Cabinets de conseil : à quoi servent-ils vraiment ?

Paris (75) Le conseil en hôtellerie et en restauration a le vent en poupe. Du grand groupe jusqu’à l’autoentrepreneur, tous les profils d’experts et de consultants existent. Mais quelle est leur réelle valeur ajoutée ? Quel type d’accompagnement proposent-ils ? Faut-il se laisser tenter ?

Publié le 21 mai 2024 à 11:00

“J’estime à plus de 800, le nombre de nouveaux consultants et intervenants en freelance dans le secteur de l’hôtellerie-restauration”, lance Mark Watkins, le fondateur du cabinet Coach Omnium. Il vient de publier une étude sur cet “avènement” des “experts indépendants” dans le domaine des CHR. “En 1991, lorsque j’ai créé mon entreprise, nous n’étions qu’une poignée de structures dans le conseil en hôtellerie-restauration et encore moins en freelance”, confie-t-il. Explication du phénomène : “Le Covid est passé par là, l’envie de changer de métier et de s’épanouir en solo aussi, souvent sous un statut d’autoentrepreneur.” Ces nouveaux venus s’installent dans un paysage qui compte déjà beaucoup d’experts en la matière. À commencer par les cabinets de référence pour leurs analyses du marché et des tendances - citons notamment la branche hôtellerie-restauration de KPMG ou encore MKG Consulting… -, ainsi que les départements audit et consulting de groupes tels qu’Evok Collection ou encore Paris Society.

 

“Une stratégie sur mesure, grâce à une approche à 360°”

“Depuis 2018, nous accompagnons nos clients, soit dans une logique de création d’établissement, soit dans la métamorphose d’un lieu déjà existant”, détaille Hakim Belkacem, directeur du pôle consulting du groupe Paris Society. Ce que l’on vient chercher auprès de l’entité qu’il représente ? Une expertise de terrain, aussi bien dans l’hôtellerie que pour le F&B. D’aucuns parlent de “légitimité” et de “savoir-faire”. À cela s’ajoute “une stratégie sur mesure, grâce à une approche à 360°. Le point de départ réside dans la faisabilité du projet, avec une étude de marché, un audit de l’existant, puis la définition d’une stratégie adaptée et du positionnement”, reprend Hakim Belkacem. Suivent une phase dite créative - avec “rédaction du concept, construction du storytelling et de la direction artistique” -, puis une autre dédiée au déploiement - avec “suivi des travaux, choix des arts de la table, du menu, des uniformes, développement de la signature olfactive, appropriation du concept par les équipes avant et après l’ouverture”. Du clé en main qui a un coût. “Nos tarifs varient en fonction de la mission et de sa complexité. Il faut les appréhender comme un investissement en savoir et savoir-faire. Ce qui représente un gain de temps précieux pour le porteur de projet”, souligne Hakim Belkacem. Mark Watkins, lui aussi, évoque ce temps gagné à ne pas chercher de fournisseurs, d’architectes d’intérieur, d’agenceurs… Mais cela suffit-il pour convaincre de casser sa tirelire ? Oui, si l’on méconnaît le secteur de l’hospitalité et ses rouages. Cela se discute davantage pour un hôtelier ou un restaurateur en quête de renouveau mais déjà bien positionné sur le terrain, comme sur les réseaux sociaux.

 

“Le bon business plan pour le bon client”

Certes, le conseil peut guider et rassurer. Surtout un hôtelier ou un restaurateur indépendant ou dépourvu de l’accompagnement d’une franchise. “Mais n’est pas conseiller qui veut”, nuance Isabelle Maffre. L’experte en design hôtelier, également directrice du studio Air & D, alerte : “L’hôtel comme le restaurant sont des objets complexes. Il ne faut pas se tromper d’interlocuteur. Son credo : “Savoir créer le bon produit et le bon business plan pour le bon client.” Elle parle aussi de relation de confiance, d’agilité et de capacité à s’adapter à une mission au long cours - sur plusieurs années - comme à une “mission commando” d’un mois, “par exemple, pour mettre en place une offre de restauration dans un aéroport”. Elle ajoute : “Aujourd’hui, l’hôtelier ou le restaurateur recherche du personnalisé, du sur mesure, un ancrage territorial fort, mais aussi une certaine autonomie par rapport à des groupes, ainsi qu’une liberté d’action et de choix.”

“Gare aux études de complaisance”, prévient pour sa part Mark Watkins. En particulier pour des projets hors de Paris, “car souvent plus difficiles à rentabiliser”. “Gare aussi aux fausses promesses”, poursuit-il. Là, il cite volontiers en exemple le cas d’une brasserie lilloise un brin désuète - avec bois, poutres… -, qu’un consultant a préconisé de rénover avec de l’inox et du blanc partout. Résultat : en six mois, l’établissement a perdu une bonne partie de sa clientèle, qu’il a retrouvée après avoir tout refait à l’ancienne. “Nous sommes régulièrement sollicités pour des contre-expertises de propositions de cabinets de conseil”, reconnaît le fondateur de Coach Omnium. Le cas de la brasserie lilloise fait partie de ces sollicitations. Preuve qu’il n’est pas toujours opportun de tout casser, panser et repenser pour booster un chiffre d’affaires. Un cabinet de conseil doit être capable de le diagnostiquer aussi et d’ajuster sa copie en ce sens.


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Publié par Anne EVEILLARD



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