La guerre entre les agences de voyage en ligne et les hôteliers est souvent évoquée : le poids des commissions, la dépendance des hôtels à ces mêmes OTA en termes de taux d'occupation… Les marques de luxe ne sont pas épargnées par le phénomène : la plupart d'entre elles distribuent également des chambres sur ces sites. Pourtant, elles ne se sentent pas menacées par la puissance d'OTA tels que Booking ou Expedia. La présence de nombreux dirigeants de l'hôtellerie de luxe au salon du tourisme de luxe ILTM, le 4 décembre 2012, a été l'occasion de revenir sur le poids des OTA face aux acteurs de l'hôtellerie de luxe. Pour Paul Kerr, PDG de Small Luxury Hotels of the World, "les hôtels devraient avoir une totale indépendance par rapport aux OTA". Pour convertir les clients en direct, le groupe insiste pour que ses hôtels respectent le BAR (meilleur prix garanti) sur leur propre site. Ainsi, "SLH rembourse la différence au client qui trouverait un prix moins élevé chez d'autres distributeurs, à la charge de l'hôtelier".
Lindsey Ueberroth, PDG de Preferred Hotel Group, insiste sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une lutte de pouvoir. "Les hôtels du groupe sont des hôtels indépendants, conseillés par nos 'revenue account manager' (optimisateurs de revenus), ils choisissent les OTA avec lesquelles ils travaillent en fonction des marchés qu'ils ciblent." Pour réagir face à l'importance croissante des OTA, PHG a tout de même rejoint dès son lancement le site RoomKey, OTA spécifiquement dédiée aux groupes d'hôtels : "Le budget du site est loin d'égaler celui d'Expedia, mais le concept est intéressant car c'est un bon moyen pour les marques de communiquer sur leurs offres." Duncan O'Rourke, directeur des opérations de Kempinski, a été radical sur la question en choisissant il y a six mois, de totalement refondre la structure du département marketing. Il a nommé un VP e-commerce et distribution qui s'en réfère directement à lui pour toute décision. Pour Duncan O'RourKe, il était essentiel de traiter cette question de manière ciblée. Le budget e-commerce et distribution est ainsi passé de 15 % à 35 % du budget global.
Distribution en ligne sur-mesure
Pour le groupe Oetker Collection, le constat est différent : la collection ne compte que sept hôtels, ce qui permet de définir une stratégie de distribution en ligne sur mesure. L'objectif de Frank Marrenbach, PDG d'Oetker Collection, est de reproduire "l'existence réelle des hôtels à travers l'existence virtuelle". Pour cela, les OTA qui distribuent les hôtels de la collection sont choisis avec soin, "elles doivent être proches de l'image de la marque Oetker". Alors que les hôtels géraient leur image individuellement il y a peu, aujourd'hui, l'image virtuelle est harmonisée, et la stratégie de distribution en ligne suit cette logique. Pour convertir les clients des OTA en clients directs, la relation client reste au coeur de la stratégie Oetker. Ainsi, "nous contactons tous les clients avant leur arrivée, même ceux qui passent par des OTA, pour finaliser leur séjour", assure Alain Brière, VP ventes & marketing de la marque.
Les marques d'hôtels de luxe ont choisi de valoriser leur distribution directe et surtout leurs produits pour que les OTA ne prennent pas le contrôle de l'industrie. Tous reconnaissent qu'il faut être omniprésent dans la sphère virtuelle aujourd'hui, car c'est le premier point de contact avec le client, et c'est sur cette sphère qu'il prend ses décisions et réserve de plus en plus. Parmi les clés qui leur permettent de convertir les clients OTA en clients directs, le BAR est devenu impératif tout comme l'optimisation des canaux de distribution directs. Enfin, la présence et surtout la réactivité sur les médias sociaux est totalement intégrée dans leur stratégie globale.
Publié par Vanessa GUERRIER-BUISINE