Suite à la sortie de son dernier livre La Révolution délicieuse, Olivier Roellinger a reçu énormément de témoignages de la part de pêcheurs, de conchyliculteurs, de gens engagés dans la restauration collective. Cela a agi comme un déclic dans sa décision de s’engager : “Beaucoup m’ont interpelé au sujet de mon engagement dans des associations internationales comme les Relais & Châteaux, Ethic Océan, Les Semences paysannes... Et là je me suis dit : ‘Tout cela c’est très bien, mais finalement, est-ce que tu t’occupes vraiment de ce qui se passe en Bretagne ?’”
Partant du constat que la Bretagne rencontre de réels problèmes avec un modèle agricole qui a du mal à évoluer, mais aussi dans les cantines, le chef breton a décidé de sauter le pas : “Je me suis rendu compte que je devrais peut-être prendre des responsabilités politiques, car tant que la volonté politique n’est pas là, on n’arrivera à rien. Et au niveau régional, on peut vraiment faire basculer la dynamique vers un modèle plus vertueux, responsable et durable, dès lors qu’on a la volonté de faire évoluer les choses.”
Faire évoluer la restauration collective
“Il y a 115 lycées en Bretagne. Mon objectif est de faire passer plus de 50 lycées en 100 % fait maison, 80 % local et 80 % en bio. C’est à ce niveau qu’il faut donner le la au niveau politique. Notre pays, qui est théoriquement celui des droits de l’Homme, devrait aussi être celui du droit au bien-manger pour les enfants. Je me suis rendu compte qu’on ne s’occupait pas assez de l’alimentation dans nos rues, nos écoles, dans notre propre communauté. Et j’ai vécu comme cela pendant vingt-cinq ans : j’étais avec mon équipe, mes petits producteurs que je ne voulais pas partager avec mes copains cuisiniers du coin, parce que je voulais garder cette exclusivité. On n’était absolument pas dans le partage, on s’occupait des clients, des journalistes gastronomiques et bien sûr, deux fois par an, il y avait le grand frisson des guides…”
Pas assez de tabliers dans les collectivités
“Le pays s’est fracturé au niveau de sa gastronomie de tous les jours et de celle d’exception et cela a été dramatique économiquement, socialement, culturellement et au niveau de l’environnement et de la santé publique, bien évidemment. Parce quand on voit la pandémie d’obésité aujourd’hui, on se dit que nous, les cuisiniers, on n’a peut-être pas fait ce que l’on aurait dû faire. Alors je me suis engagé, parce qu’après avoir dénoncé toutes ces choses-là, je veux proposer des solutions ! Je ne veux pas en faire une carrière, mais je trouve que les cuisiniers devraient faire plus de politique ! On a un rôle à jouer au niveau de l’alimentation, au niveau de la pédagogie. J’invite d’ailleurs mes confrères et consœurs à tenter de proposer des alternatives sur des sujets que l’on connaît. Nous avons un rêve : que la Bretagne devienne le plus beau potager bio de toute l’Europe !”
Éducation alimentaire
“On doit apprendre aux enfants à se nourrir comme on leur apprend à lire, à écrire et à compter, poursuit Olivier Roellinger. L’éducation alimentaire est un vrai programme politique. Sur tous ces points-là, je suis assez confiant car la jeunesse du monde demandera à se nourrir d’une tout autre manière. Elle n’ingèrera pas la même chose que notre génération.”
Olivier Roellinger #Régionales#
Publié par Stéphanie Decourt