Gilles Le Bot, à la tête de Mamie Lucienne (Paris, XIVe), sert entre 80 et 100 clients par jour. L’établissement, qui fait la part belle à la vente à emporter et à la livraison, se retrouve vite face à “des montagnes d’emballages” dans ses poubelles. Dès 2018, le fondateur opte donc pour la vente de couverts en bois ou bambou (0,50 €), et une présentation dans des bocaux. “Nos recettes, à l’exception des salades, sont vendues dans des contenants en verre. On y ajoute le prix de la consigne à 50 centimes pour la vente à emporter ou la livraison. Lorsque le bocal est rapporté, le prix est déduit sous forme d’avoir pour le prochain achat. Il n’y a ni délai, ni caution”, précise le restaurateur. La clientèle a tout de suite adhéré, et le système d’avoir s’est révélé un levier efficace de fidélisation, même si la moitié des consignes ne revient pas dans le circuit. “Nous lavons et stérilisons les bocaux sur place. C’est une logistique et un effort opérationnel supplémentaire, d’autant qu’il faut ranger tous ces pots. Mais c’est plutôt simple à mettre en place, sans surcoût, et c’est récompensé par un comportement plus responsable. En interne, tout le monde trouve ça chouette”, se réjouit-il.
De nombreux freins
Bioburger et Ubereats s’essaient aussi à la consigne. Depuis juin dernier, deux restaurants parisiens Bioburger testent ainsi un système de réemploi, en partenariat avec la plateforme de livraison. Lors de sa commande, le client peut choisir entre des emballages consignés en verre (un pour le burger et les frites et un autre pour la boisson, pour 4 €) et des emballages biodégradables. Il pourra se faire rembourser la consigne en rapportant les contenants dans l’un des deux établissements pilotes. “L’expérience client est top : le produit est plus qualitatif, visuellement et gustativement, et le verre maintient mieux la chaleur. En interne, on lave les contenants. C’est léger en termes de process et de coût : Ubereats a financé ces emballages”, note Louis Frack, cofondateur de l’enseigne de restauration rapide. Mais le test rencontre un certain nombre de limites. “Moins de 2 % des clients optent pour la consigne en livraison. Le taux est deux fois plus élevé pour les commandes de produits végétariens. Seuls 50 % des contenants sont retournés dans nos restaurants. Les clients ne sont pas tous prêts pour la consigne, d’autres sont de passage”, poursuit-il. À ses yeux, deux pistes pourraient être exploitées afin d’améliorer cette expérience : “Débourser de l’argent pour la consigne, c’est un frein. Il faudrait un modèle cashless, comme un dépôt de garantie sous forme d’empreinte bancaire, mais d’un montant plus élevé – environ 10 ou 15 €. Par ailleurs, il faudrait plus de points de collecte pour récupérer ces consignes.”
Sensibiliser les consommateurs
De son côté, Elodie Macquet, cocréatrice de la chaîne Poké Bar, multiplie les initiatives. Sur place, les plats sont servis dans de la vraie vaisselle. Depuis 2018, l’enseigne commercialise des bols et des couverts réutilisables pour la vente à emporter. “Nous encourageons nos clients à apporter leurs propres récipients et à ne pas demander de sacs ni de couverts. Chaque geste écologique est récompensé dans notre Green Card écolo : au bout de 14 tampons, les clients reçoivent un menu gratuit”, souligne l’entrepreneuse. Elodie Macquet fait aussi appel à deux spécialistes de la consigne, La Consigne GreenGo et &Repeat. Les deux acteurs comptent sur un réseau de points de collecte (principalement dans la capitale) et sur un paiement à l’usage pour les restaurateurs (quelques dizaines de centimes d’euros, un prix proche des emballages jetables). Autre corde à son arc : le système de recyclage lancé par &Repeat. “Pour chaque commande à emporter, les restaurants partenaires apposent un sticker avec un QR code sur les emballages. Les clients peuvent scanner ce code et découvrir le point de recyclage le plus proche de chez eux pour y remettre leurs contenants. Une fois les emballages déposés, les consommateurs sont récompensés et gagnent des crédits qu'ils peuvent utiliser lors de leur prochaine commande auprès d'un restaurant partenaire”, explique Nicolas Piffeteau, responsable des opérations chez &Repeat. Pour Elodie Macquet, aucun problème ne se pose en interne, car les établissements, spacieux, disposent d’espace pour la plonge et le stockage des contenants consignés. En revanche, il y a encore un long travail de sensibilisation du consommateur à effectuer. La consigne, aujourd’hui, ne représente qu’1% de ses ventes.
consigne #développementdurable#
Publié par Violaine BRISSART