Il arrive parfois qu'un véritable fossé sépare, voire isole, le spa du reste de l'hôtel, et entrave le bon fonctionnement du spa, notamment parce que :
- les spa thérapeutes restent calfeutrées dans leur spa, pour se protéger des équipes des cuisines ou de la réception parfois moqueuses ou railleuses.
- les échanges avec les autres services de l'hôtel sont réduits au strict minimum : trop peu de communication sur les clients, leurs désirs, leur satisfaction (ou non), sur la coordination des plannings (si les rendez-vous spa sont pris par la réception), la facturation, le détail des soins de la carte…
- la nature des soins au spa suscite une relation privilégiée entre les spa thérapeutes et les clients, que ces derniers n'entretiennent pas avec le personnel du restaurant, des étages ou de la réception ;
- l'hôtelier, peu familier avec ces métiers, se retrouve dans une position de dépendance vis-à-vis de l'équipe du spa, qu'il ne parviendrait pas à remplacer au pied levé si celle-ci lui faisait défaut. Conséquence : il est plus souple et conciliant, en particulier sur les horaires, les jours fériés et les dimanches, attitude qui peut créer des sentiments d'inégalité entre les services et susciter des jalousies qui renforcent le cloisonnement des services.
Au-delà d'un climat social tendu entre les équipes, ces situations sont au détriment de la qualité de service et le client finit par ressentir les tensions ou subit les manques de coordinations et les dysfonctionnements.
Quelles en sont les raisons ?
La première cause provient de la formation initiale des équipes : jusqu'à présent, le personnel de l'ensemble des services d'un hôtel (réception, cuisine, salle), provenait d'une école hôtelière. Ils ont tous acquis une même culture du service, une même manière de penser, d'agir, de se comporter. Ils ont appris les valeurs propres à l'hôtellerie : l'accueil, le respect, la retenue, le silence, le calme et la confidentialité. Ils connaissent les contraintes du métier avec des établissements ouverts 24 heures sur 24 heures : des horaires modulables, le travail de nuit, les jours fériés, les dimanches…
Les spa praticiens sont issues des écoles d'esthétique. Elles n'ont pas été sur les mêmes bancs d'écoles, elles n'ont pas été familiarisées à l'univers du luxe, des grands hôtels, du service VIP. Elles restent sur une logique d'esthéticienne, avec des contrats de 35 h, comme si elles travaillaient en institut qui est une unité autonome. La différence avec un spa hôtelier est qu'il n'est qu'un des éléments du complexe hôtelier. Les spas thérapeutes doivent acquérir une vision globale de l'hôtel car au final, c'est globalement que le client aura une vision de son séjour !
Quelles solutions apporter ?
L'objectif principal est de briser la culture de ce métier, sur laquelle chacun campe, pour aller vers une culture d'entreprise, tous conscients alors de leur intérêt à oeuvrer dans la même direction, pour une pleine satisfaction du client, ce qui reste encore le meilleur moyen de lui donner envie de consommer, de revenir et de recommander l'établissement à son entourage.
L'hôtelier devient le chef d'orchestre qui saura créer le lien entre les différentes équipes.
Pour cela, il dispose de plusieurs moyens.
• Faire découvrir le spa aux employés de l'hôtel : il est essentiel, en particulier pour les réceptionnistes, qu'ils connaissent le spa, les soins et les équipements afin qu'ils puissent en parler aux clients. Organiser des visites et des séances de soins, et vous sentirez la différence dans le discours des réceptionnistes !
• Créer des packages touristiques associant : hôtel et spa, restaurant et spa… et ce, pour contraindre les équipes à travailler ensemble, à élaborer des formules, à concevoir de nouveaux menus…
• Montrer aux équipes hôtelières toute la valeur ajoutée qu'apporte le spa à l'hôtel, en terme d'image, de prestige, d'opportunités commerciales, c'est-à-dire reconnaître une véritable place et rôle économique au spa.
• Accueillir le spa praticien en lui faisant visiter l'hôtel, les chambres, le restaurant, le back office et les cuisines…, en lui faire rencontrer le personnel des autres services et surtout, en l'informer explicitement sur les spécificités de l'hôtellerie, en termes de qualité de service, d'accueil, d'horaires, de convention collective…
• Créer des formations à l'intérieur des entreprises, interservices, sur des thématiques transversales : les techniques d'accueil, la gestion de clients difficiles, la gestion d'une équipe…
• Développer des outils CRM en créant des fichiers clients communs à l'hôtel, au restaurant et au spa, dans lesquels seraient renseignés les préférences des clients, les allergies, les incidents éventuels, leurs choix de soins, de chambre…
• Prévoir une réunion inter-service avec les responsables de départements (réception, cuisine, salle, spa, gouvernante…) pour favoriser les échanges, organiser et coordonner chaque service pour des événements (mariage, séminaire…).
Le secret réside dans l'échange et la communication, seuls moyens de se connaître individuellement, de connaître les métiers des autres et d'en comprendre problématiques et contraintes, et de créer un véritable esprit d'équipe.
Si les écoles d'esthétique commencent à éduquer leurs étudiantes à la culture hôtelière, c'est aux hôteliers eux-mêmes qu'incombent la tâche la plus importante : former l'équipe spa, mettre en place une organisation interne impliquant tous les services (réunion, outils CRM…), développer les interactions entre les départements (formation commune, incentive, restaurant du personnel, fête de fin d'année…), et avoir une politique de ressources humaines structurée (entretiens annuels, gestion des conflits personnels, grille d'augmentation des salaires et de primes établie sur des critères clairement énoncés…).
Un lourd travail de management pour créer cette unité mais qui portera ses fruits, sur la satisfaction des clients, et la fréquentation de l'établissement hôtelier.
Publié par Caroline MARCOUX