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Depuis plusieurs mois, de nombreux articles encouragent les restaurateurs à ‘profiter’ de la crise pour en sortir plus forts et plus résilients. Nous savons à quel point ces conseils peuvent paraître hors sujet lorsqu’on se bat pour sa survie mais je suis convaincu qu’après le premier confinement, beaucoup de professionnels ont compris à quel point une crise est un accélérateur de transformation.
Se projeter dans l’avenir peut aussi aider à mieux supporter le présent. L’observation des pratiques depuis le début de la crise mais aussi la connaissance des points faibles récurrents de beaucoup d’établissements me conduisent à proposer quatre axes de progrès.
Créer ou entretenir la relation client
Je suis étonné de la disproportion entre les très nombreux messages que je reçois des groupes hôteliers et le petit nombre de messages reçus des restaurants qu’il m’arrive de fréquenter. Certes, pour réserver un hôtel, il faut donner son e-mail, mais les restaurateurs n’ont pas utilisé tous les moyens pour collecter des données sur les clients et n’ont pas suffisamment pris la mesure de la force de la communication digitale pour nouer une relation durable avec ses clients. Ils pourraient par exemple collecter l’adresse e-mail de leurs clients lors de la réservation ou du paiement, en déposant un questionnaire de satisfaction sur la table, lors de la participation à un jeu…
Les restaurateurs qui ont les moyens de communiquer en permanence avec leur clientèle ont pu pendant cette période :
- informer les clients de leurs offres alternatives : restauration à emporter ou livrée… ;
- les rassurer sur les mesures sanitaires mises en place ;
- les informer des réouvertures et des promotions prévues à cette occasion ;
- les encourager à soutenir leurs restaurants préférés en leur proposant d’offrir des bons cadeaux, par exemple.
Ceux qui n’avaient aucun moyen d’entretenir une relation avec leurs clients risquent d’avoir disparu des radars… Il est vrai que collecter, saisir et utiliser ces données demande du temps et une certaine technicité mais les avantages dépassent largement le coût de la mise en place d’une gestion de la relation client. À condition de bien choisir son prestataire, la sous-traitance peut aussi être une solution.
Tirer les leçons de l’expérience pour repenser l’offre
Beaucoup de restaurateurs ont été contraints de réinventer leur offre et les process associés pour proposer des ventes à emporter et/ou satisfaire aux règles de distanciation. Ils ont dû le faire dans un contexte où la productivité était essentielle pour limiter les coûts. Il faut capitaliser sur cette expérience pour simplifier, épurer, rationaliser le concept et améliorer l’organisation du travail. Chacun sait que le ratio personnel est compris entre 30 et 40 %. Je montre dans le SOS Experts Gestion en CHR : outils pratiques quels sont les facteurs qui agissent sur ce ratio. Il y a le coût salarial et les charges mais aussi le concept, l’organisation du travail et le management.
Ce qui paraissait impossible avant la crise par manque de temps ou par la force des habitudes est réalisable aujourd’hui : procéder au re-engineering du concept et des méthodes, autrement dit tout remettre à plat :
• Concept :
- simplifier, épurer l’offre, réduire le nombre de denrées en stock et le nombre de fournisseurs ;
- choisir de pérenniser ou pas une offre de vente à emporter.
• Organisation du travail : en cuisine du fait de la simplification, en salle du fait du sans contact obligé…
• Management : les équipes doivent être pleinement impliquées dans la redéfinition du concept et des méthodes de travail. La crise crée de nouvelles solidarités dont il faut profiter.
Auditer l’ensemble des coûts d’exploitation
Voilà un travail qu’il faudrait faire régulièrement comme je le préconise dans le SOS Experts Gestion en CHR : outils pratiques . En période de crise, les grandes entreprises considèrent que la réduction des frais généraux est une priorité absolue. L’examen ligne par ligne des charges peut se faire en utilisant la méthode suivante :
Je propose de distinguer les dépenses liées à l’activité que l’on appelle ‘coûts variables’ et les coûts fixes. Pour piloter les dépenses liées à l’activité, la mise en place de normes de consommation est indispensable, par les coûts fixes, la méthode d’audit régulier est la plus efficace.
Valoriser et impliquer les équipes
Mes expériences de client dans les hôtels et les restaurants entre les deux confinements m’ont montré à quel point les équipes ont besoin d’être rassurées et valorisées. Cette période est déstabilisante par le danger que représente le contact avec la clientèle mais aussi du fait du changement d’organisation qui a été rendu nécessaire par l’évolution de l’offre et le respect des règles de distanciation.
Le personnel doit être rassuré par rapport aux risques et, autant que possible, il doit l’être sur l’avenir de l’entreprise. Je préconise un management à livres ouverts, à savoir les livres comptables. De plus en plus d’employés comprennent un compte de résultat. Il ne faut pas hésiter à leur présenter les effets de la crise sur celui de leur établissement… Valoriser et impliquer les équipes, c’est aussi les associer de bout en bout à la remise à plat du concept et des méthodes évoquée plus haut.
La diversité de nos restaurants est immense et fait la richesse de ce secteur. Les restaurants sont un symbole de notre mode de vie et un attrait considérable pour la destination France. J’espère que ma modeste contribution aidera le plus grand nombre à sortir plus fort de la crise.
Publié par Jean-Claude Oulé