“Un sommelier d’eau ? C’est un pléonasme. Notre métier ne consiste pas à parler uniquement de vins mais de toutes les boissons. L’intérêt croissant pour l’eau est bien réel et s’inscrit dans une baisse de la consommation des boissons alcoolisées au restaurant. D’ici à employer un sommelier uniquement pour conseiller le choix d’une eau, pourquoi pas. Regardez la place des menus vegan dans la restauration, il y a dix ans, on n’y aurait pas cru”, tente avec prudence Dominique Laporte, meilleur sommelier de France 2004, qui a été, deux ans plus tard, à l’origine de l’“eaunologie”, la science qui voudrait définir les accords entre les mets et les eaux. “Avant 1948, les eaux minérales étaient vendues en pharmacie ! L’eau riche en magnésium a une amertume, avec du calcium elle sera plus sucrée. Les accords mets et eaux sont une science et un enjeu dans un marché des boissons qui va fortement évoluer”, constate-t-il.
Pour Kim Severson du New York Times, la montée en puissance du Water Sommelier sera l’une des 9 tendances food de 2024. Une prédiction qui enchante et que relaie sur les réseaux sociaux Martin Riese. D’origine allemande, restaurateur à Los Angeles, le plus médiatique des sommeliers d’eau est suivi par 430 000 abonnés sur TikTok et propose plus de 40 références sur sa carte dont la Bling H20 à 100 € le litre. En France, c’est du côté Martillac (Gironde), dans le restaurant doublement étoilé La Grand’Vigne que le chef sommelier, Aurélien Farrouil, a fait de l’eau sa spécialité et propose une carte dédiée à ce breuvage avec une vingtaine de références.
Alors faut-il se former ?
“Embaucher un sommelier d’eau, pourquoi pas. Ce serait un beau coup de com. En France, je doute. Un unique bar à eaux à Paris, le Colette Water Bar, a baissé le rideau. Aux États-Unis, ils sont capables de tout. Les eaux sont une part non négligeable des connaissances d’un sommelier et la tendance à offrir des cartes spécifiques est bien réelle”, analyse Philippe Faure-Brac, président d’honneur de l’Union de la sommellerie française. À ce jour, cinq écoles dans le monde, aux États-Unis, en Corée du sud, en Italie, en Chine et en Allemagne, dispensent des formations diplômantes de sommelier d’eau. La Doemens Academy de Munich, fondée en 1885, attire autant de sourciers que de brasseurs mais aussi des professionnels de la restauration. La cession de formation des sommeliers d’eau de mars prochain, à 2 900 € diplôme inclus, est complète.
Publié par Francois PONT