Pour une formation en plus. Une spécialisation. Affiner un savoir. Ajouter un diplôme à un C.V. qui était un peu maigre... Nombre d'étudiants aux parcours variés, tous inscrits à un moment de leur cursus dans une licence professionnelle en témoignent : "Je me suis inscrite en licence pro, parce que je voulais me perfectionner. Mais l'année prochaine, je ne sais pas quoi faire" ; "La licence pro, je l'ai choisie car je souhaite ouvrir un restaurant et je pense que ce diplôme sera une caution supplémentaire, un argument de plus, pour que le banquier croit à mon projet" ; "Je suis en licence parce que je me sens encore trop jeune pour la vie active" ; "J'ai choisi cette licence pour l'alternance qui l'accompagne : j'aime cette double approche à la fois théorique et pratique de l'hôtellerie-restauration…"
Les raisons sont multiples. Reste l'après licence. Que faire une fois l'année universitaire bouclée ? Poursuivre vers un master ou chercher son premier CDI ? Préférer la sécurité de la fac ou créer sa propre entreprise ? Les jeunes sont souvent hésitants, voire perdus. Certains questionnent professeurs et professionnels, quand d'autres se rendent aux journées portes ouvertes d'écoles et dans les salons pour étudiants. "Au début de l'année, je suis allée au Salon de l'apprentissage et de l'alternance de Paris, Porte de Versailles. Puis, j'ai enchaîné avec Studyrama, Porte de Champerret." Stéphanie Vallet a 22 ans. Un BTS hôtellerie-restauration en poche, elle est actuellement en licence professionnelle encadrement et exploitation en hôtellerie et restauration de luxe (EEHRL) au lycée Albert de Mun, à Paris.
"Les clés du marché du travail"
Ce qu'elle fera ensuite ? "Je ne sais pas. Je me pose beaucoup de questions, comme la plupart des étudiants de ma promo. J'ai envie d'un poste à responsabilités et j'ai l'impression que si j'arrête mes études après la licence, je devrais me contenter d'un poste purement opérationnel." En règle générale, il est vrai que le niveau bac +3 permet d'accéder "à des postes en relation directe avec la clientèle, qui nécessitent des compétences d'exécution", explique Olivier Etcheverria. Responsable de la licence professionnelle métiers des arts culinaires et des arts de la table (MACAT) à l'université d'Angers (49), il ajoute que ce cursus universitaire "donne les clés pour entrer sur le marché du travail". La preuve : six mois après l'obtention de leur diplôme, 100 % des étudiants de cette licence trouvent un emploi.
Le chef Victor Guillamet fait partie de ceux-là. Derrière les fourneaux du Boudoir, à Nantes (44), il reconnaît que l'université angevine, où il était inscrit en licence pro métiers des arts culinaires et des arts de la table, lui a "ouvert l'esprit". "D'emblée, je voulais être cuisinier, confie-t-il. Mais j'ai souhaité aller au-delà de la technique et cette licence me l'a permis. Elle m'a aidé à prendre du recul. Aujourd'hui, je sais non seulement cuisiner, mais aussi gérer des comptes, des ratios, une équipe." En revanche, poursuivre vers un master, il ne l'a jamais envisagé. "La licence propose une longue période de stage, ce qui est moins vrai en master. Or, à court terme, la pratique m'aurait manqué." Le projet professionnel de l'étudiant influe donc beaucoup sur sa poursuite ou non d'un cursus universitaire.
Débouchés à l'international
"S'arrêter en licence professionnelle permet d'entrer immédiatement dans la vie active, sans différer de deux ans son insertion professionnelle", commente Nathalie Montargot. Directrice de la licence professionnelle direction des services d'hébergement en hôtellerie internationale à l'université de Cergy-Pontoise (95), elle constate qu'à l'issue de leur licence pro, "de nombreux étudiants s'insèrent dans la vie active, choisissent de rester dans l'entreprise qui les a pris en apprentissage ou partent à l'étranger, notamment en Grande-Bretagne, au Japon, en Nouvelle-Zélande". "Quand les étudiants hésitent à démarrer leur carrière, après une licence pro, je leur recommande d'opter pour un master ou un MBA parmi les plus cotés, en vue de se tourner ensuite vers l'international. Sinon, mieux vaut qu'ils commencent à travailler, qu'ils se lancent."
Pour Jean-Luc Frusetta, responsable opérationnel de la licence EEHRL à Albert de Mun, poursuivre ses études c'est avant tout en vue de décrocher un diplôme capable de doper réellement un CV. Pas pour reculer l'échéance de l'entrée sur le marché du travail. "Je suis en train de postuler pour différents masters, des prestigieux et d'autres un peu moins. Les réponses que je vais obtenir vont sans doute, elles aussi, guider mon choix pour l'an prochain", explique Stéphanie Vallet. L'étudiante reconnaît que face à la multitude de masters proposés dans les écoles et les universités, elle apprécie les conseils de ses professeurs. "Certains sont même prêts à rédiger des lettres de recommandations." Un geste bienveillant. Un coup de pouce en plus.
Bac + 5 : compétences d'encadrement et décisionnelles
"Si l'on s'engage vers un bac +5, c'est que l'on vise à terme des postes fonctionnels et stratégiques. Des postes qui demandent des compétences d'encadrement, des compétences décisionnelles", explique Olivier Etcheverria. Avis partagé par Nathalie Montargot : "Poursuivre, par exemple, avec notre master management des services, c'est vouloir renforcer des compétences académiques tournées vers le management dans un environnement international. C'est aussi avoir une vision systémique de l'entreprise, non plus tournée sur des fonctions opérationnelles, mais plus stratégiques." Des fonctions et des postes de back-office bien souvent.
Mais que l'on ne se méprenne pas : qui dit master ne dit pas forcément rupture avec le terrain. Certaines écoles et universités veillent au grain. C'est le cas, notamment, à Cergy-Pontoise : "Les deux années de master professionnel management des services, spécialité hôtellerie internationale sont en apprentissage avec le CFA Sacef. Si bien que les étudiants bénéficient d'une expérience supplémentaire de deux ans, pendant lesquels ils vont pouvoir mettre en pratique les éléments collectés durant leur formation universitaire", souligne Nathalie Montargot. En outre, le mémoire de ce master pro permet, lui aussi, de lier "recherches académiques et travaux de terrain".
Publié par Anne EVEILLARD