Sylvestre Wahid : "Je vise toujours l'excellence"

À la veille de ses 50 ans le chef vient de décrocher une deuxième étoile pour son restaurant situé à Courchevel, au sein de l’hôtel Les Grandes Alpes. C’est la quatrième fois qu’il se voit décerner une telle récompense.

Publié le 02 avril 2024 à 10:30

L’Hôtellerie Restauration : Quand est-ce que vous avez su que vous souhaitiez devenir cuisiner ?

Sylvestre Wahid : Je suis arrivée en France avec ma famille en 1984, à l’âge de 9 ans. Mon père était légionnaire, j’ai découvert la cuisine au mess des officiers et capitaines d’Anjou à Castelnaudary. Mes parents ne voulaient pas que nous restions sans rien faire pendant les vacances d’été, donc nous partions travailler dans les champs, au sein de l’armée, dans les bureaux du mess des officiers… Et vers 14 ou 15 ans, nous trainions dans les cuisines à Castelnaudary. C’est là que j’ai découvert la grande cuisine, les grands vins, les grands champagnes, cet esprit de famille, de rigueur et du travail bien fait.

Je suis rentré à l’école hôtelière de Nîmes et j’ai effectué un stage avec le pâtissier Lavillionière. Au bout de deux mois, j’ai dit que je ne voulais pas être pâtissier donc on m’a envoyé en stage avec Thierry Marx. Et il m’a pris en apprentissage. Aujourd’hui c’est mon mentor. C’est grâce à lui que j’ai débuté la cuisine. Je suis également très admiratif du chef Alain Ducasse, qui m’a fait progresser. Ce sont deux grandes personnes grâce à qui je suis là aujourd’hui. J’ai eu la chance de rencontrer d’autres personnes passionnantes et inspirantes comme Patrick Pagès, Alain Sanderens ou Jean-François Piège, dont j’ai été le second pendant cinq ans.

 

Cette nouvelle étoile, vous en êtes fier ?  

C’est la quatrième fois que j’ai deux étoiles. J’en suis très heureux mais j’espère qu’un jour je franchirai le dernier palier. On vise toujours l’excellence. J’aime beaucoup la Savoie et Courchevel en particulier, situé dans le plus grand domaine skiable au monde, les 3 Vallées. Le climat est magnifique, la clientèle est très belle. J’ai imaginé un restaurant très confidentiel, uniquement ouvert le soir, 6 jours sur 7, au sein d’un établissement qui propose 9 appartements privés. J’emploie 22 personnes pour la totalité de l’offre gastronomique des lieux. Ici, je suis chez moi ; les propriétaires ne s’occupent que de la partie hôtellerie et la cohabitation se passe très bien.

 

Comment voyez-vous votre cuisine ?

Nous sommes en perpétuelle évolution. J’utilise le meilleur produit au meilleur moment. Je considère qu’il y a douze saisons. Puis il faut raconter son histoire. En ce qui me concerne, c’est un mélange entre la méditerranée, les Alpes, les Alpilles et gros clin d’œil à mes origines pakistanaises. J’ai une cuisine également axée sur le bien-être ; j’ai notamment commencé à enlever le sel de mes plats. Pendant des années, je me suis cherché, c’était très important pour ma famille qu’on soit intégrés, donc j’ai beaucoup appris sur la France, et j’en ai un peu oublié mes origines. Avec le temps j’ai évolué, j’ai appris à travailler avec les nouvelles technologies, à assumer mes origines et à faire ma propre cuisine. Avant d’assumer son histoire, il faut se connaître. Cela vient avec la maturité. Aujourd’hui, je propose une cuisine française avec un rappel de mes origines par une pointe d’épices, d’amertume… Je ne fais pas de la cuisine pakistanaise, je n’y connais rien !

Je propose un menu unique [à 495 €, NDLR], mais nous faisons presque du sur mesure pour nos clients. On s’adapte tout le temps. Avec ce menu, nous avons créé un accord mets-pain avec le chef pâtissier. Nous avons travaillé avec Victor Delpierre, spécialiste du café et du cocktail, pour apporter de la technique dans le service en salle et mettre ainsi en avant le travail de la salle, l’un des piliers du restaurant.

 

 

Un aliment coup de cœur ?

Le légume que je préfère par-dessus tout, c’est la tomate ancienne. Dès qu’elle est prête, on la retrouve au menu. J’adore aussi le radis noir et le radis japonais. Ce qui me plaît, c’est cette fraîcheur des légumes. Et également le sel rose de l’Himalaya.

 

Quel type de manager êtes-vous ?

J’essaie d’être juste et exemplaire. Et je veux que tout le monde le soit. Faire quelque chose bien, ça prend le même temps, voire moins, que de mal faire. Si on fait mal, c’est parce qu’on ne se sent pas concerné. C’est ça qui est grave. Il faut accompagner ses collaborateurs, et c’est ce que j’essaie de faire au maximum.

 

Quelles sont vos ambitions pour le futur ?

On va se concentrer sur le restaurant à Courchevel et le montage de mon projet à Paris.

 

Un rêve à réaliser ?

Qu’on me donne plus de temps ! Il n’y a rien de plus important que le temps. Ça passe trop vite !


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Publié par Romy CARRERE



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