Comme vous le savez, la profession s'élève contre les
dérives de l'économie dite collaborative. Est-ce normal, qu'à activité
similaire, les règles varient ? Les avancées qui ont eu lieu ne sont pas suffisantes.
Quelles mesures mettrez-vous en place pour que les hôteliers, comme les
restaurateurs, puissent travailler à « armes égales » ?
Nicolas Sarkozy : S'il est bien un
domaine où l'économie collaborative n'a plus de collaboratif que le nom et a
dérapé, c'est celui des sites du type Airbnb. L'essentiel de leur chiffre
d'affaires est fait d'appartements transformés en permanence en « hôtels
clandestins » et non de particuliers accueillant des touristes en étant
présents chez eux (comme ils osent le prétendre) ! Comme de plus ces sites agrègent toutes sortes
d'offres des plus occasionnelles à celles d'appartements transformés en
permanence en chambres d'hôtel clandestines (pour l'essentiel), ils créent
ainsi des « grands hôtels numériques virtuels » face aux Online
Travel Agencies et aux sites des hôteliers. Les clients consultant les deux
types d'offres en permanence pour choisir leur hébergement en fonction – pour
l'essentiel – du prix, il faut donc que l'ensemble des prestations de leurs
« hôtes-loueurs en meublé » soit taxé, dès le premier euro. Sinon la
concurrence est massivement faussée. Taxations au premier euro qu'il s'agisse
de la TVA, de la taxe de séjour, de la CVAE/CFE, de l'impôt sur le revenu et
des cotisations sociales. Sans cela, l'hôtellerie périra d'une concurrence
déloyale impossible à contrer. Car ses marges ne sont pas telles qu'elle puisse
par exemple supporter le simple écart dû au non paiement de la TVA par les
clients de ces loueurs en meublé. Ce qui suppose bien sûr que les sites doivent
déclarer à l'Administration tout ce qu'ils encaissent pour le compte des
« hôtes-loueurs en meublé ».
De plus, au-delà de la
mort à terme de l'hôtellerie si l'on ne fait rien, ces plateformes privent peu
à peu les habitants des villes de leurs logements et transforment la vie dans les
immeubles, en raison des va-et-vient permanents qu'elles organisent. Des règles
ont été introduites. Elles devront être fortement durcies tant sur la durée
minimum de séjour que la durée maximum de location annuelle à l'instar de ce
qui se fait dans de nombreux pays. Et l'exercice d'une telle activité hôtelière
au sein des immeubles – même occasionnelle -
devra être autorisée par le règlement de copropriété, comme c'est le cas pour la simple installation d'une
profession libérale (pourtant porteuse de beaucoup moins de nuisances qu'un
hôtel clandestin).
En matière de
restaurants, le dérapage de l'économie collaborative est également total. Il y
a probablement aujourd'hui en France 3000 restaurants clandestins. C'est
inacceptable. Non seulement la plupart d'entre eux échappent à la taxation que
subissent les restaurateurs classiques, mais cette activité s'exerce sans aucun
contrôle des règles d'hygiène qui s'imposent à eux. Ces clandestins n'ont ni la
licence, ni la formation nécessaire pour utiliser cette licence pour servir de
l'alcool. Il faut en finir, sans aucune concession, avec ces restaurants
clandestins et les sites qui leur permettent de prospérer.
Le tourisme est reconnu depuis peu comme un secteur
économique à part entière. Quelle place, quel 'ministère' doit-on lui accorder
selon vous et pourquoi ?
Pour moi, le secteur du tourisme est
essentiel. Près d'un million d'emplois aujourd'hui, beaucoup plus encore demain.
Face à la menace terroriste, il faut bien sûr faire plus pour promouvoir la
destination France par une coordination plus étroite encore entre les
professionnels du tourisme, l'Etat et les collectivités locales. Du côté des
communes, elles ont une responsabilité en matière de sécurité et de propreté.
Un effort beaucoup plus grand doit être fait sur ce dernier point par elles.
