"Pour moi, l'apprentissage reste la meilleure formation du monde", insiste Henri Delcros. Cet amoureux de la tradition est par ailleurs un baroudeur dans l'âme, qui a passé l'essentiel de sa carrière en voyage après avoir ouvert un autre restaurant à Perpignan - et y avoir retrouvé son étoile. D'Atlanta à Canon Drive, où se bousculent les stars d'Hollywood, le bouillonnant chef catalan a ainsi parcouru les États-Unis pendant plus de deux décennies avant de rentrer en France pour de reprendre l'hôtel-restaurant familial du Clos des pins à Canet-en-Roussillon, dans les Pyrénées-Orientales. Jusqu'à revendre l'affaire et prendre sa retraite en 2012.
"Rendre ce que l'on m'avait donné quand j'étais jeune"
Mais à près de 65 ans, Henri Delcros a décidé de sortir de sa retraite pour monter la carte et diriger les cuisines du restaurant de L'Hôtel du cèdre de Port-Vendres (Pyrénées-Orientales), au grand soulagement du propriétaire, Xavier Mahaux, qui a pu ainsi entamer dans les meilleures conditions sa saison estivale. " J'ai accepté tout de suite d'assurer cette saison dans ce restaurant, parce que j'avais les mains libres et que je pouvais travailler comme je l'entendais avec une bonne brigade de jeunes, précise Henri Delcros. Et puis c'était également une manière de rendre ce que l'on m'avait donné quand j'étais jeune moi-même." Il n'aura pas fallu plus de deux semaines pour former "à l'ancienne" une équipe composée d'un stagiaire, un apprenti et un commis. Le partage des tâches était clair : que chacun assume scrupuleusement les responsabilités définies au départ. Une organisation très traditionnelle pour une carte qui ne l'est pas moins, avec sa Bisque de langoustines, son Magret de canard aux figues et son Opéra aux fruits de la passion. "J'ai pris un grand plaisir à me retrouver avec ces trois jeunes en cuisine, dans un esprit très sympathique mais pour autant rigoureux ; jusqu'à la fin de mon contrat cet hiver, je considère que je suis ici chez moi, et que ces apprentis sont sous ma responsabilité", ajoute le chef. Les jeunes cuisiniers le lui rendent bien par l'affection et le respect de celui qui s'est imposé comme un maître, à tous les sens du mot, au piano des Jardins du cèdre.
Lorsque cette aventure s'achèvera, Henri Delcros envisage d'ouvrir un petit commerce de ganaches au chocolat à emporter. L'occasion peut-être de former d'autres jeunes. En tout cas, la retraite oisive, ce n'est pas pour demain.
Publié par Francis MATÉO