Nouveau rebondissement dans la saga judiciaire des pertes d’exploitation des restaurateurs contraints de fermer pendant la pandémie de Covid-19.
Près de trois ans après le début de la pandémie, la Cour de cassation vient conforter l’assureur dans son refus d’indemniser les pertes d’exploitation subies par les restaurateurs pendant les périodes de fermetures administratives.
La haute juridiction a estimé valide la clause d’exclusion prévue par le contrat d’assurance "multirisque professionnelle" sur laquelle s’appuyait Axa pour ne pas indemniser leurs pertes d’exploitation.
Les contrats couvraient le risque d’une perte d’exploitation consécutives à "une fermeture administrative ordonnée à la suite d’une maladie contagieuse, d’un meurtre, d’un suicide, d’une épidémie ou d’une intoxication". Mais une clause prévoyait que l’assuré soit privé du bénéfice de la garantie dans le cas où "un autre établissement fait l’objet d’une mesure de fermeture administrative pour une cause identique" à celles énumérées.
Pour la Cour de cassation, cette clause d’exclusion est bien "formelle et limitée" et n’a pas "pour effet de virer la garantie de sa substance". Argument plaidé par les restaurateurs pour demander l’annulation de cette clause. Raisonnement qui avait été suivi par certaines décisions de justice, en première et deuxième instance.
Axa s'est immédiatement félicité de cette "importante" décision de la Cour de cassation, "qui établit la validité de son contrat standard", a déclaré l'assureur dans un communiqué.
Il existe toutefois, 50 autres pourvois devant la Cour de cassation à l’heure actuelle, a indiqué un porte-parole d’Axa à l’AFP.
Le débat n’est pas clos
Dans ces arrêts, la Cour a cassé au total quatre décisions de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, dont trois datant du 20 mai 2021, favorables aux sociétés Alpilles Events dont le siège est à Mouriès, A La Bonne Franquette (Martigues), et Beraha (Marseille), dans des litiges les opposant à Axa. Elle a aussi censuré une décision du 25 février 2021, favorable à la société marseillaise Le Phoenix.
Mais la Cour de cassation a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel d'Aix "autrement composée", qui devra statuer à nouveau. "Il y aura un nouveau débat devant le juge de renvoi et celui-ci peut s'aligner ou ne pas s'aligner : il a une liberté d'appréciation", a déclaré à l’AFP, Didier Le Prado, qui défend les quatre restaurateurs. "La décision est évidemment favorable à Axa, mais le débat n'est pas clos, dès lors que c'est une décision avec renvoi", a-t-il précisé.
Un revers de jurisprudence inattendu
"Il s’agit d’un revers de jurisprudence inattendu, qui ne s’inscrit pas dans la droite ligne de la jurisprudence traditionnelle de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Chambre spécialisée en assurance) qui a régulièrement tendance ces dernières années à invalider les clauses d’exclusions des polices d’assurances lorsqu’elles manquent de clarté",déclare Maître Guillaume Aksil qui représente de son côté plus de 400 restaurateurs. Avocat qui rappelle qu’à ce jour, sept cours d’appel (Paris, Lyon, Bordeaux, Agen, Pau, Reims et Angers) ont validé cette clause d’exclusion, mais que cinq autres l’ont invalidée (Bourges, Aix-en-Provence, Rennes, Toulouse, Poitiers).
"Je ne suis malheureusement pas surpris de cette décision, je m’y attendais depuis quelques semaines et plus encore depuis que la cour d’appel de Paris avait rendu le 16 novembre dernier une décision favorable à Axa remettant en cause tous les jugements rendus depuis deux ans par le tribunal de commerce de Paris", déclare Maitre Phillipe Meilhac, qui a représenté de nombreux restaurateurs face à Axa. "En ce qui concerne mes clients et une majorité d’assurés, cette décision n’aura pas d’impact dans la mesure où ces derniers ont transigé avec Axa", précise l’avocat. En 2021, la compagnie d’assurance, avait convenu d’une solution financière à l’amiable avec les professionnels contestant l’exclusion de garantie opposée par Axa, à hauteur de 300 millions d’euros. Ce sont pas moins de trois-quarts des professionnels concernés qui auraient accepté le règlement.
Publié par Pascale CARBILLET
lundi 2 janvier 2023
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