L'Hôtellerie Restauration : Pourquoi est-il essentiel pour l'acquéreur d'un fonds de commerce de s'inquiéter, avant l'acquisition, de sa conformité aux normes d'accessibilité ?
Frédéric Talmon : Depuis 2015, tous les établissements recevant du public [ERP]
doivent être accessibles aux personnes handicapées, mais, évidemment, tous ne le sont pas encore. Pour les ERP situés
dans un immeuble déjà construit, comme c'est le cas pour la
majorité des fonds de commerce CHR, la mise en accessibilité peut
être très onéreuse ou très compliquée à mettre en oeuvre.
Vérifier avant l'acquisition ce qui est aux normes permettra à
l'acquéreur d'anticiper le coût d'éventuels travaux
à effectuer.
En
cas d'irrégularité, des sanctions administratives sont prévues,
pouvant aller jusqu'à la fermeture du commerce. Il y a aussi des
sanctions pénales, notamment une amende - de 45 000 €
au maximum pour une personne physique et de 225 000 € pour une personne
morale - et une peine de prison en cas de récidive.
Quels
documents l'acquéreur peut-il exiger du vendeur pour s'assurer que
le fonds est aux normes ?
Dès
qu'il y a des travaux, il y a une vérification en amont (au stade
de l'autorisation de travaux ou du permis de construire) et en aval
par une attestation d'accessibilité, qui doit être transmise à
la préfecture. Normalement, le propriétaire d'un établissement aux
normes a déjà transmis à la préfecture une attestation
d'accessibilité, établie selon un modèle Cerfa
et comportant un certain nombre de documents justifiant des travaux
réalisés.
Si le fonds est aux normes, le vendeur doit donc être en mesure de
justifier du dépôt de cette attestation à l'acquéreur.
Attention : ce dépôt n'est pas forcément une garantie,
notamment pour les ERP de 5e
catégorie, qui sont dispensés de justifier des travaux réalisés
par remise d'une attestation sur l'honneur de l'exploitant. En
ce cas, il est recommandé de faire vérifier la situation par un
professionnel de la mise en accessibilité.
Si
le fonds n'est pas aux normes et que l'exploitant a déposé un
dossier Ad'Ap par lequel il s'engage
à
réaliser des travaux dans les trois ans, que doit faire l'acquéreur ?
En
principe, le dossier AD'AP est nominatif. L'acquéreur d'un fonds de commerce qui n'est pas accessible devra donc déposer un
nouveau dossier Ad'Ap, même si son contenu est identique à celui
déjà déposé par le vendeur. Il déposera son dossier en retard,
puisque la date limite était celle du 27 septembre 2015, mais il
aura un motif légitime étant donné qu'il n'était pas propriétaire du
fonds. Le dépôt du dossier Ad'Ap permet d'éviter l'application
des sanctions rappelées plus haut. Il
est aussi recommandé d'étudier le bail pour vérifier qui doit
réaliser les travaux : le bailleur ou le locataire.
Si
la vente se fait par l'intermédiaire d'une agence spécialisée en
cession de fonds de commerce, celle-ci engage-t-elle sa responsabilité si
elle ne s'assure pas elle-même que le fonds cédé est aux normes ou
que l'exploitant a effectué les démarches ?
L'intermédiaire
dans la cession de fonds de commerce est tenu d'une obligation
d'information et de conseil à l'égard des deux parties, même
s'il n'a signé un mandat qu'avec une seule. À ce titre, il
doit attirer l'attention de l'acquéreur sur la conformité de
l'ERP à l'ensemble des normes administratives, dont
l'accessibilité aux personnes handicapées, et demander les documents
concernant les ERP: déclaration d'activité auprès de la mairie,
arrêté d'ouverture, conformité à la règlementation incendie et
accessibilité... Ces obligations concernent également
le rédacteur de l'acte : dans l'acte, la situation du fonds
doit être vérifiée et expliquée. En cas de problème, l'acquéreur
pourra se retourner contre l'intermédiaire et le rédacteur de
l'acte.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON
vendredi 12 février 2016
vendredi 12 février 2016
lundi 18 janvier 2016