Pourquoi ils quittent l'hôtellerie et la restauration

Paris (75) Depuis le début de la crise sanitaire, de nombreux professionnels des CHR cherchent à changer de vie. Les horaires à rallonge, le poids d'une hiérarchie, les salaires peu attractifs font partie des raisons du ras-le-bol. Certains ont déjà sauté le pas. Ils racontent.

Publié le 31 août 2021 à 14:37


Depuis ces derniers mois, les bilans de compétences remportent un vif succès auprès des professionnels de l’hôtellerie et de la restauration.” C’est le constat de Julia Rousseau, consultante en ressources humaines au sein d’Ethique RH. Spécialiste du secteur des CHR, elle ajoute : “Le premier confinement a fait prendre conscience à beaucoup qu’ils avaient envie de souffler, de vivre dans un appartement plus grand, d’avoir un extérieur, de passer moins de temps dans les transports en commun, de profiter davantage de leurs enfants, d’avoir un rythme plus ‘léger’ et de se recentrer sur eux-mêmes.”

C’est comme ça que deux salariés du Bullier, brasserie parisienne du XIVe arrondissement, ont rendu leur tablier : l’un pour ouvrir une épicerie fine à Neuilly (Hauts-de-Seine), l’autre pour devenir cordonnier à Beauvais (Oise). Louis Jacquemin, quant à lui, a profité de la fermeture définitive du restaurant parisien où il était serveur, pour développer l’un de ses talents : la réparation des deux roues. À 22 ans, il vient de rejoindre l’atelier de la société Zeride, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). “J’apprends beaucoup sur le vélo électrique, le scooter… Je sais même changer un pare-brise !” Ce qui l’a décidé à ne pas récidiver dans la restauration : “Ici, le rythme est plus calme, comparé à un coup de feu dans un restaurant. J’ai des horaires fixes et je suis seul dans l’atelier, si bien que je peux travailler sans masque.

 

“Je travaillais de 9 heures à minuit pour 2 500 € net par mois

Parmi les métiers les plus recherchés par les professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, j’ai noté un engouement pour les statuts d’indépendants, comme dans l’immobilier ou la décoration. Le secteur bancaire et celui des ressources humaines attirent également, car ils permettent d’avoir un plan de carrière et d’évoluer au sein d’un groupe”, observe Julia Rousseau.

Les choix d’Olivier Charaven et Jordi Argiles reflètent cette tendance. À 51 ans, le premier a levé le pied sur son ancien métier de conférencier sur la gastronomie et l’histoire de l’art, qu’il exerçait dans des hôtels franciliens, pour rejoindre un groupe immobilier. “Je suis en télétravail, mais je garde le contact avec les clients, comme dans les hôtels, lors des visites d’appartements et de maison”, confie-t-il. Le second, pour sa part, a opté pour un poste de commercial dans une start-up. “Avant, je dirigeais un restaurant à Bordeaux [Gironde, NDLR]. Mais lorsqu’on a vidé les frigos le 16 mars 2020, je me suis dit que je n’aurais plus de boulot avant longtemps…” Jordi Argiles décide alors de se former en accéléré dans une école de commerce, “à raison de 50 heures par semaine pendant trois mois”. Puis, il enchaîne avec deux périodes de six mois en entreprise, “pour avoir une expérience de terrain”.

Résultat : “Aujourd’hui, je suis un digital nomade, avec des horaires de bureau. Rien à voir avec la restauration, où je n’avais pas de week-end, j’étais sur le pont de 9 heures à minuit, je rentrais fatigué chez moi et je gagnais 2 500 € net par mois, contre près de 4 000 actuellement.” Cerise sur le gâteau pour ce néo-télétravailleur de 28 ans : “Cet automne, je quitte la France pour emménager à Malaga et partager mes journées entre travail et loisirs.

 

“Il serait judicieux de refondre des pratiques du secteur des CHR”

Nous perdons de vraies pépites en ce moment, dans l’hôtellerie-restauration”, regrette Julia Rousseau. La spécialiste en ressources humaines reconnaît que “le rythme de travail et le manque de reconnaissance incitent à quitter les CHR. Il serait judicieux de refondre des pratiques du secteur, par exemple en revalorisant des salaires, pour attirer dès le lycée de nouveaux profils”.

Elle suggère aussi la création de “groupes de travail pluridisciplinaires, pour mener une réflexion sur la fidélisation des acteurs issus de l’hôtellerie-restauration”. Enfin, elle nuance l’actuelle fuite de talents en soulignant que certains de ses clients la sollicitent aussi “pour quitter d’autres secteurs et se tourner vers la cuisine ou la pâtisserie”. “Une gemmologue est en cours de reprise d’un petit hôtel-restaurant en Bourgogne”, confie Julia Rousseau. On savait le secteur des CHR en pleine mutation. La crise sanitaire en accentue le trait et en accélère le rythme.

 

Emploi recrutement


Photo

Publié par Anne EVEILLARD



Commentaires
Photo
Patricia VAN DER VOORT

mercredi 1 septembre 2021

Il serait aussi intéressant d'avoir un article sur ceux qui restent dans le métier parce qu'ils aiment vraiment ce qu'ils font. Certes les horaires sont parfois dingues, il est temps de repenser le travail en coupure, certes les salaires ne sont pas top et là aussi on peut encore repenser le taux, mais le contact client, l'esprit d'équipe lors du coup de feu et la satisfaction d'un travail bien fait quand le client part avec le sourire même s'il n'est resté qu'un demi heure pour avaler sont déjeuner tout en télétravaillant en terrasse pour pouvoir fumer une clope qu'il pense va l'aider à déstresser. Ça, ça vaut de l'or.
Photo
Romy CARRERE

mercredi 1 septembre 2021

Bonjour, je suis surprise par votre message. La majorité de nos papiers concernent les professionnels du secteur, en exercice. Nous essayons de vous transmettre des retours d'expériences, des vécus, des parcours... Et bien sur parfois nous nous devons aussi de faire remonter les difficultés. Et l'emploi (et les conditions de travail), représente, à mon sens, l'un des points crucial du moment.

Signaler un contenu illicite

Photo

En cliquant sur publier vous acceptez les [conditions générales d'utilisation]

Voir notre Politique des données personnelles




Vidéos-Podcasts


Newsletter

Ne Ratez plus l'actualité , abonnez-vous à la newsletter quotidienne !


Dernières offres d'emploi

Chef de partie H/F

84 - CRESTET

La Verrière Chêne Bleu, 84110 - Villa privée de luxe et vignoble. Opportunité de travailler avec une petite équipe dynamique au sein d un établissement prestigieux. La gastronomie et l'œnotourisme sont intrinsèques à tout ce que nous faisons. Nichée dans une vallée magnifique, le domaine offre un

Posté le 14 mars 2025

Second de cuisine (Sous-chef de cuisine) H/F

Canada

Le Manoir du lac William est un établissement hôtelier haut de gamme au Centre-du-Québec qui jouit d'une réputation très enviable pour la qualité de sa cuisine du terroir. Nommé hôtel de l'année par l'association des Hôteliers du Québec en 2023 et à multiple reprises détenteur de la mention la crème

Posté le 14 mars 2025

Responsable de salle H/F

75 - PARIS 10

RECRUTEMENT – EXTRA ASSISTANT RESPONSABLE DE RESTAURANT (H/F) Sol Semilla, restaurant vegan et sans gluten engagé dans une cuisine saine et gourmande, recherche son Assistant Responsable de Restaurant en Extra ! Tes missions : Assister la direction dans la gestion quotidienne Assurer

Posté le 14 mars 2025