S'agissant de l'Etat, il doit d'abord faciliter l'entrée (et la sortie) des
touristes en assurant une fluidité au passage de l'immigration, une fois les
contrôles réalisés. Une fois le Schengen II mis en place, nous pourrions
réfléchir à la mise en place d'une procédure du type ESTA à l'américaine pour
des nouveaux pays, en particulier la Chine. La sécurité,
au-delà des problèmes du terrorisme, doit être renforcée. Tout ce qui sera
fait, comme je l'ai décidé, pour renforcer la sécurité des Français nous
confortera dans notre rôle de destination touristique.
L'Umih a dénombré que des centaines de normes et de règlements
s'appliquaient aux entreprises de l'hôtellerie et de la restauration, dont 90% emploient moins de 8 salariés. 50
nouvelles réglementations tombent tous les ans, soit environ 150 gestes nouveaux
pour l'exploitant. Votre sentiment ?
Les entreprises, en
particulier les hôtels et restaurants, sont écrasées par le poids croissant des
normes en France. Il nous faut revoir profondément l'ensemble des dispositifs
normatifs. Je pense par exemple à l'aménagement des obligations d'accessibilité.
Et il faut retrouver le sens de la mesure dans l'application des règles.
Nous mettrons en
place un moratoire sur la surtransposition des normes européennes. Pour éviter
l'empilement normatif, je veux limiter dans le temps la validité des normes.
Enfin, l'adaptabilité de la norme selon les réalités du terrain, sous le
contrôle des préfets, permettra de remettre du bon sens dans les décisions
administratives.
Quels sont les leviers à mettre en oeuvre pour
préserver et développer les TPE et les
PME qui sont vecteurs d'emplois, non délocalisables ?
En premier lieu, il est urgent de réduire le
coût du travail. A ce titre, je propose une suppression complète des charges sociales qui pèsent sur
le SMIC, dégressives jusqu'à 1,6 SMIC, ce qui permettra aux petites entreprises
d'embaucher plus facilement. Le CICE sera également supprimé, remplacé par une
baisse durable des charges patronales.
En
outre, nous devons alléger le quotidien des TPE et PME. Les chefs d'entreprises
doivent pouvoir se concentrer sur leur activité. C'est pour cela que je
souhaite revoir la structure de représentation
du personnel en fusionnant
l'ensemble des instances de représentation du personnel au-delà de 50 salariés.
Je supprimerai de même le seuil de 11 salariés pour les délégués du personnel.
Je souhaite également abroger le compte pénibilité, véritable
une usine à gaz, et je n'alourdirai pas les charges sur les entreprises avec le
prélèvement à la source initié par le gouvernement.
Enfin, chaque entreprise aura
désormais le droit de déterminer librement le temps de travail de ses salariés
à la condition par exemple que la 36e heure soit payée 36 heures, et
donc le moment où l'on passera des heures normales aux heures supplémentaires.
Il existe un certain nombre de mesures qui sont
utiles au secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Citons-en trois :
Réductions Fillon, Crédit d'impôts pour les Maîtres Restaurateur et l'Aide à
l'embauche dans les PME. Vont-elles perdurer ?
Je n'ai bien sûr pas l'intention de revenir sur ces
dispositifs.
Par ailleurs, mon projet
est très clair : baisse des impôts pour tout le monde et aucun nouvel
impôt.
Les entreprises françaises, dans leur ensemble,
réclament la stabilité fiscale. Que répondez-vous ?
La stabilité fiscale et la non-rétroactivité sont la clé. Les
changements doivent être peu nombreux, structurants, simples et concentrés en
début de quinquennat, afin de garantir une stabilité des règles sur la durée. Je
privilégierai les baisses de taux.
Y aura-t-il ou non, si vous êtes élu à la Présidence
de la République, une hausse de la TVA ?
Il n'y aura
pas de hausse de la TVA. Mon programme de baisse de charges d'impôts sera
financé par 100 milliards de baisse de dépenses.
Le secteur est confronté à de multiples problèmes de
trésorerie et de crédit. Le GNI, autre organisation patronale du secteur, réclame, par exemple, le rallongement des
crédits bancaires (7 ans à +). Jusqu'où
un Gouvernement peut-il agir ?
L'accès au
financement des entreprises doit redevenir une priorité des pouvoirs publics. J'y
veillerai personnellement.
Publié par Sylvie SOUBES