Plus de deux cents Maîtres cuisiniers de France s'étaient rassemblés à Lyon les 18 et 19 mars derniers, pour la 59e édition du congrès de leur association. Le programme prévu était dense : une séance de travail à la Cité internationale, un déjeuner à l'Abbaye Paul Bocuse, un dîner de gala à l'hôtel de ville et une journée d'échanges.
"C'est un très grand bonheur d'accueillir le Congrès des Maîtres cuisiniers de France. Votre association est le porte-étendard de la gastronomie française dans le monde. Être intronisé dans cette prestigieuse famille, c'est devenir ambassadeur de ces arts culinaires français qui contribuent si fortement au rayonnement de notre pays." En quelques mots de bienvenue en prélude aux intronisations et au dîner de gala, le 18 mars dans l'Atrium de l'hôtel de ville, Gérard Collomb, sénateur-maire de Lyon, a tout dit ou presque. Il synthétise l'importance de ce rendez-vous annuel en soulignant que "nous sommes à Lyon dans une cité de la gastronomie qui sait ce qu'elle doit au génie de ses cuisiniers, de ses mères lyonnaises, aux talents d'aujourd'hui", et en rendant hommage "à celui qui incarne la gastronomie française aux quatre coins de la planète, Paul Bocuse, et tous ceux qui dans son sillage portent les valeurs de la cuisine française, oeuvrent tous les jours à sa diffusion, à son excellence et à sa renommée".
Et lorsque, un à un, les 28 nouveaux Maîtres cuisiniers de France - dont deux femmes, Babette Lefebvre et Anne-Sophie Pic - sont appelés sur l'estrade pour être intronisés, l'émotion est palpable. "C'est un grand moment en clôture d'un bon congrès où nous avons réaffirmé l'importance de garantir un savoir-faire culinaire", affirme Christian Têtedoie, Lyonnais de coeur et président d'une association fédérant désormais plus de 300 membres, dont un tiers d'entre eux exercent leur talent culinaire à l'étranger.
Plus de visibilité pour les femmes
"C'est un beau congrès et c'est particulièrement intéressant que la profession arrive à se mobiliser autour d'idées communes, ce qui n'est pas le cas partout", admet Georges Paccard, chef et propriétaire de La Ciboulette à Annecy. À l'évidence, aucun ne regrette son déplacement dans la 'capitale des Gueules', où Paul Bocuse, hôte de marque du congrès, a provoqué une émotion évidente dans l'assistance lorsqu'il a pris la parole. "C'est une bonne chose que de s'ouvrir aux cuisines du monde tout en restant locavore. De faire évoluer le métier tout en restant fidèle à la formation et à la transmission qui sont primordiales", martèle Christian Têtedoie. Il a également annoncé l'organisation le 8 avril prochain du premier Forum des producteurs, au palais Brongniart à Paris (IIe), pour le grand public et les écoles hôtelières.
Par ailleurs, le président de l'association souhaite que les femmes jouent un rôle non négligeable au sein des Maîtres cuisiniers de France. Babette Lefebvre, La Cambuse à Strasbourg, concède : "J'ai été ovationnée lorsque l'on m'a présentée et j'avoue que j'étais un peu gênée, mais sans doute était-il important de souligner l'arrivée de femmes au sein des Maîtres cuisiniers de France. (…) Nombre d'entre nous sont autodidactes et ne bénéficient pas de certains réseaux d'influence construits dans les écoles hôtelières ou en cuisine. Il est donc important pour nous d'adhérer à ce genre d'association d'excellence, de partage, de solidarité et d'amitié, pour obtenir une indispensable visibilité." Anne-Sophie Pic, elle aussi fraîchement intronisée, ne dit pas autre chose. Par vidéo, elle affirme : "Les femmes ont un apport indéniable dans les brigades et ensemble nous pouvons aller plus loin, en regardant dans la même direction".
"Ce discours me fait du bien, relève Christian Têtedoie. Nous devons nous rassembler, transmettre notre savoir, donner envie aux jeunes de faire ce beau métier." Les applaudissements nourris de l'auditoire à ces propos montrent qu'il est sur la bonne direction : celle qui mène à une 'fédération' de la cuisine française.
Publié par Jean-François MESPLÈDE