Au bord de la mythique Nationale 7, à quelques kilomètres de Gien et Montargis et à une heure trente de Paris, se dresse depuis 1945 l'Auberge des Templiers. Achetée par Jacques et Lucienne-Anne Depee, cet hôtel-restaurant a traversé les époques tout en restant dans les mains de la même famille. Elle est aujourd’hui dirigée par Guillaume Depee, le petit-fils, qui a pris la suite de son père en 2016. De ses débuts modestes, l’établissement est devenu au fil des années un restaurant étoilé et hôtel 5 étoiles. Mais son histoire se confond aussi avec celle des Relais & Châteaux, puisque Jacques Depée a été l’un des huit cofondateurs du réseau, en 1954, qui compte aujourd’hui 580 établissements répartis dans 65 pays sur cinq continents.
“Au départ, c'était une simple maison de famille, raconte Guillaume Depée. Ma grand-mère, Lucienne-Anne, avait ce rêve fou d'ouvrir un restaurant, alors qu’elle n’avait aucune expérience dans le domaine. Elle l’avait acheté avec mon grand-père en 1938, mais la guerre a stoppé net leur projet et c’est seulement le 31 décembre 1945, et de façon complètement improvisée, qu’elle a accueilli ses premiers clients. Ensuite, et pendant trente-six ans, elle n’est pas sortie de sa cuisine, sans même prendre une journée de vacances !” Une passion qui lui permettra de décrocher une première étoile Michelin en 1952, puis une deuxième en 1975.
La Route du bonheur
En 1954, Jacques Tilloy, propriétaire de La Cardinale, une maison similaire située non loin de là, propose à Jacques Depee de se regrouper avec d’autres restaurateurs situés comme eux le long de la Nationale 7, pour faire “de la réclame” ensemble. Ils créent, à huit, le réseau La Route du bonheur, qui prend quelques années après le nom de Relais de campagne. “L'idée était de mettre en valeur des établissements authentiques et familiaux, où chaque client se sentirait chez lui, autour d’une cuisine de qualité”, rappelle Guillaume Depee.
Au fil des décennies, l'Auberge des Templiers a évolué tout en préservant son âme. Des extensions successives ont permis à l'établissement de passer de deux à 22 chambres et suites réparties dans sept bâtiments, chacune à la décoration unique, répartie dans un parc où les clients peuvent profiter d’une piscine de 20 m construite en 1965, à une époque où elle représentait un luxe absolu. Le restaurant a toujours une grande place dans l’offre, dirigé depuis 2023 par le chef Kevin Stroh. Les salariés, dont une partie est logée sur place, font aussi partie de cette maison et de cette convivialité : “On vit ici comme en famille, comme une troupe de théâtre, en partageant les joies et les peines.”
Des évolutions constantes
En tant que dernier cofondateur des Relais & Châteaux encore en exercice, Guillaume Depée tient beaucoup à l’identité du réseau. “On meurt le jour où l’on oublie qui on est et d’où l’on vient, mais cela ne doit pas nous empêcher d’évoluer et de progresser, et surtout, on doit progresser ! Mon rôle, c’est de le rappeler en permanence.” Le propriétaire a vu l’évolution de l’association, avec l’ouverture à l’international dès 1961, puis la fusion, initiée en 1975 sous la mandature de Jo Olivereau, avec les Châteaux Hôtels, pour prendre le nom des Relais & Châteaux et créer le logo actuel qui mélange les deux emblèmes de chacun, le papillon et la fleur de lys.
Pour passer de huit établissements en 1954 à 580 aujourd’hui, l’association a su, au fil des années, se développer à l’international et consolider son réseau de commercialisation, avec notamment le lancement des coffrets-cadeaux. Un réseau solide qui est parvenu à se relever des épreuves qui ont émaillé son histoire. Aujourd’hui, Guillaume Depee fonde beaucoup d’espoirs dans la nouvelle présidence, en place depuis 2023 : “Laurent Gardinier connaît bien les maisons et les valeurs des Relais & Châteaux, et il a en même temps la culture de terrain d’un chef d’entreprise, qui sait quelles difficultés un établissement peut traverser."
Et parce qu'il souhaite toujours améliorer ses prestations, Guillaume Depée réfléchit à la création d’un club enfants, qui permettrait d’accueillir les familles avec des tout-petits, mais aussi, à moyen terme, à l’ouverture d’un bistrot dans la propriété consacré à la cuisine de sa grand-mère. Deux projets qui permettraient de diversifier l’offre et la clientèle, et de prolonger la durée de séjour des hôtes. L’aventure familiale se poursuit, en se renouvelant en permanence.
Publié par Roselyne DOUILLET