C'est dans un climat tendu que s'est déroulé l'atelier de branche des restaurateurs lors de la 2e journée du congrès de l'Umih, mercredi 27 novembre à Cannes, une tension encore bien présente le lendemain, lors de la venue de la ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme, Sylvia Pinel. L'organisation professionnelle avait convié à la tribune deux spécialistes afin d'expliquer aux restaurateurs comment réagir face à l'augmentation du taux de TVA au 1er janvier prochain : Bernard Boutboul, directeur général de Gira Conseil, cabinet de conseil spécialisé en hôtellerie-restauration, et Christopher Terleski, cuisinier et consultant en hôtellerie-restauration. Ce dernier a pourtant pris le parti de l'humour pour énumérer les différentes pistes qui s'offrent aux professionnels. Il qualifie le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de confusion inventée pour contourner l'ennemi : "Vous êtes dans un pays où vous roulez à droite mais reculez à gauche."
Très applaudi par l'assistance, il a conclu son intervention par un constat simple : "Quelle que soit la solution retenue, agissez avant le 1er janvier et ne touchez pas au prix du café, qui sera le premier élément examiné par les clients et par la presse." En effet, "les journalistes ne nous aiment pas, surtout les médias parisiens qui font le journal de 20 heures", a déclaré Hubert Jan, président des restaurateurs de l'Umih. Nombreux sont les professionnels, notamment plusieurs présidents départementaux, à réclamer une grande manifestation nationale, constatant que ces derniers mois, seuls ceux qui sont descendus dans la rue ont été entendus par les pouvoirs publics. Quelques actions locales et manifestations sont d'ores et déjà prévues, dans le Berry le 9 décembre et dans les Alpes-Maritimes le 11.
Un discours musclé
Le lendemain, le président confédéral de l'Umih, Roland Héguy, a porté le message d'entrepreneurs désespérés et exaspérés à la ministre du Tourisme, Sylvia Pinel, présente lors du discours de clôture. Et lorsque celui-ci a déclaré : "[les professionnels] sont sacrifiés mais pas résignés", les congressistes se sont levés comme un seul homme en coiffant une toque blanche, sur laquelle était écrit ce même slogan. Et d'expliquer : les entreprises du secteur, comme le reste de l'économie, ont besoin de relance mais celle-ci ne peut s'obtenir par l'impôt et les taxes.
Il a ensuite dénoncé le "matraquage fiscal" supporté par les entreprises avec 30 nouvelles taxes en trois ans. À la formule "trop d'impôt tue l'impôt", le président confédéral a alors ajouté : "Trop d'impôts tue les entreprises. [Je demande] devant tous les représentants de toute une profession d'ajourner la hausse de TVA. Ne pas revenir sur cette mesure est tout simplement suicidaire." Il a ensuite poursuivi par d'autres revendications : la mise en ordre par les pouvoirs publics des pratiques des centrales de réservations, la création du statut d'artisan restaurateur et la lutte contre la concurrence déloyale des commerces illégaux.
"J'ai entendu vos inquiétudes, j'ai bien conscience de vos difficultés, a alors affirmé Sylvia Pinel. Derrières les chiffres, il y a des situations individuelles très dures. Je suis venue aujourd'hui évoquer point par point l'ensemble des sujets et voir les solutions que nous pouvons apporter." La ministre a d'abord annoncé que la circulaire rappelant le cadre d'exercice des chambres d'hôtes était en cours de finalisation et qu'elle serait adressée aux préfets dans une quinzaine de jours, une annonce applaudie par l'assistance.
En revanche, la ministre a été chahutée lorsqu'elle a évoqué le dispositif du CICE, déclarant que le secteur en profitait pleinement. Selon elle, le CICE bénéficie à 90 % des salariés du secteur HCR contre 65,7 % pour l'ensemble de l'économie, et le secteur bénéficie de 5 % du total du CICE (plus d'un milliard d'euros), alors que la masse salariale du secteur représente 2,8 % de l'emploi en France. Des arguments qui n'ont pas satisfait Roland Héguy : ce dernier a appelé tous les présidents départementaux à participer aux assises du tourisme mises en place dans les départements afin de faire passer leurs revendications et à et jouer les trouble-fête.
Publié par Pascale CARBILLET
lundi 2 décembre 2013