Najat Vallaud-Belkacem : Avec cet accord, le ministère et les représentants des professions se sont engagés à mener une réflexion commune et à entretenir un dialogue sur les métiers et les diplômes, à améliorer l'information des jeunes et des familles, à mettre en place une concertation permanente sur l'offre de formation et à développer la formation tout au long de la vie. La déclinaison en cours de l'accord cadre signé entre le ministère et tous les représentants des professions de l'hôtellerie et de la restauration - y compris de la restauration collective - doit permettre de mieux coordonner l'action collective que nous engageons en faveur d'une sensibilisation de tous les acteurs aux différents métiers de ce secteur d'activité et d'une meilleure information des jeunes. J'attends une évaluation de ses retombées et je pense qu'il peut être orienté vers la mise en oeuvre du parcours individuel d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel que nous allons mettre en place. Ce qui est important dans ce parcours, c'est qu'il va permettre d'opérer des liens entre l'école et la vie réelle, entre ce que l'on apprend, par exemple en sciences de la vie et de la terre, et l'utilisation de ces connaissances dans les activités professionnelles, par exemple dans la restauration.
Le pourcentage d'enseignants techniques qui n'ont pas eu d'expérience en entreprise augmente chaque année, ce qui appauvrit le niveau de la formation. Y a t-il une réflexion menée au sein de l'Éducation nationale pour encourager ces enseignants à effectuer des périodes d'immersion en entreprise
Nous avons engagé la reconstruction de l'appareil de formation initiale et continue des enseignants qui avait été détruit par le gouvernement précédent. C'est un effort considérable auquel j'attache une importance toute particulière. Les concours de recrutement du secteur de l'hôtellerie-restauration sont à nouveau ouverts, après une longue période de fermeture qui s'est traduite par de fortes tensions en matière d'encadrement. Pour les enseignants des formations et spécialités professionnelles et technologiques, les écoles supérieures du professorat et de l'éducation [ESPE] s'organisent pour fonctionner en réseau. Par exemple, Toulouse et Orléans-Tours se mobilisent pour assurer des préparations aux concours et des parcours qui incluent des stages de terrain en milieu professionnel au cours de la formation. Là encore, l'appui des professionnels est essentiel car il contribue à l'adaptation des compétences des enseignants et à leur pertinence en formation. C'est un champ de collaboration permanent, dans ce secteur tout particulièrement, à l'occasion des périodes de formation en milieu professionnel des élèves, comme lors des événements qui réunissent les professionnels et l'école, par exemple dans le cadre des concours, le concours général et le concours des métiers.
La profession s'est engagée dans la voie de la qualité, notamment avec la labellisation des entreprises par l'intermédiaire du permis de former. Un an après sa mise en place, les tuteurs et maîtres d'apprentissage se sont-ils lancés dans cette formation ?
La labellisation des entreprises est une démarche qui regarde la profession et dans laquelle l'Éducation nationale n'intervient pas. Cette démarche qualité me paraît importante dans l'intérêt de la formation des jeunes et par conséquent dans celui aussi de la profession, car la formation des jeunes est pour elle un investissement. Je suis très intéressée par des retours d'information sur ce qui est véritablement entrepris.
Il y eu une baisse de 8,14 % du nombre de signatures de contrats d'apprentissage en 2013. Pourtant, l'apprentissage et l'alternance associés au système scolaire fidéliseraient les jeunes entrant dans la filière. Comment comptez-vous valoriser l'apprentissage en milieu scolaire ?
Sur la baisse des contrats d'apprentissage, s'agit-il plutôt d'une désaffection des jeunes pour cette voie de formation ou d'une plus forte réticence des employeurs à embaucher des apprentis ? Quant à la 'fidélisation', elle est contredite par les données disponibles, car les taux de rupture de contrats sont particulièrement importants dans le secteur : près de 49 % de taux de rupture et plus de 38 % de taux d'abandon. Ce sont les plus élevés, tous secteurs confondus, et ils frappent particulièrement les formations de CAP. L'Éducation nationale va apporter sa contribution à l'effort de développement de l'apprentissage, tel qu'annoncé par le président de la République dans le cadre de la grande conférence sociale de juillet dernier. Avec un objectif annoncé de 50 % supplémentaires, les effectifs d'apprentis dans les établissements publics locaux d'enseignement devraient passer de 40 000 à 60 000. Le secteur de l'hôtellerie-restauration devrait y prendre sa part. Il s'agit d'abord de privilégier la complémentarité des voies de formation et de permettre aux jeunes de choisir la voie qui leur paraît la mieux adaptée, y compris en alternant les parcours. Les campus des métiers et des qualifications qui sont en cours de développement, avec de beaux projets dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, devraient y contribuer.
Publié par Propos recueillis par Hélène Binet