L'entrée dans le nouveau millénaire a laissé place à de nouvelles tendances : les restaurants à la mode devenant des références plus pour leur ambiance que pour leur savoir-faire culinaire. À la question "que détestez-vous le plus au restaurant ?", les amateurs de gastronomie vous répondront succinctement : le bruit. Dans une tribune parue dans le New York Magazine, plusieurs critiques gastronomiques tels qu'Adam Platt ou Robert Sietsema ont procédé à des évaluations sonores dans plusieurs établissements de la ville. Le résultat de leur enquête démontre qu'il n'est pas rare d'avoir un volume sonore aux alentours de 90 décibels dans un restaurant.
Au restaurant Lavo, établissement à la mode dans Manhattan, 96 décibels ont été enregistrés. L'évolution des moeurs est telle que, des restaurants comme Le Bernardin, 3 étoiles dans le guide Michelin, ont dû s'adapter. Comment ? En installant, il y a deux ans, un système de sonorisation près du bar pour séduire une clientèle plus jeune. "Les choses ont changé, explique Adam Platt. Récemment, j'ai emmené ma mère dans un restaurant où nous avions nos habitudes. Suite à des rénovations et l'installation d'un système hi-fi, l'ambiance auparavant ouatée permettait la discussion, maintenant c'est devenu abominable."
Le diktat de l'ambiance
Phénomène en recrudescence, la surdité des serveurs est aussi un problème. Les niveaux de décibels élevés auxquels sont confrontés les personnels peuvent entraîner des lésions irréversibles pour l'audition. Certains restaurants promettent de baisser le volume après avoir constaté que celui-ci nuisait non seulement à leurs personnels, mais également au bon travail du chef. Pourtant, de grands chefs new-yorkais, tels que Willy Dufresne au restaurant l'Alder, maintiennent un volume sonore trop élevé, selon ces mêmes journalistes. Certains chefs expliqueront que l'ambiance est pour 80 % l'origine de la réussite d'un restaurant à New York, dont la clientèle songe plus souvent à faire la fête que réellement se restaurer.
Hélas, vous diront les amateurs d'ambiances feutrées, nombre de restaurants, en particulier le week-end, ressemblent plus à des night-clubs qu'autre chose. Suscitant la colère des critiques gastronomiques new-yorkais qui apprécient de savourer de manière plus oecuménique les plats sur lesquels ils auront à disserter, la musique et l'ambiance sont-ils toujours des facteurs décisionnaires quant à la réputation d'un établissement ? Qu'en est-il aujourd'hui du travail du chef ? Des restaurants comme le Benoît d'Alain Ducasse font fi de cette tendance et marchent très fort. Mais en dehors des très grandes tables et de quelques restaurants, trouver à New York un établissement où discuter tranquillement entre amis autour d'une table est devenu une véritable quête du Graal.
Publié par A.J.A