L'Hôtellerie Restauration : Vous êtes arrivé en juillet 2022 en tant que chef des cuisines du restaurant Drouant. Qu’est-ce qui a motivé à rejoindre cette adresse historique ?
Romain Van Thienen : Je savais qu’il y avait une place à prendre au sein de l’établissement et, à l’époque, je travaillais avec Yannick Alléno [qui a lui-même travaillé chez Drouant, NDLR], ce qui m’a motivé. L’histoire de ce restaurant m’a séduit et j’ai été impressionné par la cuisine qui se situe sur trois étages. C’est énorme, j’aime gérer ça, ça évite de s’ennuyer. Et on s'est tout de suite entendu avec le directeur général. Même constat lorsque j’ai fait des dégustations au Taillevent [l’une des adresses du groupe] face aux propriétaires, les Gardinier. Ici, j’ai tout à gérer : les recettes, les fournisseurs - que j’ai d’ailleurs pu conserver et avec qui j’entretiens une vraie relation de conseil, d’amour.
Vous proposez une cuisine traditionnelle. Pourquoi ce parti pris ?
Je propose du traditionnel et du moderne. Au vu de l’histoire du restaurant, c’était important de rester sur cette offre. Je peux proposer un tartare de bœuf dans sa version traditionnelle, tout en offrant une alternative moderne avec une huile verte à base de cébette, complétée par du caviar ou de la truffe sur le dessus. Les deux sont montés en salle. Pour le reste de la carte, je propose par exemple, dans la partie plus moderne, le rouget, le poireau vinaigrette ou les ravioles, même si les intitulés peuvent faire penser à des plats classiques. Il y a également le ris de veau comme un cappuccino, avec une poudre de vanille dans le fond de l’assiette.
Qu’est-ce qui vous motive dans vos choix culinaires ?
Je tiens à ce que la clientèle mange du bon, du parisien, du traditionnel et du gourmand. La mode du poulpe grillé, ce n’est pas la cuisine qui me parle. Je préfère les plats à base de sauce.
Considérez-vous être influencé dans votre cuisine par un pays ou une culture en particulier ?
J’ai été impressionné par le Japon : leurs techniques, leurs couteaux… ils ont un couteau pour tout ! Mais j’aime travailler traditionnellement. Sur mon bureau, j’ai le livre d’Escoffier. Je ne le suis pas à la lettre mais c’est ma base. C’est après l’avoir lu que l’on comprend la cuisine.
Vous appréciez le gibier. Comment le travaille-t-on aujourd’hui ?
J’aime beaucoup travailler le gibier, oui. Avec les techniques modernes, on marque le gibier et après on le cuit sous vide : un colvert, une canne ou un faisan… Ou avec des techniques traditionnelles, ce que je préfère, on le fait cuire au sautoir. J’achète également des carcasses à faire rôtir pour avoir des consommés modernes, à servir avec un foie gras par exemple.
Drouant est également connu pour accueillir, chaque année depuis sa création, les équipes au complet au moment de la remise du prix littéraire le Goncourt. Cuisiner pour un tel événement, qu’est-ce que ça fait ?
C’était une grande première pour moi. On reçoit les patrons, les journalistes, il y a des caméras partout. Je le savais mais je ne m’attendais pas à autant. C’était une journée hors du commun.
Quel est le plat qui vous représente le plus ?
Le millefeuille de céleri, que je proposais chez Alléno. Je prenais un céleri de maraîcher entier que je coupais finement, j'insérais entre chaque tranche de lard de colonnata avec de la truffe, arrosé de jus de veau. Je ne l’ai pas encore fait ici car on a beaucoup de volume, mais je le tenterai.
Le plat du moment le plus vendu ?
Le poireau vinaigrette. Je propose un poireau cuit vapeur avec des herbes, que je le laisse égoutter deux jours, puis que je roule dans une feuille de nori avec une sauce à base d’huile de poireau, monté au jus de pois chiche. Et à côté on réalise une huile de poireau.
Un plat phare ?
Le jarret de veau.
Qu’est-ce que vous aimez le plus cuisiner ?
J’aime le beau produit que ce soit un poisson ou un légume par exemple.
La meilleure association de goût ?
Sauce céleri timut et rouget. Je l’ai fantasmé et je l’ai réalisé. Et je trouve que cela fonctionne très bien. Cette extraction de céleri avec le timut un peu flambé… tout va bien ensemble.
Une technique favorite ?
J’aime bien les anciennes techniques. En ce moment, on a un challenge en cuisine : celui qui fait le plus beau champignon tourné. On adore la compétition en cuisine.
Si vous n’aviez pas pu être cuisinier, que auriez-vous voulu faire ?
Paysagiste. J’aime beaucoup les fleurs, j’aime quand c’est carré et beau. Un rayon de tulipe dans un parc, c’est magnifique. Je profite de certaines assiettes, comme celle du foie gras, pour y déposer des fleurs.
Quelles sont vos ambitions ?
Cela fait huit mois que je suis chez Drouant, huit mois très intenses mais je me sens bien ici. On a un service banquet, on a un all day dining, le brunch le dimanche… C’est la thématique d’un palace. On ne s’ennuie pas, il y a toujours quelque chose à faire. Je travaille déjà sur la carte de l’été en ce moment.
Un accueil 7 jours sur 7, de nos jours, cela devient rare, notamment en raison du manque du personnel. Comment vous êtes-vous organisé ?
Pour le personnel, on a mis en place deux équipes, comme dans un palace : une matin, une soir. J’ai mis en place un économe qui réceptionne toutes les marchandises. On échange beaucoup et le moment du briefing avant chaque service est capital.
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Publié par Romy CARRERE