Depuis le bar, tous les convives ont été amenés à leur table dans la pénombre, chacun ayant posé sa main sur l'épaule de l'autre. L'Association Retina, oeuvrant pour la recherche sur la rétinite pigmentaire, (maladie de la vue), avait invité à la fois des personnes non-voyantes, mais également des voyants à qui l'on avait bandé les yeux pour un dîner dans le noir au Lycée Hôtelier de Marseille. Afin de réaliser l'événement, l'ensemble de l'équipe du lycée s'est mobilisée : la cuisine a travaillé les assiettes en associant des marqueurs forts que l'on pouvait reconnaître, comme le curry, le pain d'épices ou le poivron, mais il y avait aussi quelques pièges.
"Ambiance très conviviale"
Les cuisiniers sont même venus en salle afin d'assister à la dégustation, et pouvaient écouter les remarques de ceux qui tentaient de reconnaître les différents ingrédients composant les plats. Voyants et non-voyants se sont pris au jeu et à chaque table les paris allaient bon train. "Une seule personne a découvert qu'il y avait du topinambour, par contre d'autres ont pensé goûter des champignons alors qu'il n'y en avait pas !", raconte Jacqueline Metz, professeur de technique de service et d'accueil. "Tous ces échanges ont permis de créer une ambiance très conviviale à chaque table." Le dressage était lui aussi adapté, puisque l'élément principal était placé devant et les garnitures disposées autour dans le sens des aiguilles d'une montre, car c'est ainsi que les personnes non-voyantes ont l'habitude de déguster.
En salle, les serveurs ont organisé l'accompagnement des clients à leur place avec beaucoup d'attention, et ont poursuivi le service avec un rythme différent : "Ils ont pris leur temps, car ils se sont mis au diapason de leurs clients. Ils savaient bien que personne ne les voyait, pourtant ils ont gardé la même rigueur. Le plat principal était sous cloche, ils ont fait très attention à se synchroniser afin de tous déclocher en même temps. Les convives n'ont rien vu, mais ils ont senti le déplacement de l'air, les odeurs : il se passait quelque chose." Jacqueline Metz est très fière de ses élèves : "Ils sont allés au-delà de mes attentes. Plus que gentils, ils ont montré qu'ils devenaient de vrais professionnels de l'accueil."
Publié par Anne GARABEDIAN