Entre le restaurant de Val Thorens et celui de Talloires, il y a un monde. La table étoilée la plus haute d'Europe (2300 m d'altitude) voit majoritairement ses clients arriver à skis. Ouvert de fin novembre à fin avril, puis juillet-août, ce sont deux ouvertures et deux fermetures par an avec tout ce que cela comporte en gestion du personnel et de logistique. C'est en 2002, que le couple a misé sur Val Thorens. De chef salarié, il est passé à gérant puis chef-propriétaire, gagnant au passage une première étoile en 2006 et la deuxième en 2010. Près de 15 ans au sommet de la montagne avec ses bonheurs et ses contraintes (routes bloquées par la neige, les emballages qui explosent en raison de la pression ou les temps de cuisson à maîtriser car à cette altitude l'eau bout aux alentours de 90 degrés et non à 100 degrés comme en plaine…). En mai prochain, Magali et Jean Sulpice auront les pieds dans l'eau du lac d'Annecy mais toujours la vue sur la montagne.
« Quand tu es chef d'entreprise, il faut se poser les bonnes questions pour faire venir et revenir les clients. Je me suis aussi interrogé sur mes envies. Comment je me vois dans les 30 prochaines années ? Ma certitude, c'était que je resterai dans mon terroir, ma Savoie. Puis j'ai appris que l'Auberge du Père Bise pourrait être cédée et sur place, j'ai eu le coup de foudre. Géographiquement idéalement située, maison superbe dans l'un des plus beaux endroits du monde, oui c'est le projet d'une vie pour Magali et moi », dit Jean Sulpice, soutenu par les banques et par ses collaborateurs dans cette entreprise.
L'Auberge du Père Bise va leur permettre de passer à une autre dimension. Outre le restaurant gastronomique, les 23 chambres classées 4 étoiles leur mettent le pied à l'étrier en matière d'hôtellerie. « Je veux faire vivre une expérience client globale. C'est un lieu de repos, de paix, qui attire aussi bien les sportifs (randonneurs, golfeurs…) que ceux qui sont en quête de quiétude. Cela nous ouvre à une clientèle plus vaste qu'auparavant. Ils pourront même arriver en bateau », confie Jean Sulpice. Afin de répondre aux besoins de cette clientèle, il envisage la création d'un bistrot. « J'ai commencé par lancer le plateau du skieur à Val Thorens, puis le menu du jour. En tant que chef, tu peux te faire plaisir avec un bistrot », estime le jeune entrepreneur qui affine son projet.
Fin novembre, Magali et Jean-Sulpice reprennent le chemin de Val Thorens pour une ultime saison en altitude. En parallèle, dans les mois qui viennent, l'hôtel et le restaurant de Talloires vont bénéficier d'importants travaux de rénovation et d'aménagement pour apporter encore plus de confort à cette belle demeure et y apporter leur touche. « Nous voulons pérenniser une maison qui fait partie de notre patrimoine et y faire briller à nouveau les étoiles avec ma cuisine tout en étant toujours fidèle au terroir savoyard d'une richesse incomparable », résume Jean Sulpice qui savoure déjà le fait d'avoir bientôt son jardin et ces poissons alpins à portée de main.
Publié par Nadine LEMOINE