Foie gras : le classique des fêtes a su se renouveler

En 2015, cette spécialité n'est plus exclusivement servie en terrine au moment des fêtes. Il est une matière qui se prête à toutes les préparations et à des associations inattendues. Cinq chefs nous font part de leur approche de ce produit d'exception.

Publié le 13 octobre 2015 à 16:17

"La terrine, c'est fini", plaisante Matthieu Garrel, du bistrot Le Bélisaire (Paris, XVe), qui reconnaît en préparer quelques-unes au moment des fêtes pour les clients qui la lui commandent. Il y a quelques mois, dans le cadre d'un festival, le chef se retrouve à devoir créer un plat autour du foie gras. Le succès de son Foie gras, légumes et coques est tel qu'il décide de le mettre à la carte. "C'est le côté marrant, canaille et dans l'air du temps que je voulais montrer de ma cuisine." Avant le service, Matthieu Garrel marque les escalopes, puis au moment de les servir, les fait chauffer 15 à 20 secondes au micro-ondes, "sans perdre de gras ni de poids". L'escalope est alors servie avec des légumes "préparés à la façon d'un tajine dans un bouillon safrané, pour une note de voyage et des coques et des moules juste ouvertes à la vapeur pour le peps et l'iode. Un plat très facile de digestion", précise-t-il. Depuis, il est hors de question de l'enlever.
 

La légèreté et la digestibilité

Éric Guérin (La Mare aux oiseaux à Saint-Joachim, Loire-Atlantique) travaille avec Alain François, éleveur de canard à Bouaye. Il propose du foie gras toute l'année à sa carte, "C'est un produit avec lequel on peut oser des mariages." En particulier ceux évoquant le voyage… C'est justement un voyage au Cambodge qui lui a inspiré sa recette de fête, Foie gras pressé aux pommes de terre, crevette et ail. Ce qu'il aime, c'est utiliser la texture grasse et crémeuse du foie gras comme liaison, "on l'a beaucoup allégé ces dernières années. Aujourd'hui, je l'émulsionne au maximum au Thermomix, je le monte au blanc d'oeuf, pour plus de légèreté, de finesse. On cherche ainsi à faciliter la digestion. Les gens y sont sensibles et on y fait attention… Surtout dans un menu qui peut comporter 8 ou 9 plats." Pour répondre favorablement aux clients locaux qui souhaitent commander des classiques, le chef tient toujours à disposition une terrine de foie gras, du muscadet et de la fleur de sel.

Un incontournable des fêtes

"Quand viennent les fêtes et que l'année est derrière nous, c'est le produit noble qu'on attend et qu'on se réjouit de retrouver. C'est ce que j'ai connu enfant et c'est ce que j'ai envie de garder", avoue Jean Sulpice,deux étoiles Michelin à Val-Thorens (Savoie). Le chef le prépare traditionnellement en terrine pour le menu enfant, mais pour sa cuisine, il aime profiter d'une pleine créativité. L'un de ses plats signature est d'ailleurs L'Huître de Papin pochée sur une crème de topinambour et foie gras, au parfum de vin jaune et noix de Grenoble. "Avec le foie gras, beaucoup d'autres modes de cuisson sont permis, on peut le faire pocher dans un consommé, lui donner un côté fumé grâce au chalumeau ou le travailler en granité à partir de foie gras cru. Il existe une multitude de manières de le travailler et de se faire plaisir", ajoute le chef.

Le foie gras en textures

Au 64° le restaurant (Le Chambard à Kaysersberg, Haut-Rhin), le bavarois très léger de foie gras d'oie surmonté d'une opaline de sucre inverti et saupoudré d'une râpée de foie gras congelé à cru et de parmesan n'a pu être retiré de la carte pendant plusieurs mois, tant les clients en étaient friands. Le soir du 24 décembre, ce sont des produits traditionnels qu'Olivier Nasti privilégie cependant, comme le foie gras truffé en brioche servi en entrée. La terrine de foie gras d'oie reste elle disponible toute l'année : "Il y a toujours un client qui m'en demande", explique le chef. Installé au coeur de l'Alsace, Olivier Nasti travaille à 95 % du foie gras d'oie. Celui de canard est poché dans une décoction de fruits puis laqué avec la décoction réduite avant d'être serviren tranches, accompagné d'une meringue sans sucre et du fruit présent dans la décoction, la quetsche par exemple.

 

Des accords inédits

"Ce que l'on fait aujourd'hui avec le foie gras aurait sûrement déstabilisé mon grand-père", déclare, amusée, Hélène Darroze (Restaurant Hélène Darroze à Paris et The Connaught Hotel à Londres), qui a appris "la culture du foie gras" auprès de lui. L'accommodant d'algues nori, de verveine citronnée ou d'huîtres, elle est consciente du chemin parcouru, "il y a quelques années, ça aurait été impensable. C'était un produit qui n'autorisait pas de fantaisie autour". Entre Londres et Paris, Hélène Darroze continue d'explorer de nouvelles voies pour le foie gras, comme les Black bowls, des boules de foie gras confit et mixé en purée, roulées dans de la chapelure de truffe noire et accompagnées de céleri et de pommes vertes.

Une autre recette revient parfois depuis sa création, il y a dix ans, c'est la Crème brûlée au foie gras, sorbet pomme verte et pistaches torréfiées - "beaucoup la font aujourd'hui, mais ça marche toujours" -, sans oublier la Glace au foie gras, huître et bâtonnets de pommes vertes. Son menu de Noël à Londres étant déjà établi, Hélène Darroze annonce des Saint-Jacques Rossini, de grosses noix de plongée dressées de foie gras poêlé, cardons et sauce Rossini. Est également inscrit le foie gras confit au vin des dieux (du mulled wine, le vin chaud anglais), en terrine avec des fruits du mendiant (à paraître en novembre dans Mes recettes en fêtes, aux éditions du Cherche-Midi).


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Publié par Caroline MIGNOT



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