Mimose et Georget Thierry ne sont pas des bleus. Formés en cuisine à l’île de la Réunion, ils font leurs débuts à Roanne : la Maison Pralus pour elle, la Maison Troisgros pour lui, où il finira chef de partie poisson. Georget rejoint ensuite pendant trois ans le Prieuré à Villeneuve-lez-Avignon, sous la houlette du MOF Serge Chenet. Dès 2003, le couple s’installe à son compte et lance plusieurs établissements successifs.
Lorsque K’fé Vanille ouvre ses portes en 2018, à Saint-Gervais près de Bagnols-sur-Cèze, l’adresse franco-réunionnaise tourne bien. Mais la crise sanitaire et l’inflation font dérailler l’établissement. Le restaurant ne bénéficie pas d’aides, en raison de retards Urssaf et TVA. Malgré l’ouverture d’un food-truck pendant cette période, les dettes s’accumulent et la fréquentation plonge. “J’ai perdu confiance en moi, perdu le goût pour la cuisine, je n’avais plus d’ambitions, alors que dans la restauration, il faut de l’amour, du goût, de l’énergie. C’est un combat de tous les jours”, raconte le chef. “Georget était dans ses papiers. Je me suis retrouvée à tenir le restaurant. On a embauché une serveuse et on lui a laissé la responsabilité de la salle”, renchérit sa compagne.
“Chacun à sa place”
Tentant le tout pour le tout, Mimose contacte la production de Cauchemar en Cuisine. “L’émission est violente. On n’est au courant de rien. Une vraie claque. Philippe Etchebest a tout de suite compris que le problème majeur, c’était que chacun devait être à sa place. Quand on a obligé Mimose à faire seule le service en cuisine, j’ai eu un gros déclic”, pointe Georget.
Depuis la diffusion de l’émission, fin juin 2023, “le restaurant ne désemplit pas. Des gens viennent de Belgique, de Marseille… On a 50 % de clients fidèles, des soutiens incroyables, ça nous touche beaucoup”, glisse Mimose.
En cuisine, les Thierry ont gardé la même ligne directrice, surfant toujours sur des plats créoles et des assiettes françaises avec une touche réunionnaise. En revanche, ils ont revu leur façon de travailler, grâce aux conseils d’un coach de chez Rivalis. “Le coach est offert pendant six mois après l’émission. Nous, on a continué avec lui. C’est comme si on avait repris nos études à 45 ans”, sourit Georget. Le matin, de bonne heure, Mimose confectionne les desserts et les plats créoles cuits au feu de bois, avant de céder la place en cuisine à Georget et de s’occuper de la salle. “On n’a plus de serveuse. On ne travaille que tous les deux pour trente à cinquante couverts par jour. On économise beaucoup sur les charges. Ça se ressent à la fin du mois”, observe Mimose.
Bien étudier les coefficients multiplicateurs
Le couple porte désormais la plus grande attention aux coefficients multiplicateurs. “On se concentre sur les prix d’achat des produits et sur les grammages. Avant, je pouvais mettre une tomate cerise par plaisir. Maintenant, on ne rajoute rien d’inutile, et on fait des fiches techniques. On a enlevé les formules menu du soir qui faisaient tomber les coefficients multiplicateurs, pour proposer des plats uniquement à la carte”, détaille Georget. Pour contrer l’augmentation des tarifs de l’électricité, les Thierry installent petit à petit des panneaux solaires.
Animer l’établissement
Enfin, l’établissement organise régulièrement des soirées spéciales, qu’il s’agisse d’afterworks ou de plats originaux mis à l’honneur (couscous, cuisses de grenouilles, canard à la vanille…).
Le couple a ainsi pu éponger une partie de ses dettes et commencer à se verser de petits salaires. “On remonte la pente. Les journées commencent à sept heures du matin, jusqu’à minuit, six jours sur sept. On n’a pas pris de vacances depuis un an, mais on y croit”, note le couple. Toujours soudé. Toujours combattif.
Publié par Violaine BRISSART