D’un avis général, les relations employeurs-salariés n’ont jamais été aussi bonnes que depuis la reprise. La crise a ajouté de l’humanité au sein des équipes. De nombreux employeurs ont gardé le contact avec leurs collaborateurs pendant le confinement et chacun s’est remis au travail avec entrain. Bien sûr, pour certains, la situation est différente - à l’instar de cette salariée dans l’hôtellerie, sans nouvelle de son patron pendant deux mois. Se sentant abandonnée, elle est aujourd’hui démotivée. Pourtant, pour d’autres, cette période a permis de mieux se connaître et comprendre les problématiques de chacun.
“Les salariés se sont mis dans la peau du patron, ils ont bien vu que c’était la catastrophe. Ils font preuve de beaucoup de bienveillance envers moi. J’ai été transparent sur tout, je parle sans problème d’argent avec eux, que ce soit positif ou négatif”, raconte Frédéric Coiffé, à la tête de trois restaurants à Bordeaux. Le chef a été hospitalisé à cause du covid-19, suscitant l’inquiétude chez ses collaborateurs. “Aujourd’hui, nous avons envie de le soulager plus qu’avant, pour qu’il puisse souffler. Nous avons réalisé que la vie pouvait vite tourner au drame. Nous étions déjà une équipe soudée, mais je constate encore plus d’attention et d’écoute de chacun envers les autres”, remarque Vanessa Dejean, directrice des opérations pour Frédéric Coiffé.
Un regard différent sur l’entreprise
Pour les salariés, cette crise est aussi l’occasion de comprendre l’équilibre économique de leur établissement et d’y prendre part en s’adaptant aux besoins pour redémarrer. Florian Bitker, directeur des opérations du groupe les Hôteliers impertinents (hôtels Monte Cristo et le COQ à Paris), s’est beaucoup rapproché de ses “stratèges”, revenus en premier au travail. “Ils se mobilisent. On leur en demande plus. Avant, nous avions une hiérarchie de service - ménage, petit déjeuner, réception, etc. - mais nous demandons actuellement à notre personnel d’être polyvalent. Certains se révèlent très bons. Mes équipes sont très réactives et acceptent d’être bousculées dans leurs tâches et leur planning. Cette flexibilité est essentielle. Nous fonctionnons avec un baromètre économique. Chacun doit comprendre l’équation économique de l’hôtel, à quoi il sert dans l’entreprise, combien il coûte et comment il peut optimiser. Il y a une vraie pédagogie à faire. Nos salariés ont compris qu’en en faisant plus, on va sortir l’entreprise de la crise. Nous ferons grandir ces personnes dans le groupe”, assure-t-il.
“Mes employés n’ont qu’une envie : travailler. Pour certains, ça a été un électrochoc : ils ont pris conscience qu’ils avaient un boulot et des conditions de travail sympas. Cela a remis les pendules à l’heure”, ajoute Frédéric Coiffé. “L’actif d’un hôtel, ce sont les collaborateurs. Dans ces moments difficiles, les gens se révèlent. Nous préservons l’humain – il nous est arrivé de prêter de l’argent par exemple. Il faut donner avant de recevoir. Mais clairement, les gens dans la revendication ou n’ayant pas l’esprit du groupe ne restent pas chez nous. Nous construisons un groupe hôtelier et le savoir être est important”, souligne Florian Bitker.
Une meilleure compréhension de chacun
“Avant je gardais une certaine distance avec mes collaborateurs. Désormais, on se tutoie, on mange ensemble”, ajoute le directeur. Tom Lemercier, chef de réception du COQ Hôtel depuis janvier, confirme : “Cette période nous a rapproché. Nous avons vécu des choses uniques : pendant le confinement nous avons hébergé des soignants au COQ Hôtel, avec Florian. On se connaît mieux, et il nous aide beaucoup plus sur le terrain : il en comprend mieux les difficultés et cela simplifie les échanges. Il est encore plus à l’écoute, plus accessible et plus attentif à notre bien-être. J’étais en période d’essai au début du Covid-19. J’ai eu très peur que tout s’arrête mais il m’a tout de suite rassuré, il avait besoin de moi”, sourit-il.
Christopher Bellail, sommelier du rhum pour le bar 1802 du Monte Cristo, se sent lui aussi plus proche de son patron. Le confinement leur a permis de prendre le temps de travailler sur la stratégie de l’établissement pour le développement du bar et de la marque 1802. “Je me suis aussi formé sur différents sujets pendant cette période. J’ai beaucoup lu sur le rhum, les spiritueux, les vins, les cigares”, explique-t-il. D’autres ont appris des langues ou suivi des formations culinaires. Au moment de la reprise, “j’ai fait venir toutes mes équipes : j’avais le sentiment de retrouver une famille”, conclut simplement Frédéric Coiffé.
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Publié par Laetitia Bonnet Mundschau