Raphaël Haumont est enseignant-chercheur en chimie à l'université Paris Sud (91). Il associe sciences et gastronomie en appliquant sa compréhension des mécanismes physiques et chimiques à la cuisine. "La physique permet de comprendre les températures et les durées de cuisson, comment obtenir telle ou telle texture, il s'agit de maîtriser les principes physiques pour qu'ensuite les chefs puissent laisser parler leur créativité pour créer de nouveaux plats." Démonstration à l'appui, en quelques secondes, il cuit à froid avec de l'azote liquide un oeuf et démontre l'intérêt d'une maîtrise parfaite des températures de cuisson pour une texture qui pourrait être adaptée au souhait et au goût du client. Il poursuit en proposant un spaghetti de framboise, gélifié avec de l'agar-agar, moins calorique et moins cher que la gélatine alimentaire, et qui tient à température ambiante. Ou encore, il confectionne des billes à la framboise qui permettent de proposer un kir aux saveurs dissociées, avec des billes qui éclatent en bouche, sans dénaturer le goût du Champagne. Les déclinaisons sont infinies pour des chefs à l'imagination débordante.
Grâce à la chimie, l'aliment devient contenant comestible
Grâce à la maîtrise des principes physiques, Raphaël Haumont crée des contenants comestibles pour des plats visuellement originaux et une véritable expérience gustative. Par exemple, une coque de café est réalisée avec du café liquide placé dans un ballon plongé dans de l'azote. La coque de café devient contenant en recevant à l'intérieur de la chantilly, un expresso chaud est versé dessus, pour un café frappé inédit et surprenant. "C'est une façon de respecter le goût original et la qualité du produit sans le dénaturer, de proposer différentes dégustations possibles ainsi qu'un jeu entre les différentes températures et textures du plat." Ou encore des 'cocktails à manger', un daikiri-passion par exemple qu'il a gélifié avec de l'agar-agar pour être mangé à la petite cuillère. Il ne voit pas la cuisine moléculaire comme un conflit entre la cuisine traditionnelle et la cuisine innovante mais plutôt une continuité.
Un Centre français d'innovation culinaire
Raphaël Haumont et Thierry Marx viennent d'accueillir la première promotion d'étudiants en licence de chimie qui suivent leur option au Centre français d'innovation culinaire à l'université de Paris Sud. "Ce lieu de recherche et de formation se veut comme une passerelle entre le monde universitaire, réputé pour être centré sur la recherche, et le monde de l'artisanat. La cuisine est un moyen de vulgariser les recherches scientifiques auprès du grand public, c'est de la chimie appliquée." Raphaël Haumont et Thierry Marx ont réuni leurs connaissances pratiques dans Le Répertoire de la cuisine innovante publié chez Flammarion et qui fait un état des lieux des nouvelles techniques de cuisine et innovations culinaires.
Publié par Marie TABACCHI