En se parant du gilet rouge de Théophile Gautier à la première représentation d'Hernani, Laurent Caraux, président d'honneur du Syndicat national de la restauration thématique et commerciale et dirigeant de la chaîne de restaurants El Rancho, a signé dans nos colonnes une tribune libre défendant 'le restaurant pour tous'.
Déjà publiée sur notre site internet, cette prise de position n'a pas manqué de susciter des réactions nombreuses et pas toujours amènes, preuve que le débat lancé sur la définition et l'identification du restaurant est loin d'être clos. Il est vrai, comme le souligne Laurent Caraux, que la restauration a subi "des mutations technologiques dont la rapidité et l'ampleur transforment les modes de production, de consommation, de financement des entreprises et de management", en citant un récent éditorial de Natalie Nougayrède, directrice du journal Le Monde.
Face à des évolutions de plus en plus rapprochées et souvent inattendues, le restaurateur éprouve de compréhensibles hésitations à s'adapter aux comportements de clients toujours plus zappeurs, inconstants et imprévisibles. Le redoutable effet de 'la mode, c'est ce qui se démode' exige une perpétuelle recherche de modernité dont fait aujourd'hui partie le recours aux produits de l'agroalimentaire dont la praticité ne fait plus débat. Certes, les scandales soulevés ces dernières années sur les tromperies et les accidents sanitaires dont furent victimes les consommateurs ont pu entamer le crédit des industriels auprès d'un public plus prompt à condamner qu'à analyser.
Pour de regrettables et certes inexcusables pratiques, combien de réussites susceptibles de faciliter l'adaptation de la restauration au marché en même temps qu'en assurant un accès le plus large possible d'une clientèle dont le pouvoir d'achat connaît actuellement une forte contraction (l'Insee nous l'a confirmé la semaine dernière). Cette situation, combinée avec des prises de positions parfois rigides, exige d'apprécier à sa juste valeur la démultiplication des formes de restauration qui offrent un choix à ce jour inégalé de possibilités de consommation hors domicile. Et valoriser l'une ne nécessite pas forcément d'en dénigrer d'autres. Désolé pour les admirateurs de Victor Hugo, mais la 'bataille d'Hernani' de la restauration n'a pas lieu d'être. Contentons-nous de la sagesse de Paul Bocuse qui a coutume de dire : "Je ne connais que deux cuisines : la bonne et l'autre."
Publié par L. H.