Dans la rade de Marseille, les navettes abreuvent de visiteurs l’île du Frioul et le château d’If. L’île Degaby reste, en revanche, beaucoup plus confidentielle. Ce caillou de 3 500 m², sur lequel Louis XIV fit édifier un fortin remanié au XIXe siècle, doit son nom à Liane Degaby, une artiste de music-hall de la Belle Époque qui se vit offrir l’île par son mari. L'îlot passa ensuite de mains en mains, avant de devenir un lieu dédié à l’événementiel, réservé à quelques happy few.
Cette année, le fortin s’ouvre enfin plus largement au public. Du 9 mai jusqu’en octobre, il héberge un restaurant bar éphémère imaginé par un quatuor : les gérants Sofia et Boris Lefèvre, ainsi que Sébastien Dugast et Romain Nocoli - fondateurs de Mensa Food & Events (création d’événements culinaires dans des endroits insolites : domaines viticoles, Ventrus…), et respectivement anciens chef exécutif et directeur adjoint chez Gérald Passedat.
Fonctionner en autonomie
Côté restaurant, l’île Degaby propose une carte courte aux accents méditerranéens, à base de produits locaux (ticket moyen de 70 €, boissons comprises), et côté bar, des “tapas et une carte des vins travaillés”.
Le lieu, ouvert cinq jours par semaine, peut accueillir plus de 150 personnes, mais ne dispose ni d’accès à l’eau, ni d’électricité, ni d’égouts. “Toutes les cuissons longues sont réalisées dans le laboratoire, à terre, puis repassées au barbecue au moment du service. Le reste des cuissons est fait à la flamme pour les poissons et les viandes, ce qui permet de baisser la consommation énergétique, explique Boris Lefèvre. Des panneaux solaires et un groupe électrogène d’appoint permettent de faire fonctionner un dessalinisateur pour l’eau courante. On récupère les eaux de pluie pour l’arrosage et les toilettes, et nous faisons du compost pour faire pousser des végétaux et des herbes aromatiques.”
Contraintes météo
L’île n’est accessible que par beau temps, après une traversée de 15 minutes en bateau bientôt alimenté en bioéthanol (pour un coût de 20 €, réglable à la réservation). “La météo, c’est la plus grosse contrainte, car les vagues et le vent peuvent empêcher l’accostage. Le chef produit le matin même pour éviter tout gaspillage. En cas d’annulation météo, les gens sont remboursés, et nos activités parallèles permettent de retravailler certains produits et de limiter la casse. On a anticipé ces aléas dans notre business model”, poursuit-il.
L’îlot Degaby se mérite. Contre vents et marées.
Publié par Violaine BRISSART