Ni Thomas Teffri-Chambelland ni Nathaniel Doboin ne sont allergiques au gluten. En ouvrant Chambelland, boulangerie-salon de thé nichée au coeur du village Popincourt à Paris (XIe) en mai dernier, le duo souhaitait surtout proposer "de beaux produits avec de nouvelles céréales", tout en répondant à une demande de plus en plus importante. Tout est parti d'un défi pour Thomas Teffri-Chambelland, biologiste de formation, devenu boulanger pour donner une dimension pratique à son savoir-faire, de mettre au point un pain sans gluten. Depuis 2003, il multiplie les expériences à base de diverses céréales (sarrasin, quinoa, tapioca, millet…) pour trouver une alternative naturelle qui lui permettra de charpenter le pain - avec la farine de blé, le gluten agit comme un liant pour structurer la pâte. Il se tourne vers le riz, moulu dans leur propre moulin près de Manosque (04) à partir de grains sélectionnés en Camargue et en Italie du Nord. "Le pain est traditionnellement lié aux céréales produites dans une région, explique-t-il. Le seigle au nord de l'Europe, le blé plus au sud. Le riz, qui est la céréale la plus produite et la plus consommée au monde, n'a pas encore son pain. Il donne pourtant une farine au doux parfum de paille et de coumarines, qui révèle des arômes insoupçonnés en panification." À partir de celle-ci, il imagine toute une gamme de pains, biscuits et pâtisseries, pétris et cuits sur place au laboratoire, au sous-sol de la boulangerie.
Espace dégustation
Le lieu accueille également un espace dégustation ouvert pendant les horaires de la boutique, où il est possible de goûter les pains et pâtisseries, ainsi qu'une gamme restreinte de sandwichs, salades et soupes préparés au gré de l'inspiration du jour.
Cette proposition alternative n'a pas manqué de taper dans le palais de restaurateurs, dont Alain Ducasse, qui n'a pas tardé à mettre à la table du Meurice et du Plaza Athénée les pains Chambelland. "Nous commençons à nouer des relations avec les chefs, il y a des choses à faire mais nous voulons rester dans le très qualitatif et pointu. On nous a par exemple demandé de faire des buns mais nous avons refusé. Nous ne sommes pas dans une logique de production intensive, nous voulons garder une qualité optimale", explique Nathaniel. Pour l'heure, la clientèle semble conquise et pas que chez les personnes sensibles au gluten : "La moitié de notre clientèle n'est pas du tout intolérante, ce sont des gourmets qui s'intéressent à de nouvelles propositions."
Publié par Julie GERBET