Le 23 septembre 2017, les 5 ordonnances réformant le code du travail ont été publiées au Journal officiel. Elles renforcent le principe de la négociation collective au sein de l'entreprise en instaurant une nouvelle organisation du dialogue social. Elles sécurisent, en outre, les relations au travail en instaurant un barème des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, simplifient les procédures de licenciement et réduisent les délais de recours en cas de licenciement à 12 mois. Un peu moins d'un an après leur parution, le ministère du Travail a présenté les premiers résultats enregistrés par les services de l'État sur la mise en oeuvre de ces ordonnances.
Fusion des instances du personnel avec le CSE
Les employeurs ont jusqu'au 31 décembre 2019 pour fusionner les instances représentatives du personnel. Les délégués du personnel (DP), le comité d'entreprise (CE) et le comité d'hygiène, santé et sécurité au travail (CHSCT) laisseront place au comité social et économique (CSE).
Le ministère constate dès à présent que le comité social et économique prend peu à peu place dans les entreprises. Entre le 1er janvier et le 31 juillet 2018, 8 814 CSE ont été installés, dont 4 848 dans des entreprises de moins de 50 salariés. Suite à cette fusion, le nombre de mandats de délégué du personnel est passé de 36 000 sièges à 24 000, soit 33 % en moins.
Rupture conventionnelle collective
La rupture conventionnelle collective (RCC) est l'une des nouveautés des ordonnances. Les entreprises peuvent négocier un mécanisme de départ volontaire collectif sécurisé et validé par l'administration. Surtout, la RCC évite aux entreprises de basculer dans le régime du licenciement collectif pour motif économique.
Au 31 juillet 2018, 66 entreprises se sont engagées dans la négociation d'un accord, 37 ont obtenu l'homologation et 11 n'ont pas abouti à un accord. Si 4 accords ont fait l'objet d'un refus d'homologation par l'administration, 3 d'entre eux ont été suivis d'une reprise de la négociation à l'initiative de l'employeur et ont finalement donné lieu à une homologation.
Pour le ministère, ces refus et ces homologations illustrent la réalité du contrôle exercé par l'administration et sa capacité à orienter la négociation. Dans le même temps, les plans sociaux (PSE) ont chuté en passant de 370 à 280 sur les 7 premiers mois de l'année.
Plus de négociations sociales dans les TPE
Le gouvernement souhaitait faciliter la négociation sociale dans les petites entreprises dépourvues de délégué syndical (DS).
Les ordonnances autorisent les entreprises de moins de 11 salariés à négocier un accord avec les salariés en utilisant le référendum. Pour que l'accord soit validé, il faut qu'il soit adopté par les 2/3 du personnel alors et non plus passer par un salarié mandaté par une organisation syndicale. Les entreprises de 11 à 20 salariés qui n'ont pas d'élus (mais un PV de carence) peuvent établir un accord social selon les mêmes modalités que les TPE. Quant aux entreprises de plus de 11 à moins de 50 salariés, elles peuvent négocier de deux manières différentes : soit avec un ou plusieurs salariés mandatés par un syndicat représentatif au niveau de la branche, soit avec un ou plusieurs représentants du personnel (membres élus du CSE ou DS).
Pour le moment, 364 accords ont été conclus dans le cadre de la consultation directe par référendum dans les entreprises de moins de 20 salariés, 90 % de ces accords portant sur la rémunération et l'organisation du temps de travail. Par ailleurs, 582 accords ont été négociés et signés avec des représentants du personnel non mandatés dans les entreprises de 20 à 50 salariés.
Pour le ministère, ces résultants sont encourageants, même si peu de branches ont mis en place des accords-types pouvant être déclinés dans les petites entreprises.
Moins de litiges aux prud'hommes
Le ministère constate une diminution des recours devant les prud'hommes : 127 000 contentieux ont été enregistrés en 2017, contre 150 000 en 2016, ce qui représente une baisse de 15 %.
Pour le ministère, cette baisse s'explique par le fait que salariés et employeurs discutent beaucoup plus avant d'introduire un recours. Le comité d'évaluation des ordonnances devra déterminer quel pourcentage de la baisse est du à l'entrée en vigueur du barème des indemnités prud'hommales.
Une tendance déjà engagée
Le rôle effectif joué par les nouvelles mesures des ordonnances est encore difficile à déterminer, d'autant que le barème ne s'est appliqué que durant trois mois en 2017. La chute des recours devant les prud'hommes n'est pas nouvelle. Elle a commencé dès 2008 avec la création de la rupture conventionnelle. Conformément au dicton "un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès", cette procédure permet à l'employeur et au salarié de rompre le contrat de travail engagé, moyennant le versement d'indemnité de licenciement, avec un délai de contestation de la rupture limité à 12 mois. En 2017, le nombre de ruptures conventionnelles a atteint un niveau record avec 420 900 ruptures homologuées, soit une hausse de 7,8 % par rapport à 2016.
Autre événement ayant entraîné la diminution des affaires portées devant le conseil des prud'hommes : la loi Macron du 6 août 2015 qui a introduit plus de formalités pour saisir cette instance. Le demandeur doit utiliser un formulaire Cerfa, déposer un dossier complet (fiche de paie, contrat de travail, lettre de licenciement) et motiver sa requête. Procédure qui a refroidi de nombreux salariés qui se représentaient seuls, sans le recours d'un avocat. Bilan : entre 2015 et 2016, le nombre d'affaires nouvelles est passé de 184 000 à 150 000, ce qui a entraîné une baisse des recours de l'ordre de 18 %.
Publié par Pascale CARBILLET