Viande : les bouchers repensent leur offre pour les restaurateurs

Paris (75) À l'heure de la traçabilité, du principe de précaution poussé à son maximum et d'une vague vegan qui s'invite sur de plus en plus de tables, les spécialistes misent sur la qualité alliée à l'originalité. Nouvelles filières, morceaux méconnus et viande maturée sont au menu.

Publié le 28 août 2017 à 18:46

Aujourd'hui, en France, pour s'approvisionner en cochon, agneau, veau et volaille de qualité, c'est juste une histoire de prix et de carnet d'adresses." Yves-Marie Le Bourdonnec ne s'inquiète pas sur ce point. En revanche, les choses se gâtent dès que l'on parle du boeuf. Là, rien ne va plus, selon l'artisan boucher parisien. "La viande de boeuf idéale doit être pauvre en collagène et avoir de bons équilibres de gras, explique-t-il. Pour ça, les animaux doivent être jeunes." 

Autrement dit : arriver à l'âge adulte très tôt. Ce qui n'est pas le cas de la Charolaise, adulte à 50 mois, comparée à la Hereford anglaise, qui l'est dès ses 18 mois. D'où la solution de croisement de races - entre une Salers et un taureau britannique, par exemple -, prônée par Yves-Marie Le Bourdonnec, qui a développé sa propre filière en suivant ce parti pris. Mais avec un millier d'animaux, difficile d'approvisionner des restaurants juste en joues de boeuf ou en onglets. "Ou alors c'est avec de l'Aubrac, par exemple, mais c'est cher." 

Aussi incite-t-il chefs et cuisiniers à appréhender la carcasse "dans son entier". C'est d'ailleurs ce qu'il a proposé à Christopher Hache, le chef de l'hôtel de Crillon, où le boucher vient d'être sollicité pour mettre en place "un approvisionnement éthique". "Les filets, côtes de boeuf, faux-filets, rumsteaks, bavettes, onglets sont certes les plus demandés, mais ils ne représentent que 18 % de la carcasse d'une bête, rappelle-t-il. Or, dans la totalité de l'animal, on trouve toutes sortes de morceaux de qualité pour satisfaire aussi bien les besoins d'un restaurant gastronomique que ceux d'une brasserie, d'un room service ou des banquets."

 

"La viande maturée est à la mode"


Même invitation à la découverte de morceaux méconnus dans les Boucheries nivernaises, qui fournissent notamment les cuisines de l'Élysée depuis un demi-siècle. "L'onglet de veau, c'est meilleur que l'escalope. Et l'épigramme d'agneau à griller, meilleur aussi que la côte d'agneau", confie Serge Jouan, directeur de la boutique du centre commercial Parly 2, dans les Yvelines. 

Boucher depuis quarante ans, il a l'habitude de fournir aussi bien le Trianon Palace à Versailles (Yvelines) que des brasseries parisiennes. "La viande maturée est à la mode en ce moment", poursuit-il. Car la viande, enveloppée dans un linge de coton, se bonifie avec le temps. Un temps variable de quinze à soixante-dix jours selon les viandes et les bouchers. Serge Jouan, lui, table sur "trois semaines à un mois". Le boucher de Parly 2 évoque aussi des "viandes de saison" : "L'été, on peut préparer, par exemple, des coquelets à griller. C'est ce que nous avons proposé au restaurant des Étangs de Corot, à Ville-d'Avray [Hauts-de-Seine, NDLR]." 

Car les restaurateurs comme les clients sont partants pour découvrir de nouvelles saveurs. Même si les grands classiques, telle que la côte de boeuf, ont toujours la cote à la carte, l'expérience gustative peut aussi faire la différence d'une table à une autre. En restant toutefois vigilant. "J'ai vu de la Holstein maturée vendue comme un produit d'exception, raconte Yves-Marie Le Bourdonnec. La côte de boeuf était facturée 120 € pièce dans un grand restaurant, alors que l'achat de la vache entière ne dépasse pas les… 500 € !"

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Publié par Anne EVEILLARD



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