voit aussi dans l'engouement pour la cuisine française un lien avec la morosité économique que traverse actuellement le Royaume-Uni. “peut-être que dans cette période où beaucoup de Londoniens peinent à assurer leur loyer et à faire face aux dépenses du quotidien, le côté généreux d’une table de bistrot offre un réconfort bienvenu”, analyse-t-il. “Moi-même, j’apprécie particulièrement la dimension accessible” du bistrot, qui “ne renie pas des morceaux moins nobles, comme l’onglet, la bavette ou la saucisse”. Ce succès est aussi une conséquence indirecte du Brexit, suppose le chef : “Londres redécouvre son amour pour l’Europe, autrefois si proche et fraternelle, mais qui semble maintenant plus distante post-Brexit”, conclut-t-il.
“Une vision romantique de la France”
Pour sa part, Elliot Hashtroudi, le chef du Camille, estime qu’“en tant que Britanniques, nous avons cette vision romantique de la France. C’est l’un des rares pays qui ne déçoit pas ces attente”. Il lie aussi le boum des bistrots français au Covid. “Je pense que les Britanniques ont regretté de ne plus pouvoir faire un saut au pays voisin.” Et Londres, elle, “s’est mise en quête de davantage d’authenticité et de relax, ce qui explique que les bistrots aient gagné en popularité”. Le chef-restaurateur François O’Neill estime qu’au fond, “la cuisine de bistrot a toujours marché. Historiquement, c’est un menu qui est compris internationalement, avec ses plats tels que le steak-frites, le poulet-frites et la soupe à l’oignon”, explique celui qui a ouvert Café François en septembre 2024. Sa brasserie veille à des prix plus abordables que ceux pratiqués dans son autre restaurant français, Maison François, ouvert en 2020. De fait, “c’était très important pour nous que le steak-frites soit fixé à un prix abordable” au Café François, confie le restaurateur. De même, les moules marinières et la quiche y sont en-dessous de la barre symbolique des 20 £ (environ 24 €).
Mais qui sont derrière ces établissements francophiles à succès ?
Derrière ces établissements, on retrouve principalement des Britanniques, comme au Camille, mais il y a aussi des Français impliqués. De fait, le groupe derrière le Henri est français, puisqu’il s’agit de l’Experimental Group. Le Joséphine Bistro est tenu par l’étoilé Claude Bosi. Au Café François, François O’Neill est quant à lui franco-britannique, sa mère étant française. Enfin, le Bistro Freddie du Britannique Dominic Hamdy est aussi lié à la France, puisque le père du restaurateur est à moitié Alsacien.

Publié par Anastasia CHELINI
Il y a 2 heures