À l’orée des années 2020, les hôtels sont nombreux à vouloir devenir des destinations à part entière. Après la vague de l’expérience à faire vivre aux clients, place aux établissements qui se positionnent comme de nouveaux territoires à découvrir et s’approprier. Pour cela, les hôteliers pensent leur établissement tel un parcours jalonné d’espaces de vies (salons, bar, restaurant…) et de repères capables de fédérer tribus ou communautés. L’idée : fidéliser, mais aussi donner vie à un groupe, un clan, un club... qui peut faire d’un hôtel son QG.
Pour y parvenir, la culture est un excellent outil. Surtout quand celle-ci permet à la fois de créer un univers au sein de l’établissement, lui donner une personnalité et être à l’origine d’événements ouverts au-delà de la seule clientèle de l’hôtel. Chez French Theory, on l’a bien compris. Cet hôtel du Ve arrondissement de Paris, voisin du Panthéon, a profité d’une vague de travaux pour se métamorphoser et changer de nom, en jouant la carte culturelle. “Parce que nous sommes au cœur du Quartier latin”, explique Aurélien Armagnac, fondateur du concept French Theory. Un concept, car l’hôtel comme son restaurant sont peuplés de livres - avec des romans sélectionnés par l'écrivain Philippe Vilain -, disques, revues, illustrations sur les murs, objets inédits, curiosités… qui peuvent être achetés. À cela s’ajoute un studio d’enregistrement en sous-sol, loué notamment par la maison de disques Universal, toute proche. Le fin du fin ? Le minibar culturel, dans chaque chambre : “Ce minibar est rempli de livres, explique Aurélien Armagnac. C’est une façon d’inviter à venir consommer boissons, snack, pâtisseries dans notre café.” Une façon aussi de créer du lien entre les clients et l’équipe de French Theory, voire entre les clients eux-mêmes.
Des disques et des livres qui ne jouent pas le rôle d’objets de déco
Le groupe Evok, lui aussi, parie sur la culture. Pour les deux derniers hôtels qu’il vient d’ouvrir à Paris, le Sinner (IIIe) et Cour des Vosges (IVe), des curateurs ont été sollicités. Parmi eux, la galeriste Amélie du Chalard pour les œuvres d’art, le designer sonore Fred Viktor pour le choix des vinyles ou encore l’éditeur Anatole Desachy pour les livres. Des disques et ouvrages qui ne jouent pas le rôle d’objets de déco. Leur présence doit inciter le client à profiter de sa chambre autrement : en prenant le temps de poser un disque sur une platine, de se plonger dans un roman, de parcourir un beau livre de photos… Certes la présence de la culture dans les hôtels n’est pas nouvelle. Le Royal Monceau (VIIIe), refait à neuf au début des années 2010, proposait déjà librairie et 'art concierge'. Quant à l’hôtel Arvor, un 4 étoiles caché dans le IXe arrondissement, sa propriétaire, Nadine Flammarion, avait d’emblée misé sur les livres. À disposition dans les chambres et les parties communes de son établissement, ils côtoient affiches d’expositions vintage et créations de designers. À l’époque, Instagram, n’existait pas. Mais, aujourd’hui, se retrouver dans une chambre où l’on peut dénicher un bon bouquin ou écouter un vinyle rare, cela prête à poster.
Publié par Anne EVEILLARD