Mais en 2015, le chef fait sa révolution "lacustre et végétale", se tournant vers une cuisine locavore, riche en goût, très différente de ce qu'il faisait précédemment. Le chef n'utilise plus qu'exclusivement des produits provenant d'un rayon de 50 kilomètres (du Léman au lac du Bourget), au prix d'une recherche et d'une remise en question totale. Le résultat est là : une signature culinaire très singulière, gourmande et raffinée. Les clients découvrent des saveurs, des sensations insoupçonnées. Pour accueillir la nouvelle philosophie culinaire du chef, Laurent et Martine Petit ont donc repensé leur établissement.
"La transparence doit être une réalité palpable"
"L'évolution de ma cuisine imposait une nouvelle conception du lieu. Nous avons travaillé avec le cabinet ICM Architectures, qui nous suit depuis 2002, mais la décoration est le fruit d'une collaboration, d'une réflexion commune." Cette année, une nouvelle cuisine a été créée, ouverte sur l'extérieur et sur la salle. Entièrement vitrée, baignée par la lumière du jour, elle impose un contact direct avec la clientèle. "La transparence doit être une réalité palpable. On ne peut pas se réfugier en cuisine." Laurent Petit s'impose cette nouvelle discipline. "Le passe qui ouvre la cuisine sur la salle est symbolique. Il est taillé dans un bloc de pierre bleue de Savoie, issu d'un rocher de 14 tonnes sculpté par un artisan tailleur."
La salle contemporaine est traitée en trois essences de bois - mélèze, épicéa et frêne de la région -, sculptées au feu selon une méthode ancestrale de conservation. Coupé à la perpendiculaire ou sur le fil, poncé, brossé ou non, le bois change de couleur du brun clair au niveau de la terrasse au noir vers la cuisine, rappelant un tableau de Pierre Soulages.
"La cuisine doit dire ce que l'on est"
Les projets de Laurent et Martine Petit ne s'arrêtent pas là. En janvier 2018 sortira leur quatrième livre, dans la collection Best of chez Alain Ducasse Édition. Le deuxième projet est "[s]on premier are", explique Laurent Petit, jouant avec le mot art : un jardin réalisé en permaculture qui s'étendra sur une are, dans le prolongement de l'actuel jardin aux 40 aromates. "On ne touche à rien, on aère les sols, on laisse faire les plantes. C'est formateur pour nos équipes. Cela redonne du sens, des lettres de noblesse aux producteurs. La cuisine doit dire ce que l'on est : des gens qui n'ont jamais rien lâché, qui veulent transmettre une émotion à travers l'expression et l'interprétation des éléments naturels."
Publié par Fleur Tari