Le 'nouvel Eldorado culinaire' ou 'la terre des mille saveurs'. C'est ainsi que le célèbre magazine Restaurant décrit le Pérou, qui a d'ailleurs raflé le prix de la meilleure destination gastronomique au monde lors des World Travel Awards 2012. Alors que le Pérou a postulé à l'Unesco pour que sa cuisine soit reconnue au patrimoine immatériel de l'humanité, Lima s'affiche aujourd'hui comme la capitale gastronomique de l'Amérique latine.
Des jeunes, sortis des centaines d'écoles qui ont essaimé dans tout le pays (dont le Cordon-bleu), y dirigent plus de 30 000 restaurants (contre 18 000 en 2001). Véritable phénomène de société, la cuisine a attiré plus de 500 000 visiteurs en 2012 lors de son festival phare, Mistura, et des pointures telles que Michel Bras, Ferran Adrià ou encore René Redzipi ont déjà participé à l'événement.
Des richesses naturelles et historiques
Les raisons de cette effervescence ? Tout d'abord, l'extrême diversité des produits. Considéré comme le plus grand centre génétique du monde, le Pérou compte plusieurs milliers de variétés de quinoas, pommes de terre et patates douces, 2 000 espèces de poissons, 650 espèces de fruits indigènes méconnus… Sans oublier l'aji, un piment considéré comme l'ADN de la cuisine péruvienne. Cette luxuriance alimente une cuisine très métissée qui compterait plusieurs milliers de plats régionaux.
Avant les Incas, les Mochicas cultivaient déjà l'art de la table. Puis, chaque vague d'immigrés a apporté sa touche : conquistadors, esclaves africains, travailleurs chinois, colonie italienne et enfin, surtout, les Japonais dès la fin du XIXe siècle. Ces derniers ont fusionné leurs techniques culinaires avec les produits locaux. Résultat : la cuisine nikkei (ou péruvo-japonaise) met l'accent sur la fraîcheur, les produits crus, les cuissons courtes ou à la vapeur qui préservent saveurs et nutriments, les ingrédients puisés aux répertoires chinois, créole, japonais et local (gingembre, oignons et légumes chinois, riz, sauce et pâtes de soja, miso, poissons, algues…).
Des chefs créatifs et médiatiques
Le chef Nobuyuki Matsuhisa, multi-étoilé Michelin à la tête d'un véritable empire (plus de 25 restaurants dans les cinq continents), figure parmi les pionniers de cette tendance. Dès les années 1970, ce Japonais né à Saitama séjourne à Lima où il ouvre son premier restaurant. Il sera l'un des premiers à exploiter la richesse des terroirs péruviens, dont l'empreinte colorera sa future cuisine, au confluent de l'Asie et de l'Amérique du Sud. Celui qu'on surnomme 'Nobu' signe ainsi un bar chilien à la sauce piment 'Jalapeño', des sushis rolls au thon épicé, du cabillaud black cod au miso et yuzu… Un univers culinaire qu'on peut découvrir, jusque fin mars, dans un restaurant pop-up au Royal Monceau Raffles Paris.
Autre ambassadeur, Gastón Acurio exporte son savoir-faire dans 12 pays, au travers de ses 32 restaurants (dont Astrid & Gastón, retenu parmi les 50 meilleurs établissements du classement San Pellegrino). À la fois business man et superstar dans son pays, il compte à son actif une vingtaine d'ouvrages, une école destinée aux jeunes défavorisés, plusieurs émissions télévisées et documentaires… Parmi ses créations, des ceviches aux influences japonaises, des currys des Andes, des versions gastronomiques des anticuchos (les brochettes vendues dans la rue au Pérou) comme celles associant morceaux de coeur de boeuf, pommes de terre frites et maïs péruvien au piment rocoto, ou encore des tempuras au chocolat.
Publié par Violaine BRISSART