L’Hôtellerie Restauration : Le groupe Maurice Hurand existe depuis plus de cent ans. Pourquoi vouloir changer de nom ?
Emilie Arabyan, Marion Laroche et Romain Binet : Le groupe Maurice Hurand a 110 ans et nous en avons repris la direction il y a deux ans, mais nous y étions intégrés bien avant. Le changement de nom est important car nous souhaitons marquer notre ambition en matière de développement. Il est le point de départ d’une campagne de développement, à l’international et dans les grandes villes françaises. Le groupe est constitué de cinq hôtels, situés uniquement à Paris. Nous souhaitons doubler notre parc d’ici à dix ans, sous trois formes différentes : la création complète, mais aussi en partenariat, soit en apportant notre expertise en matière de développement, soit en matière de gestion.
Ce nouveau nom marque une nouvelle étape au point de vue des partenariats financiers. Nous sommes entrepreneurs avant d’être directeurs d’hôtel. Nous cherchons l’impulsion, à réinventer les codes tout en restant nous-mêmes, à savoir un groupe familial et durable. Nous souhaitons passer à une hôtellerie plus professionnelle.
Pourquoi avoir choisi ce nom ? Que représente-t-il pour vous ?
Nous avons travaillé sur nos valeurs, mais aussi sur les idées reçues, en interne et en externe. Notre métier, c’est de créer des histoires avec tous nos partenaires, nos collaborateurs, nos clients. Nous sommes au centre des histoires. Nous nous sommes demandé par exemple combien il y avait eu de demandes en mariage au sein de nos hôtels ? Certainement une centaine. Le nom Biografy résume cela : écrire des histoires de vie. Nous avons choisi une orthographe internationale pour nos clients, car nous avons plus de 70 % de clients étrangers, mais aussi pour nous permettre de nous développer à l’étranger.
Nous sommes la cinquième génération à la tête du groupe. Nous voulions un nom qui soit aussi un clin d’œil à notre histoire. Elle est une force pour nous, nous nous ancrons dans un savoir-faire hôtelier, mais nous ne voulons pas nous enfermer pour autant dans ce côté familial.
Comment se passe le travail en famille ?
Nous avons des rôles bien définis. Emilie gère la direction opérationnelle, elle est en contact direct avec les hôtels, elle gère la gestion des travaux, les problèmes de mise aux normes. Marion s’occupe de tout l’aspect administratif au siège, des ressources humaines, de la comptabilité. Et Romain est chargé du marketing et de la communication. Le travail en famille reste un défi quotidien. Nous avons chacun nos domaines de prédilection, mais nous sommes amenés à avoir parfois des discussions où nous ne sommes pas d’accord. Mais nous travaillons toujours main dans la main.
Comment voyez-vous votre métier d’hôtelier ?
Nous avons réorganisé l’entreprise pour avoir une numérisation globale de tous nos process et de tout l’aspect purement opérationnel. Cela nous permet d’être beaucoup plus performants au quotidien, d’avoir une meilleure communication entre les équipes et de garantir un meilleur accueil des clients. On ne veut pas que la technologie prenne le pas sur le contact humain. Nous souhaitons offrir une expérience authentique, avec des relations humaines.
Avez-vous développé un esprit de groupe, une ‘marque employeur’ pour vos salariés ?
Nous comptons 140 salariés dans le groupe, dont une quinzaine sur les fonctions support, au siège, pour aider les hôtels à se développer, comme le service comptabilité, les fonctions ressources humaines, la gestion des plannings… Pour autant, chaque hôtel est en charge de son management, de sa gestion. Seuls les outils sont centralisés pour gagner en effet d’échelle. Mais, bien sûr, nous travaillons sur le côté marque employeur, pour faire en sorte que tous les collaborateurs se connaissent. Nous favorisons la mobilité interne, pour que nous salariés aient des perspectives d’évolution au sein du groupe. Nous disposons d’outils de communication en interne, par hôtel, mais aussi pour des sujets plus transversaux, ce qui nous permet de mettre en commun les réflexions de tous. Nous testons par exemple des outils dans un hôtel, avant de les déployer sur les autres établissements.
Quelle est votre politique managériale ?
Nous nous sommes organisés autour d’un management collaboratif. Nous sommes à l’écoute de chacun mais nous sommes aussi très exigeants. Nous demandons à nos collaborateurs d’être force de proposition, d’être entreprenants. Nous voulons qu’ils se sentent bien, qu’ils soient heureux et fiers de leur environnement de travail et qu’ils soient capables de le transmettre aux clients. C’est essentiel si l’on veut que nos clients se sentent bien dans nos hôtels, qu’ils perçoivent et ressentent nos valeurs.
De manière générale, quelle est la politique adoptée pour vos hôtels ? Quel est l’esprit du groupe ?
Il est très important pour nous de nous intégrer dans un quartier. Nous apprécions les petits acteurs locaux, nous essayons de faire un mix des communautés. Nous invitons les gens du quartier à venir dans nos restaurants, à nos cours de yoga ou de Pilates, par exemple. Nous avons également des engagements sociaux et environnementaux forts, ancrés. Au Terrass’hôtel, nous recyclons l’intégralité de nos déchets organiques en compost, les déchets plastiques sont confiés à une association, tout comme les savons qui sont donnés à des personnes défavorisées. On essaie de valoriser l’intégralité de nos déchets. C’est un travail de longue haleine, un travail de formation aussi car il faut expliquer au personnel les raisons de nos choix. Mais c’est aussi un travail d’explication auprès de nos clients, pour leur détailler notre démarche, leur dire que le but n’est pas de faire des économies, qu’elle ne nous empêche pas de conserver la qualité.
Quand un client souhaite réserver une chambre, on lui propose, depuis 2011, de faire un don de 1 €, que nous abondons d’autant, en faveur de l’association La Voix de l’enfant. Nous ouvrons aussi des ateliers destinés aux plus jeunes, pour leur montrer les coulisses d’un hôtel. Cela permet également d’impliquer nos collaborateurs, de leur faire comprendre pourquoi ils demandent 1 € à chaque réservation. Nous nous considérons au centre d’un écosystème global, et nous estimons que c’est notre rôle de faire tout cela.
Si vous aviez un conseil à donner ?
Levez la tête ! Il faut toujours se remettre en question, on peut louper le coche très vite. On a vu les OTA se développer, puis Airbnb. S’il y a des nouveaux entrants, c’est qu’ils ont des raisons d’être là. Il faut le comprendre. Chacun trouve sa place mais il faut prendre du recul, être en veille permanente, prendre du temps pour réfléchir, pour choisir une direction. Airbnb a donne un coup de pied dans le secteur. On s’est concentré sur ce que l’on est, sur le contact client, l’expérience… L’hôtellerie doit se focaliser là-dessus.
#Biografy# Maurice Hurand
Publié par Romy CARRERE