Véronique Vigne est une professionnelle comblée qui conjugue ses deux passions : les arts de la table et du service et la transmission de son savoir. Elle a été la première femme à obtenir, en 2004, le titre de Meilleur ouvrier de France dans la catégorie maître d'hôtel, du service et des arts de la table. Cette femme de caractère, qui a passé douze ans dans le métier, est professeur de restaurant depuis bientôt vingt-deux ans (et nouvellement au lycée des métiers François Mitterrand à Château-Chinon, 58). C'est le doute qui l'a poussée à tenter le prestigieux concours. "J'ai souvent entendu qu'à force d'enseigner, nous n'étions plus dans le coup, explique-t-elle. Cela a fini par me tracasser. J'y ai cru." La préparation du concours n'a pas été une sinécure. "La tâche n'était pas facile, avoue Véronique Vigne. Ce sont des heures et des heures de travail. Dès mon inscription, j'ai établi un planning sur deux ans. Et, chaque soir, je ne me couchais pas tant que je n'avais pas appris quelque chose de nouveau. Il faut savoir mettre sa vie privée entre parenthèses". Une remise en question qui a été bénéfique. Cette distinction était aussi une façon de se faire entendre. "Le fait d'être une femme m'a empêché d'avoir accès aux grandes maisons. Ce sont souvent les hommes qui avaient les postes à responsabilité. Les choses changent. Je l'espère...", lâche-t-elle.
Une passion intacte
Véronique Vigne se souvient encore de ses moindres faits et gestes face au juré Olivier Poussier, lors de l'épreuve de l'argumentation commerciale. "Je décrivais un vin, j'étais vraiment dedans. Je ne pouvais plus m'arrêter : loi, histoire, produit, accords, etc. Et là, Olivier Poussier me dit exactement l'appellation, sans que je la lui aie donnée, signe que j'avais réussi à bien parler de ce vin. Ce fut un détonateur. Et un très grand moment de bonheur." Depuis, elle continue à accroître ses connaissances en fonction de son planning : à travers des stages et des formations (chez Philippe Faure-Brac, à l'École du goût, l'École de la distillerie, etc). Face à ses élèves, Véronique Vigne est animée de la même passion que celle qui l'habite en salle. "Il y a tellement de choses à apprendre dans ce métier : boissons, alcools, produits, mets. Il y a aussi une facette psychologique dans notre métier : décrypter un client à son comportement, savoir s'il est plutôt timide, décontracté... Mais on ne nous voit pas comme tels. Il faut avoir la fibre, une âme. Il est inimaginable de croire encore à la caricature du serveur porteur d'assiettes. Le service en salle, c'est un métier à part entière."
Publié par Hélène BINET