En 2011, le chef s'installait à Draguignan en ouvrant son restaurant gastronomique Côté Rue. "C'était un vrai choix de venir m'installer, chez moi, à Draguignan. Les débuts ont été difficiles, mais l'obtention de l'étoile Michelin en 2013 nous a fait décoller. Elle a mis en lumière la gastronomie dracénoise, c'était un vrai engagement de participer au dynamisme local d'une ville qui avait la réputation d'être militaire et dortoir."
Après avoir déménagé son restaurant gastronomique au château de Berne, Benjamin Collombat a conservé Côté Rue en lui donnant un nouveau positionnement avec des tapas gastronomiques à prix étudiés : 18 € pour la formule du midi, 36 € en proposition à volonté. "On a écouté nos clients, on a refait la décoration pour être plus convivial, on a proposé des prix justes pour lutter contre les préjugés sur la gastronomie tout en gardant un bon rapport qualité-prix. J'ai l'impression qu'on a fait tout ce qu'on pouvait pour comprendre la clientèle." Mais avec le sentiment de ne pas trouver la bonne réponse.
Avec un ticket moyen à 28 €, la nouvelle version de Côté Rue a plu sans jamais trouver sa vitesse de croisière. "À un moment, on en vient à se poser la question de son engagement, à douter de son métier. La qualité, la démarche artisanale, les circuits courts, toutes ces valeurs que prônent les chefs... C'est à se demander si c'est en adéquation avec les attentes de la majorité de la clientèle."
En juin 2015, pour varier la proposition, Benjamin et Sandrine Collombat ont ouvert la brasserie Bertin, appuyés par la dotation Jeunes Talents Gault&Millau. "La dotation apporte un soutien en matériel et auprès des fournisseurs. Mais la vraie difficulté aujourd'hui, ce sont les banques. Sans le soutien de mon père et de mes proches, on n'aurait jamais pu avoir ces outils de travail. Les banques ne suivent plus les restaurateurs et encore moins aujourd'hui."
Un contexte économique morose
Brasserie chic située en plein centre-ville, le Bertin proposait une cuisine de terroir avec un ticket moyen à 26 €. Bon emplacement, maison historique, parking, ce qui lui aura manqué, c'est là aussi le volume de clientèle. "Je suis convaincu qu'il faut aujourd'hui égayer nos centres-villes, donner envie aux gens de sortir", vitupère Benjamin Collombat. Là aussi, les récompenses sont arrivées, avec un Bib Gourmand décerné par le guide Michelin en février dernier. "On est contraints de fermer par manque de monde, mais cette distinction nous a confortés professionnellement dans de grands moments de doutes", concède le chef.
Peu de soutien des banques, des charges salariales élevées, un manque de dynamisme à Draguignan… Pour autant, les deux restaurants avaient une gestion saine et des ratios justes. Le problème est plus profond d'après le chef : "Aujourd'hui, les gens regardent à la dépense. L'activité est morose. Peu importe l'endroit, le concept, si on ne redonne pas du pouvoir d'achat au consommateur, il ne va pas consommer. Je l'avais dit à Emmanuel Macron lorsque je l'ai rencontré, en 2016, avec les Jeunes Talents Gault&Millau."
S'il est déçu de ne pas avoir réussi à perdurer dans sa ville natale, le chef ne renonce pas pour autant. "Mes clients me retrouveront au château de Berne. C'est beaucoup d'engagement de gérer trois lieux en même temps. Désormais, je vais me concentrer sur Le Jardin de Benjamin, avec pour ambition d'y amener une deuxième étoile et pourquoi pas décrocher un Bib Gourmand au bistrot."
Publié par Marie TABACCHI