"Si vous ne nous versez pas 1 900 € dans les 48 heures, nous détruisons ta notoriété sur le web." Voilà le message que Véronique Vermeulen, gérante de la Mer du Nord à Bruxelles, découvre sur son e-mail, un lundi matin, jour de congé. "Le message donne une adresse e-mail pour payer en bitcoins [la monnaie électronique, NDLR]. Il indique aussi qu'ils vont tout faire pour détruire notre commerce en postant des centaines de mauvais avis sur les sites comme Tripadvisor et sur les forums touristiques et gastronomiques, tout en éliminant notre site web de Google Search", explique la responsable. Le message précise aussi que "ce n'est pas une fausse alerte, nous sommes bien préparés".
Le choc passé, Véronique Vermeulen et son mari ont le réflexe d'appeler directement leur avocat, qui prend la menace très au sérieux. Tout en déposant plainte auprès des services de police et de l'unité de cybercrime, il conseille aux dirigeants de médiatiser l'affaire, et de ne surtout pas payer. La télé bruxelloise arrive la première et l'emballement médiatique est immédiat dans la capitale belge, du côté flamand comme wallon.
"On veut continuer à travailler pour donner le meilleur"
"On ne peut pas laisser faire ça. Il faut le dénoncer. Il doit y avoir d'autres petits commerçants qui en ont été victimes." L'expéditeur signe son message en se disant être "une branche du groupe Rex Mundi". Il s'agit de pirates informatiques qui font chanter les entreprises en interceptant leurs données les plus sensibles contre rançon. La Belgique était le premier pays visé, à travers des entreprises plus grandes : des banques, des assureurs, des sociétés d'intérim, mais aussi des chaînes de restauration rapide comme Domino's Pizza. "Les grands groupes ont du pouvoir, des services juridiques et le budget pour se défendre. Nous, les petits, on n'a rien de tout cela et et garantir la qualité", soupire la gérante de La Mer du Nord. Une première attaque a eu lieu en France, chez un laboratoire d'analyse médicale, en mars dernier, où les pirates menaçaient de rendre public les résultats sanguins de tous les patients.
La face sombre d'internet
Pour autant, Véronique Vermeulen ne veut pas céder au stress. Il ne s'est rien passé de négatif à propos de son restaurant sur internet depuis la fin du délai imparti. Les clients du bar à poisson, des fidèles pour plus de 80 %, se sont mobilisés sur internet pour défendre leur restaurant. Mais la gérante s'interroge : à part médiatiser, quelle est la marge d'action ? "On ne peut rien faire contre internet, constate-t-elle. Mais ce genre de menaces sur la notoriété, avec l'anonymat des avis donnés sur les sites, remet aussi en cause leur crédibilité et l'ensemble du système internet", ajoute-t-elle, lucide. Elle a décidé d'aller de l'avant et de lancer un nouveau défi : développer le concept de bar à poissons version Mer du Nord en franchise en France. Trois touches dont déjà en cours.
Publié par Emmanuelle COUTURIER