En 2012 pourtant, Dominique Dubray n'est pas disponible. L'homme rentre à Paris et poursuit sa mission. Mais l'échappée auvergnate l'a marqué, presque déjà happé. Quand, en 2014, Gérard Klein l'approche à nouveau, Dominique Dubray ne se fait pas prier. Reste à déterminer les conditions de la reprise. Car le chef de cuisine a de l'expérience et maîtrise les impératifs de gestion. Après ses débuts au piano de maisons étoilées (Collonges au Mont-d'Or sous Paul Bocuse, Hôtel Gray d'Albion sous Jacques Chibois, hôtel Trianon Palace sous Jean-Jacques Matou et Gérard Vié, Le Pré Catelan à l'époque de Roland Durand....), il a exploité La Cuisine bourgeoise à Versailles dans les années 1990. Pas question de trop s'endetter. À 52 ans, il ne veut pas s'épuiser à la tâche. Plutôt s'épanouir. Certes, après avoir travaillé au rythme trépidant des événements de luxe à Monaco, Marbella, Casablanca pour Lenôtre ou à Paris pour l'ouverture du Montaigne, s'installer au coeur d'un terroir riche, authentique et paisible constitue une perspective séduisante. Mais pas à n'importe quel prix. Les deux hommes conviennent d'une location gérance avec engagement d'achat au bout de trois ans. Parmi les avantages de cette reprise en deux étapes : un prix de cession de fonds figé qui ne subit pas d'augmentation de valeur liée à l'exploitation réussie par le locataire-gérant, et du temps pour prendre ses marques, rentabiliser les bilans et bien préparer la reprise.
Achat du fonds après deux bilans positifs
En 2014, donc, Dominique Dubray s'installe, accompagné d'un maître d'hôtel parisien et d'un second de cuisine, puis s'entoure d'une équipe issue des alentours dont l'effectif s'adapte au gré de l'activité et s'étire de cinq à quinze employés, tout comme les jours d'ouverture (sept jours sur sept en haute saison contre cinq sur sept en période creuse, sans compter la fermeture hivernale de cinq semaines). Côté menu, le chef privilégie les producteurs locaux pour fonctionner en circuit-court et cuisiner les produits les plus frais possible. Une exploitation réussie qui dégage des bilans positifs. Des ingrédients qui lui permettent, trois ans plus tard de décrocher un crédit. "Les bilans positifs, l'expérience, et le dynamisme avec lequel Dominique a su développer La Bougnate lui ont permis d'emprunter la quasi-totalité du prix du fonds", explique Jérôme Pouce, de CrediPro Clermont-Ferrand, qui a cru au projet. Pas évident pourtant. "Avec un apport minime constitué de ses économies personnelles et d'un prêt brasseur, le dossier est passé notamment à des marges bien tenues, et un bilan qui démontrait que le projet était viable", poursuit le spécialiste en financement professionnel.
Au plan juridique, Dominique Dubray a opté pour la SAS, qui lui garantit la continuité du statut de salarié et des cotisations retraite.
En 2017, donc, même si Gérard Klein reste propriétaire des murs constitués de deux bâtiments anciens qui se font face au détour d'une route de village, Dominique Dubray est officiellement le nouveau propriétaire de La Bougnate : au total douze chambres, 20 à 60 couverts, deux terrasses, une bibliothèque, une salle de séminaire et de réception, un restaurant et un bar, dont les pièces arborent parquets, dalles anciennes et plafonds à la française ou poutres apparentes. Un bel ensemble dont certaines pièces seront bientôt rénovées grâce à un crédit complémentaire qu'il va solliciter via le crowdfunding, avec l'aide de son courtier.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON