Une opération bien peu fréquente s'est conclue le 16 janvier dernier, dans l'Aveyron, sous la forme d'un échange de restaurant entre deux professionnels. Le terme d'échange résume de manière très simple la transaction qui conduit Hervé Busset, d'un côté, et Émilie et Thomas Roussey, de l'autre, à inverser leur lieu de travail et le décor qui va avec.
On se résume. Après quasiment vingt-quatre ans à la tête du Moulin de Cambelong, à Conques, des investissements à n'en plus finir et la fierté d'afficher une étoile Michelin depuis 2007, Hervé et Dominique Busset ne souhaitaient plus mettre autant d'énergie dans l'exploitation d'un hôtel (9 chambres). Lui, cuisinier très inspiré par le travail des plantes et des fleurs, voulait se limiter à l'expression gastronomique de sa cuisine. “Il y a deux ans, j'ai décidé de mettre en vente afin de me rapprocher de Rodez et du Château de Canac où nous exploitons une table et trois chambres d'hôtes. Mais cette annonce n'a pas suscité beaucoup d'intérêt. J'ai alors pensé à Émilie, qui avait travaillé une saison à nos côtés, et à Thomas, qui ont créé ET dans le centre historique de Rodez. Ma proposition les a intéressés mais ils ne se sentaient pas prêts, le Moulin leur semblait une trop grosse affaire.”
Le jeune couple a réfléchi et exprimé quelques mois plus tard son intérêt. “Dans un premier temps, et à condition que les banques les suivent, ils ne pouvaient s'engager que sur le rachat du fonds, poursuit Hervé Busset. J'ai eu l'idée de leur permettre d'étoffer leur apport personnel en reprenant leur affaire ruthénoise. C'était la bonne solution et, dès à présent, nous avons fixé le prix des murs qu'ils achèteront plus tard.” Le chef étoilé a même poussé un peu plus loin son soutien aux repreneurs en leur accordant la gratuité du loyer pendant cinq mois, “Histoire de ne pas les plomber au début !”
Du travail pour les déménageurs
“Nous nous sommes toujours imaginés dans un milieu rural, expliquent de leur côté Émilie et Thomas Roussey, mais quand on veut s'installer à moins de 30 ans, les banquiers vous suivent plus facilement dans la reprise d'un restaurant en ville plutôt qu'à la campagne. Dans notre tête, Rodez n'était donc qu'une étape !” Du restaurant racheté en 2015 ils ont fait ET trois ans plus tard. “On personnalisait plus le lieu et nous avons pu afficher notre identité gastronomique.” Un savoir-faire qui pourra s'affirmer à Conques, cité historique sur le chemin de Compostelle.
Leur rêve est donc devenu réalité et les déménageurs ont été rapidement associés à cet échange. Du mobilier aux assiettes en passant par une partie du matériel de cuisine et la décoration, chacun à fait suivre dans son nouveau lieu les éléments de son quotidien précédent. “On ne veut pas que nos clients fidèles soient dépaysés une fois dans la salle”, souligne le couple qui va désormais apprendre le métier d'hôtelier et, surtout, reconstituer une équipe. “Nos anciens salariés n'ont pas souhaité quitter Rodez.”
Une situation à laquelle n'est pas vraiment confronté Hervé Busset. “Directeur de restaurant, sommelier et l'essentiel de la brigade de cuisine nous accompagnent dans ce changement.” Ils ont encore quelques mois pour prendre leurs marques puisque le chef ne prévoit pas l'ouverture du restaurant qui portera son nom avant le mois de juin en raison des travaux qu'il veut réaliser.
À Conques, la reprise est prévue en avril. “Et nous voulons pousser la période d'activité à dix mois au lieu de sept auparavant”, concluent les nouveaux exploitants du Moulin.
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Publié par Jean BERNARD