La pêche profonde ce ne sont que 300 gros bateaux industriels (dont 10 en France) qui, après l'épuisement des ressources marines dans les eaux de surface, se sont tournés vers les grands fonds pour trouver d'autres ressources. Ce qui est navrant c'est que cette pêche malgré un fort subventionnement, représente peu d'emplois et n'est pas rentable, compte-tenu des investissements nécessaires dans les bateaux et le matériel.
La vie en profondeur rime avec lenteur
Les pêches en eaux profondes se réalisent majoritairement avec des chaluts profonds, c'est-à-dire d'immenses filets de pêche lourdement lestés qui raclent le fond des océans jusqu'à 2000 mètres de profondeur et ne laissent rien dans leur sillage. Malheureusement les rythmes biologiques au fond des océans ne sont pas compatibles avec des prélèvements importants.
Les océanographes, situent les océans profonds dans la zone s'étendant au-delà de 200 mètres de profondeur. Ils représentent à eux seuls 98% de l'espace dans lequel la vie peut se développer sur terre. Le milieu profond est très mal connu de la science et quasiment inexploré. Ce qui est connu, c'est que la vie dans les profondeurs marines se développe en l'absence de lumière à un rythme extrêmement lent. Par exemple l'Empereur, dont la commercialisation est maintenant interdite, n'atteint sa maturité sexuelle qu'à 25/30 ans et vit jusqu'à 160 ans. Il faut des décennies avant de remplacer une capture massive et à condition que les juvéniles n'aient pas été capturés en même temps.
Vers une interdiction ?
En 2004, 1136 chercheurs ont signé une pétition demandant à l'Assemblée Générale des Nations Unies un moratoire sur le chalutage profond. Claire Nouvian de l'association BLOOM et la Deep Sea Conservation Coalition (regroupement de plus de 70 ONG internationales) viennent d'accueillir à Paris, politiciens, chercheurs, pêcheurs et ONG afin de plaider la cause des océans profonds. Car sous l'impulsion de Maria Damanaki (Commissaire européenne en charge de la pêche et des affaires maritimes), l'Europe doit bientôt décider si elle adopte la proposition de la Commission européenne d'interdire le chalutage profond.
En attendant, à l'instar de Relais et Châteaux, de Sodexo ou d'Elior… qui suppriment de leurs menus les espèces qu'ils savent menacées, sans attendre les interdictions. Pourquoi ne pas supprimer, dès maintenant, les trois espèces issues de la pêche profonde: la Lingue Bleue, le Sabre Noir, le Grenadier de la carte de nos restaurants ?
Publié par Jean-Luc Fessard, 'Transition Verte et Bleue' et auteur du Blog des Experts