Ses employés l'appellent affectueusement Papa. "À Lyon, ils ont Monsieur Paul, et bien nous, à Genève, on a papa Claude", expliquent-ils avec fierté. Pourtant, rien ne laissait présager que Claude Legras, originaire du Loiret, deviendrait une célébrité dans le monde de la gastronomie suisse. "Le parcours a été long et difficile, je n'ai jamais lâché. C'est ce qu'il faut dire aux jeunes générations." Simple commis à 14 ans, à l'hôtel La Gloire à Montargis, il se fait une place et enchaînera les maisons prestigieuses : Ledoyen, Le Laurent, Provost à Paris. Puis, après un passage chez un traiteur, il prend son premier poste de chef à La Marée. Gérard Rouillard, son patron, ne lui accorde aucun droit à l'erreur. Il faut dire que Claude Legras est son gendre. Il a trouvé l'âme soeur en Inès, devenue son épouse et mère de ses enfants. Après un passage à Cannes (06) au Palm Beach, le jeune couple rejoint Genève.
En 1982, Claude Legras n'a que 25 ans. Il prend pourtant les rênes du Lion D'or à Genève, une institution où il accrochera deux étoiles. Puis, amateur de défi, il devient MOF en 1991. Il rejoint enfin, Le Parc des Eaux Vives, qui n'a pas d'étoiles depuis 20 ans. Il en obtiendra une en un an. Claude Legras, s'est fait un nom. Il est temps pour lui de créer son propre établissement. Il ouvre en janvier 1997, le Floris, du nom de ses deux enfants, Floriane et Loris. "L'établissement avait une réputation épouvantable, il fallait reconstruire une image, mais les clients m'ont suivi."
"Cuisine méditerranéenne et franche"
Dix mois plus tard, Claude Legras obtient sa première étoile, 16 au Gault et Millau et il est nommé révélation de l'année suisse romande. Très vite, il songe à s'agrandir, mais l'établissement est la propriété de la ville. Les débats sont houleux sur l'architecture moderne proposée. Comme toujours en Suisse, tout finit par une votation. C'est une première mondiale puisque le vote est effectué par internet. En 2005, le nouveau Floris ouvre ses portes. Cinquante couverts gastronomiques et cinquante couverts en bistrot, la plus belle terrasse sur le lac Léman, et surtout un succès qui ne se dément pas depuis.
En 2012, il obtiendra une 2e étoile. Claude Legras est donc un chef heureux. "Je ne regrette pas mes choix. Les Suisses sont respectueux et fidèles. Ils ont l'esprit ouvert. Je leur sers une cuisine méditerranéenne et franche. J'aime prendre des risques en créant ma carte. Je vis une excitation gustative dans ma tête à chaque plat. J'ai quelques projets, du consulting, des bistrots, mais ce qui me plaît le plus, c'est de transmettre. Mon rêve est d'ouvrir une école professionnelle, je suis formateur dans l'âme. Ma vraie réussite, mon poumon, ce sont mes enfants, ma femme."
Publié par Fleur Tari