L’Hôtellerie Restauration : Quelle vision avez-vous du métier de sommelier ?
Florent Martin : C’est l’envie de créer des moments spéciaux. Quand vous suggérez un vin, vous suggérez un voyage dans le vignoble. Les mots ont une succulence, une texture, c’est notre métier de mettre les mots sur les goûts, les sensations. Mais il ne faut pas que cela l’emporte sur l’ambiance ou le moment vécu.
Comment votre métier a-t-il évolué depuis vos débuts, il y a près de vingt ans ?
Dans la pâtisserie, la cuisine et le vin, les gens font de plus en plus attention à la qualité des produits qu’ils consomment. D’où cette mouvance vers le bio, le vin nature. Il faut aujourd’hui être responsable dans ses choix. Au niveau du personnel, les attentes ne sont plus les mêmes depuis le confinement. Cela se répercute dans la rédaction des emplois du temps, les horaires, la façon de transmettre le métier… Il faut vraiment faire de la salle un métier plaisir, un épanouissement, en y apportant un aspect initiative et création. Le rapport avec les chefs a aussi évolué : il y a de plus en plus de complicité entre les chefs et les sommeliers et de travail en équipe. Enfin, le format vidéo sur les réseaux sociaux est un moyen d’expression complémentaire, qui me permet de communiquer sur mes coups de cœurs, des visites de vignoble, nos métiers, et d’établir un lien supplémentaire avec la clientèle.
Qu’est-ce qu’un bon sommelier ?
Il faut avoir ses propres convictions, sa personnalité et les assumer. J’aime par exemple les profils de vins très dessinés, très juteux, pas trop boisés ni traités. J’aime les étiquettes artistiques. Ce sont des partis pris. On ne peut pas tous avoir la même carte des vins ! Mais un sommelier doit en même temps être à l’écoute des vins de son temps et être gestionnaire. Et il ne devra évidemment pas suggérer le même vin pour un dîner d’affaires, un dîner en famille ou en amoureux.
Quels sont vos conseils pour bien vendre du vin ?
Il faut avoir des convictions. Plus vous croyez dans un projet, plus vous allez en parler avec cœur, avec passion. Votre interlocuteur va le sentir et vous suivre. Mais il ne faut pas tricher ni forcer le client en essayant de vendre la bouteille la plus chère.
Vous êtes attaché au respect de la biodiversité et de la matière première. Comment cela se traduit-il dans votre carte des vins ?
Le premier filtre, c’est d’avoir de bons vins qui correspondent à ce que l’on cherche : éclat, finesse, caractère, expression. On va plus vers de l’artisanat haute couture. On ne choisit pas ces vins parce qu’ils sont nature, mais on se rend compte que c’est un moyen d’arriver à des vins plus digestes, plus vivants, plus éclatants. Finalement, je dirais que 70 % des vins de la carte sont bio, nature ou en biodynamie.
Citez-nous un accord mets et vins original...
On sert de moins en moins de spiritueux. C’est un problème, car c’est un vrai savoir-faire français. On s’est demandé comment les proposer de manière plus soft ou originale. On a donc servi un assemblage de cognac et de thé grand cru oolong avec des saveurs de noisette et de poivre, avec un dessert de chocolat de Madagascar associé à du caviar, créé par le chef David Bizet.
Et le soft-pairing ?
Ces dernières années, les clients commandent de moins en moins de vin à l’heure du déjeuner. On a donc fait un partenariat avec la maison Archipel pour créer des cuvées sur mesure de kombuchas, servies dans des fûts en cuivre, ou des assemblages de raisins et kombuchas servis dans des bouteilles de vin et des verres à pied. L’acidité du kombucha et le cérémonial des verres à vin se prêtent tout à fait à la gastronomie.
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Publié par Violaine BRISSART